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William Servat : « Cette dernière mêlée, c’est le symbole de notre état d’esprit »

Par Propos recueillis par Nicolas Zanardi
  • William servat (Co-entraîneur du XV de France)  : « Cette dernière mêlée, c’est le symbole de notre état d’esprit »
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S'il confesse n’avoir aucun souvenir de la victoire de 1990 (« à l’époque, j’avais 12 ans et je jouais au foot... »), le co-entraîneur du XV de France William Servat n’en savoure pas moins la portée historique d’un exploit révélateur de la profondeur du réservoir français. Et qui en appelle désormais un autre...

Le XV de France l’a emporté pour la première fois en Australie depuis 1990 et jouera samedi pour le gain de la tournée. Saisissez-vous la portée historique de l’événement ?

On n’a pas vraiment de recul sur ce qu’on vient de faire, après avoir traversé cette quatorzaine qui n’était pas évidente. Mais paradoxalement, cette période a pesé dans notre réussite. Bernard Laporte était avec nous durant toute cette période, et sa présence a été très bénéfique car elle a permis de créer une véritable passerelle avec les joueurs. Fred Michalak aussi, avec son expérience et un autre regard, ses qualités humaines… Avec les moyens du bord, nous avons réussi à créer un groupe qui a commencé petit à petit à organiser ses petits moments de vie, à partager des choses. Sans aller jusqu’à dire qu’on s’est préparé comme des Barbarians, on a eu un mode de fonctionnement qui s’en est rapproché dans le sens où nous avons réussi à créer assez rapidement un groupe et une équipe.

Après avoir brisé le signe indien au pays de Galles puis en Irlande lors des derniers Tournois, le XV de France est désormais arrivé à gagner en Australie. Et continue d’écrire sa petite histoire…

C’est vrai et pourtant, rien n’était gagné d’avance. Quand on est parti, beaucoup se demandaient à quoi pouvait servir cette tournée, si elle était utile. Nous sommes partis avec énormément de joueurs sans sélection, nous en avons capé une dizaine en deux matchs. On a vu des joueurs exploser, des nouveaux leaders émerger. Si bien qu’aujourd’hui, je crois que plus personne ne se pose la question de l’utilité de cette tournée pour le XV de France.

Ce qui a frappé au sujet de ces jeunes Bleus depuis deux matchs a été leur capacité à s’approprier leur aventure…

Ça a été le sens du message de Bernard Laporte. Ce qu’il a dit aux joueurs, c’est que si l’équipe de France était à tout le monde, son maillot n’appartient à personne. Quand on porte le maillot bleu, si on est bon, il faut venir nous l’enlever. Ils ont parfaitement compris quel était l’enjeu de cette tournée.

Au sujet de ce maillot bleu, avant le début de votre tournée, Jean-Pierre Rives nous avait accordé une interview dans laquelle il le comparait à la cape de Superman, « qui permet de voler, de s’envoler, de réaliser des choses qu’on n’imagine même pas. » Et de conclure que « quand on joue en équipe de France, il faut se convaincre que tout est possible . » Ces mots n’en prennent que plus de sens aujourd’hui…

J’avais lu cette interview et pour tout vous dire, j’avais transmis ces propos aux joueurs avant le match. Jean-Pierre est quelqu’un que j’ai rencontré sur le tard, mais qui a été depuis une énorme source d’inspiration dans toute ma carrière, quelqu’un qui m’apporte toujours quand j’échange avec lui. J’aime ce qu’il dégage, j’aime sa personnalité et il m’inspire dans ma manière d’être, de vivre avec le groupe. Je l’ai eu plusieurs fois au téléphone depuis le début de la tournée, je l’ai même eu dans le vestiaire après notre victoire contre les Wallabies. Il est important pour moi.

Alors, ce maillot bleu est-il vraiment comme la cape de Superman ?

Je ne sais pas… Mais quand on voit le nombre de plaquages qu’ils ont réalisés mardi, la dureté qu’ils ont su imposer sur tous les impacts, on peut dire que les joueurs l’ont porté comme ça, oui.

Vous jouerez samedi pour la première victoire série de tests victorieuse du XV de France en Australie depuis 49 ans. Mais quoi qu’il arrive, votre tournée n’est-elle pas déjà réussie ?

Dans la perception que nous en avions et sur le chemin qui est le nôtre, cette tournée est déjà une réussite, oui. Non seulement nous avons procédé à un énorme roulement par rapport à la fin du dernier Tournoi, mais nous avons réussi à créer en peu de temps une équipe, avec un véritable état d’esprit. Après, être compétiteur, est-ce que c’est se satisfaire de ça ou aller chercher un trophée ? Je crois que la réponse tombe sous le sens…

Fabien Galthié a catalogué comme « irrationnelle » votre victoire de mardi. Cette dernière mêlée sur laquelle vous obtenez symboliquement la pénalité de la victoire l’est-elle, à vos yeux ?

La victoire oui. Cette mêlée, non. Elle s’est construite depuis le début de la tournée, peut-être même depuis le début de notre mandat. Il a fallu du temps pour s’y préparer mais je crois qu’un vrai message est passé, celui d’une envie collective de gagner qui s’est matérialisée autour de cette mêlée. Laquelle m’a fortement rappelé celle que nous avons gagnée sur notre ligne d’en-but au pays de Galles, en 2020.

Sauf qu’à l’exception de votre axe droit Bamba-Taofifenua, aucun joueur n’était de cette fameuse mêlée de Cardiff…

On revient à l’état d’esprit dont je vous parlais, aux mots de Jean-Pierre Rives… L’équipe supplante toujours les individualités et quand tu veux pousser collectivement, la préparation prime l’action. Si notre mêlée nous a permis d’enfoncer le clou, c’est bien parce que les mecs l’ont poussée collectivement. Il pouvait bien y avoir Cameron Woki en deuxième ligne ou Jonathan Danty en troisième ligne, quand on pousse collectivement, ce n’est pas un problème. Et ça, c’est peut-être le meilleur symbole de notre tournée.

Cette tournée met en exergue la profondeur d’effectif du rugby français. Vous en étonnez-vous encore ?

Cette richesse est incroyable. Il y a des tas de mecs que je découvre lors de cette tournée, comme Pierre-Henri Azagoh, Ibrahim Diallo, Enzo Forletta ou encore Gaëtan Barlot que rien n’impressionne. Il y a aussi d’autres joueurs qu’on ne découvre pas, mais qui révèlent d’autres facettes. Jean-Baptiste Gros qui confirme, par exemple, mais il y en a tant d’autres que je préfère ne pas tous les citer… J’aurai quand même un mot particulier pour Anthony Jelonch, qui était déjà un leader par l’exemple mais qui, sur cette tournée, me fait penser en de nombreux points à Thierry Dusautoir.

En 2009, le capitaine par intérim qu’était Dusautoir s’était même adjugé définitivement les galons après une tournée victorieuse en Nouvelle-Zélande. Jelonch peut-il connaître le même destin, d’autant que Charles Ollivon devrait encore être absent en novembre ?

À l’époque, les conditions étaient quand même différentes, même si tout n’avait pas été simple non plus dans sa préparation. Cette tournée, comme celle que nous vivons actuellement, restera comme un grand souvenir. Charles est le merveilleux capitaine de notre équipe de France, même s’il en est absent temporairement. Anthony l’est aussi sur cette tournée. Quoi qu’il en soit, il est prématuré de se poser ce genre de questions pour novembre. D’abord, nous avons une tournée à conclure…

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