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Qu’est-ce qui peut encore pousser les Toulousains ?

  • Les Toulousains veulent donner une belle sortie à Maxime Médard qui prolonge une saison supplémentaire en Rouge et Noir.
    Les Toulousains veulent donner une belle sortie à Maxime Médard qui prolonge une saison supplémentaire en Rouge et Noir. Photo Midi Olympique - Patrick Derewiany - Patrick Derewiany
Publié le Mis à jour
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La semaine dernière, le Stade toulousain s’est donc offert un doublé historique grâce à sa victoire nette et sans bavure (18-8) contre le Stade rochelais en finale du Top 14. Un vingt-et-unième Bouclier de Brennus, quelques semaines après la cinquième Coupe d’Europe, à ajouter dans le plus fourni des palmarès du rugby français.

Alors que la saison 2019-2020 n’était pas allée à son terme à cause de l’épidémie de Covid-19, les Rouge et Noir sont donc restés sur leur lignée de 2019, quand ils avaient fini un exercice d’anthologie (avec seulement trois défaites en championnat) par un titre de champion de France, sept ans après le précédent. L’été passé, les hommes d’Ugo Mola s’étaient ainsi fixé l’objectif, devenu une véritable obsession au fil des mois, de rafler celui européen, onze ans après le dernier du club. Mission accomplie. Puis, comme « l’appétit vient en mangeant » tel que le répètent ses joueurs, ils sont parvenus à asseoir encore un peu plus leur outrageuse domination. Aujourd’hui, les Rouge et Noir ont tout gagné ou presque (c’est d’autant plus vrai pour Cheslin Kolbe qui, depuis 2019, a aussi remporté un Rugby Championship et la Coupe du monde au Japon avec les Springboks). Pour la plupart, ils sont très forts, ils sont jeunes et ils sont adulés. Si bien qu’une interrogation apparaît désormais légitime : après quoi ces garçons-là – pour la grande majorité sous contrat avec le Stade toulousain jusqu’en 2023 – pourront-ils bien courir dans les mois et années à venir ?

Les hommes à abattre, mais…

Vendredi soir, dans les entrailles du Stade de France, les champions de France et d’Europe insistaient évidemment sur leur besoin de profiter de vacances comme ils n’en ont jamais eues (six semaines), après treize mois passés sur le pont qui ont entraîné une usure physique et mentale renforcée par l’incertitude de la situation sanitaire tout au long de cette période. Mais, dans la foulée, ils assuraient déjà qu’ils reviendraient, si ce n’est meilleurs, plus motivés que jamais. Des paroles aux actes, il y aura bien sûr un monde à dompter sur le terrain. Les Toulousains se savent attendus. Ils ont mis la barre tellement haut qu’ils seront les hommes à abattre. Mais, à y regarder de plus près, les raisons de faire perdurer leur suprématie sur le rugby français et international sont plus nombreuses qu’il n’y paraît. Tour d’horizon de ce qui va porter les « invincibles » dès septembre.

France 2023 dans le viseur

Lorsqu’il fut demandé récemment à Antoine Dupont si la suite logique pour les Toulousains était d’être champion du monde en 2023, lui avait répondu dans un sourire : « C’est tout le mal que je nous souhaite. » Cette échéance est aujourd’hui indissociable des ambitions d’une troupe étiquetée « génération 2023 » depuis quelque temps déjà. Le club l’avait bien compris en amont. « Il y a un projet jusqu’en 2023 pour accompagner cette génération, et il y en aura forcément un autre ensuite », expliquait le manager Ugo Mola dans ces colonnes lundi.

Son président Didier Lacroix, lequel a toujours voulu associer les objectifs de ses hommes à ceux de la sélection en vue du Mondial à domicile et qui est même devenu vice-président de la LNR chargé des relations avec le XV de France, s’est servi comme une aubaine de cet événement qui génère de forts espoirs pour le rugby hexagonal. La grande majorité du groupe et du staff des Rouge et Noir est d’ailleurs actuellement sous contrat jusqu’en juin 2023. En clair, avant de partir monnayer leur carrière ailleurs s’ils le souhaitent, les joueurs ont accepté cette forme de deal avec leurs dirigeants : tout gagner pour se donner l’opportunité d’être champions du monde dans deux ans. Parce que, pour atteindre le sommet de la hiérarchie, les Bleus ont besoin d’un grand Stade toulousain, plus important pourvoyeur d’internationaux à ce jour.

Les acteurs en sont conscients aussi. Plus ils continueront à gagner en club, plus ils seront prêts à le faire à l’échelon supérieur. D’autant que leurs repères communs à Ernest-Wallon sont une garantie. Par exemple, Antoine Dupont et Romain Ntamack forment l’indissociable charnière toulousaine, ce qui peut lui conférer une longueur d’avance sur la concurrence à Marcoussis. Idem pour Cyril Baille, Julien Marchand, Dorian Aldegheri ou Peato Mauvaka en première ligne. Sans oublier une troisième ligne qui réunira François Cros, Anthony Jelonch et Selevasio Tolofua la saison prochaine, ou un triangle d’attaque sur lequel Thomas Ramos et Matthis Lebel pourront s’exprimer ensemble. La chance du XV de France, c’est donc aussi celle du Stade toulousain.

