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Hounkpatin, le parcours atypique d'un « big bizuth »

  • Wilfrid HOUNKPATIN
    Wilfrid HOUNKPATIN Icon Sport - Icon Sport
Publié le Mis à jour
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A bientôt 30 ans, Wilfrid Hounkpatin est un des novices les plus âgés de cette tournée. Le pilier droit a suivi un itinéraire particulier. Mais sa présence est due à tout sauf au hasard. Retour sur une trajectoire unique.

Ce mardi, quand il pénétrera sur la pelouse du Suncorp Stadium, Wilfrid Hounkpatin verra peut-être défiler toute sa carrière. Après une décennie de rebonds et d’efforts, le pilier droit s’apprête à voir son vœu sportif le plus cher être exaucé, seize jours avant de souffler sa trentième bougie : Ça serait un rêve d’avoir au moins une sélection”, avait confié le natif d’Aubagne, à l’automne dernier. À l’autre bout du monde, ce songe va devenir réalité. Un formidable accomplissement pour un joueur ayant découvert le rugby à 17 ans, à l’âge où d’autres commencent à s’inviter dans la cour des grands. Son destin ne ressemble à aucun autre. Cette singularité le rend beau, unique. Après sa tardive détection à Nîmes, un séjour au centre de formation de Montpellier puis un court passage à Narbonne, Wilfrid Hounkpatin saisit une main tendue.

Une poigne ferme, pleine de détermination et de sagesse. Celle de Richard Hill, éminence grise du rugby anglais, fraîchement arrivé à Rouen. "Nous avons fait venir Wilfrid à Rouen en 2014, nous expliquait dernièrement l’ancien demi de mêlée du XV de la Rose. À l’époque, on voulait choisir des jeunes joueurs pour faire progresser Rouen rapidement dans le championnat. Wilfrid avait déjà beaucoup de potentiel. C’était clair. Physiquement, c’était un monstre. Il manquait d’expérience de jeu. Donc beaucoup d’entraîneurs avec moi ont investi du temps pour lui. Je l’ai emmené chez moi à Bath. Wilfrid est resté avec ma femme, pendant une semaine. Ensemble, nous avons visité les clubs de Gloucester, de Bath, de Bristol pour travailler avec les entraîneurs de ces équipes. Il a travaillé surtout la mêlée. C’était une bonne expérience, pour lui donner de la motivation et lui apprendre des choses."

Pourquoi l’Angleterre, alors ? Hill reprend : "Je l’ai emmené là-bas pour qu’il apprenne vite sur les techniques en mêlée. J’ai gardé un solide réseau à Bath, Gloucester et Bristol. Je connais beaucoup de monde dans ces clubs. Ils étaient vraiment contents de recevoir Wilfrid pour l’aider à avancer. C’était la meilleure façon de progresser en travaillant avec les meilleurs coachs. À l’époque je rappelle que nous étions en Fédérale 1 et le niveau des piliers en Fédérale ne permet pas de progresser rapidement. Ce n’est pas un niveau de Pro D2. Là, il était avec des entraîneurs de Premiership."

Un profil taillé pour l'international

L’investissement se révèle payant. Pour le technicien comme pour le joueur. Aux côtés de Gabin Villière – tiens, tiens, Wilfried Hounkpatin porte Rouen jusqu’au sommet de la Fédérale 1. Son ascension doit se poursuivre ailleurs, dans un monde taillé à sa dimension. Christophe Urios le repère et lui offre, à 27 ans, l’occasion de se frotter à l’élite. Dans le Tarn, le numéro 3 poursuit sa montée en puissance : sa constance en mêlée et son impact dans le jeu courant attirent l’attention. En janvier 2020, Fabien Galthié l’appelle pour rejoindre un premier groupe de quarante-deux. Une blessure aux côtes le contraint à quitter le groupe après quelques jours à Nice. À la Coupe d’automne des Nations, en l’absence de la doublette Haouas-Bamba, il voit le trio Aldegheri-Atonio-Oz le devancer. Pour autant, il n’abdique pas.

Au contraire, il redouble de motivation et décuple ses efforts : Je travaille beaucoup ma mobilité, expliquait-il en décembre dernier. J’ai perdu 5 kilos, je me sens un peu mieux sur le terrain, j’essaie d’être plus présent. Je continue aussi de faire mon travail sur la mêlée. William (Servat) me donne beaucoup de conseils dans ce secteur de jeu. Je travaille aussi de mon côté avec le CO, on fait de temps en temps des grosses sessions d’oppositions en mêlée. Hors club, je suis aussi en contact avec Alexandre Castola, préparateur physique spécialiste de la mêlée. Je travaille avec lui depuis plusieurs années. On fait beaucoup d'analyses vidéos et de techniques. Je sais que j’ai encore une marge de progression. Chaque jour quand je me lève, je me dis qu’il faut que je m’améliore.”

La promesse est tenue. Le droitier dispute vingt-quatre des vingt-six matchs de championnat, inscrit deux essais, multiplie les charges et plaque à tours de bras, affichant un remarquable 92 % d’efficacité dans ce secteur. Quoi de plus logique, donc, que de le retrouver désormais en Australie ? Après avoir assisté au premier test-match depuis la tribune, le gamin des Bouches-du-Rhône va débarquer sur la scène internationale où ses 191 centimètres, ses 127 kilos et son dynamisme devraient pleinement s’épanouir. Son profil paraît en tout cas taillé pour relever le défi imposé par les athlétiques Wallabies : “Je suis prêt à tout donner pour le maillot tricolore, avait-il annoncé quelques mois plus tôt. Je pense que le staff le sait déjà puisque j’ai déjà eu cette chance de travailler avec eux. Ils savent de quoi je suis capable.” La France du rugby attend de le voir à l’œuvre. L’histoire est belle, déjà. Mais ce n’est peut-être qu’un début. Le commencement d'un nouveau chapitre.

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