La victoire est addictive

La question de voir s’installer chez les Toulousains une forme de routine après avoir gagné trois titres dans les quatre dernières compétitions qu’ils ont disputées, et donc une certaine décompression, s’est vite posée après la finale de Top 14. Antoine Dupont a catégoriquement réfuté : « Gagner des titres, c’est un bonheur tellement immense. C’est bateau ce que je vais dire mais on travaille pour ça toute l’année et les saisons sont si longues… Quand tu arrives à le concrétiser au bout, c’est énorme. On ne se souvient toujours que du champion, pas du finaliste ou du demi-finaliste. […] Je ne peux absolument pas être rassasié, ni lassé. Notre soif de vaincre, la mienne en particulier, ne va pas s’arrêter là. La motivation va très vite revenir. » Parce que le succès est addictif et que ces hommes-là ne pourraient pas se contenter très longtemps des places d’honneur.

D’autant plus que, s’il est un point sur lequel il n’y a plus aucun débat, c’est que les Rouge et Noir sont devenus plus encore que des compétiteurs hors normes au fil des triomphes. Ils sont désormais des champions, dans tous les sens du terme. Un statut qui s’assume et même qui se revendique. Cela se mesure parfois à la susceptibilité, et celle des Stadistes fut – de façon justifiée ou non – touchée à l’approche de la finale de championnat quand l’impression laissée par les demi-finales plaçait les Rochelais en position de force. « Les joueurs y ont puisé une énergie supplémentaire, explique Clément Poitrenaud. Quand tu finis premier du championnat, que tu es champion d’Europe, que tu as battu trois fois ton adversaire… Il y a eu des choses que l’on comprenait moyennement, surtout de la part d’observateurs avisés. Avoir réveillé la bête n’était pas forcément une bonne idée. » Aussi parce que cette bête exècre dorénavant la défaite.

Soigner la sortie de Maxime Médard

Les Toulousains ont donc offert une sortie par la grande porte au double champion du monde all black Jerome Kaino et à l’international Yoann Huget, lesquels ont mis un terme à leur carrière de joueur. Ils auront l’occasion de le faire pour un autre monument l’an prochain. Maxime Médard, légende d’Ernest-Wallon, a confirmé qu’il allait continuer pour une dernière saison. Et il serait tellement injuste pour lui de partir par l’issue de secours… Ces derniers temps, l’arrière a accroché sa troisième Coupe d’Europe personnelle et son cinquième Bouclier de Brennus. Lui, qui a effectué toute sa carrière professionnelle à Ernest-Wallon, possède un CV hors normes, à la hauteur du compétiteur qu’il est. S’il doit désormais s’inscrire dans un rôle d’accompagnement et de transmission, il est évident qu’il se verrait terminer sur un (ou deux) nouveau(x) titre(s).

Faire mieux que la génération 90

C’est peut-être un détail pour vous mais, pour eux, ça veut dire beaucoup… L’immense héritage du Stade toulousain explique en partie la culture de la gagne unique dans cette institution. Mais c’est aussi parfois un lourd poids à porter pour les différentes générations. L’actuelle a souvent répété qu’elle voulait « écrire sa propre page » du grand roman rouge et noir. Elle est peut-être là sa plus belle victoire d’ailleurs. « On souhaitait marquer l’histoire et on l’a fait », clamait François Cros vendredi dernier. Et Ugo Mola de noter : « En 2019, j’avais reçu un message de mon prédécesseur (Guy Novès, N.D.L.R.) me disant que le plus dur était de rester au très haut niveau. On y reste un peu plus au terme de cette saison, pas encore autant que le club l’a déjà fait sous ses ordres, mais le groupe actuel est sensationnel. »

Puis de confier dans ces colonnes lundi : « Ce groupe est taillé pour gagner beaucoup et longtemps. » Jusqu’à faire encore mieux que les plus glorieux anciens ? Au milieu des années 90, le Stade toulousain avait aussi été sacré champion d’Europe (1996) et avait raflé quatre Brennus d’affilée (1994, 1995, 1996 et 1997). Aujourd’hui, la troupe du capitaine Julien Marchand en est à deux de rang et, quand l’on connaît la moyenne d’âge très peu élevée des talents qui garnissent Ernest-Wallon, il est aisé de penser qu’ils ont encore de belles années devant eux…

Il y a des frustrations à combler

En cette fin de saison, alors que l’effectif était à bout de souffle, il a su servir de tous les leviers de motivation qu’il a trouvés. Le plus évident était d’offrir enfin un titre sur le terrain au capitaine Julien Marchand. Le talonneur international avait raté la fin de parcours en 2019 en raison d’une grave blessure au genou puis était suspendu lors de la dernière finale de Champions Cup. La saison prochaine, il y aura encore de quoi trouver ce genre de motivation. Sofiane Guitoune, cadre du vestiaire, a ainsi été fauché en plein vol (genou aussi) au mois de mars et nul doute qu’il sera revanchard lors de l’exercice à venir. Idem pour Alban Placines, qui s’est cassé le bras alors qu’il venait de gagner sa place dans le XV de départ, Lucas Tauzin, Arthur Bonneval ou Emmanuel Meafou qui n’ont pas été épargnés.

Ce dernier a tout pour remporter un titre majeur en étant présent sur la pelouse, comme Antoine Miquel, auteur d’une saison remarquable et sorti de la feuille de match en finale pour des questions stratégiques. Enfin, il y a le cas Romain Ntamack. Remplaçant en 2019, il a manqué la finale de Top 14 la semaine passée, à cause du terrible K.-O. qu’il a subi en demi-finale, alors qu’il était dans une forme lumineuse. Ce ne sera sûrement pas le moins enthousiaste à l’idée de revenir au Stade de France.

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