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Grand entretien avec Saïd Hirèche : « Enfant, je me cachais pour aller aux entraînements de rugby »

Par Vincent BISSONNET
  • Le troisième ligne du CAB Saïd Hirèche s'est longuement confié. Il a évoqué l'ensemble de sa carrière.
    Le troisième ligne du CAB Saïd Hirèche s'est longuement confié. Il a évoqué l'ensemble de sa carrière. Midi Olympique - Patrick Derewiany
Publié le Mis à jour
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Lentement mais sûrement, Saïd Hirèche s’est affirmé comme une des figures symboliques du rugby français. à 35 ans, le discret Franco-algérien, forgé par le ProD2 et qui s’épanouit depuis neuf ans avec Brive, surprend par sa longévité et sa régularité au plus haut niveau.Quelle histoire se cache derrière ce parcours peu commun ?D’ordinaire discret et avare de mots quand il s’agit de parler de sa propre personne, le troisième ligne a accepté de se livrer pendant plus d’une heure, la semaine passée.Il parle de son enfance dans les quartiers, de sa découverte du rugby, de sa passion chevillée au corps.Rencontre.

Vous comptez près de 300 matchs en pros mais on vous connaît assez peu, personnellement. D’où venez-vous ?

Parler de moi, ce n’est pas un truc dont je raffole. Je viens de Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines. J’ai vécu là-bas jusqu’à 22 ans.

D’où viennent vos parents ?

Ils sont nés en Algérie et sont arrivés en France quand il y avait eu la vague de migration, pour travailler. On y allait tous les étés jusqu’à mes 10 ans.

Comment s’est passée votre enfance ?

J’ai grandi au sein d’une famille nombreuse, avec six sœurs et deux frères. Mon père travaillait chez Renault. Il était manutentionnaire-cariste. Il déchargeait les camions. J’y ai bossé aussi, les étés, car la boîte embauchait les enfants des employés. Ma mère, elle, s’occupait de personnes âgées. Enfin, à partir du moment où la petite dernière est allée à l’école. Avant, elle nous a élevés. À la maison, les plus grands s’occupaient des petits, c’était le cycle.

Quel souvenir gardez-vous de ces jeunes années ?

Là-bas, la vie  était tranquille. Quand tu es jeune, tu es insouciant, tu ne penses à rien : tu vas à l’école, tu fais ta vie, tu t’amuses. Je n’étais peut-être pas conscient de ce qui se passait autour, j’étais focalisé sur moi, mes copains, ma famille. C’était cool, vraiment. Après, il ne fallait pas faire de conneries car tout le monde se connaissait. Si tu faisais un truc de travers, tu prenais une tarte. Chacun veillait sur les autres. Moi, j’étais sage. Toujours.

Comment était la vie de quartiers ?

À Mantes-la-Jolie, il y avait trente-cinq ethnies mélangées, il y avait du monde de partout : la voisine du dessus était Malienne, le voisin d’en face était Marocain, il y avait des Portugais… Ce qui est beau, je m’en rends compte avec le recul, c’est que ça m’a appris le vivre ensemble. La cité fait découvrir et appréhender d’autres cultures, d’autres religions. Il y avait beaucoup de rencontres, beaucoup d’échanges. Ça inculque des valeurs et des principes importants pour la suite de la vie. Je me dis que c’était fou quand même.

Vous en parlez avec un sourire dans la voix…

Je ne pense pas avoir eu une enfance malheureuse. Mes parents ont fait en sorte que l’on ne manque de rien, qu’on mange bien, qu’on soit bien habillé, qu’on puisse aller faire du sport. Ce n’est pas pour faire pleurer dans les chaumières mais c’était un investissement de payer une licence. Tout le monde ou presque pratiquait le sport, chez nous. Mon père adorait ça, le foot particulièrement.

Quelle a été votre première passion ?

Comme dans toute cité, j’ai commencé par le ballon rond. À l’époque, il n’y avait pas de city stade. C’étaient deux arbres qui faisaient office de cages et on se débrouillait. On se retrouvait en bas de l’immeuble avec les copains. On jouait aussi au base-ball, ce qui était plus rare. Mais c’était surtout le foot. Tout le monde avait pris sa licence et se retrouvait le mercredi au club. De 6 à 11 ans, j’étais licencié à l’AS mantaise. Les maillots étaient jaune et bleu, comme Clermont.

Vous étiez doué ?

Je n’étais pas mal. Je jouais plutôt milieu défensif. C’est là où j’étais le meilleur. Mon père voulait que je marque des buts mais bon, j’étais mieux derrière. Lors des tournois, plus grand, je finissais même parfois au but.

Le sport a eu une grande importance dans votre développement, donc ?

Notre père nous amenait partout, aux entraînements, aux matchs… On allait supporter nos grands frères le dimanche, on prenait les vélos pour voir mes sœurs lors de leurs compétitions d’aviron, aussi… Il y avait toute la famille qui était au soutien, à chaque fois. Une de mes grandes sœurs a évolué à haut niveau en aviron et a représenté l’Algérie aux JO de Sydney et d’Atlanta. Je me souviens du défilé. Tout le monde était devant la télé : on avait attendu, attendu longtemps pour la voir. Et puis elle était apparue à l’écran. C’était une fierté énorme pour nous. Et la récompense de centaines d’heures passées sur le bassin, pour elle. Le sport a toujours été un élément fédérateur dans notre famille. C’est encore le cas aujourd’hui : tout le monde suit et commente mes matchs.

Quels sportifs ont marqué votre jeunesse ?

À l’époque, la star, c’était George Weah. Je me rappelle aussi des retournés d’Amara Simba. J’étais devenu supporter du PSG car le centre de loisirs avait des places pour le Parc des Princes. On montait dans le bus, à 50 ou 100, et on se retrouvait à côté de la tribune Auteuil dans le stade.

Quel a été votre cheminement, après avoir arrêté le foot ?

J’ai fait un an de karaté mais ça ne m’a pas plu. Je voulais du combat mais il n’y en avait pas. Ce n’était que du kata. J’ai rejoint ma sœur à l’aviron, du coup. J’y suis resté pendant quatre, cinq ans. C’était vraiment très bien pour le développement physique mais l’hiver, il faisait froid quand même. Avec le recul, là aussi, je me rends compte de l’importance que ça a eue. Ça m’a appris le travail d’équipe. Quand tu te retrouves à quatre ou à huit dans la même embarcation, il faut de la cohésion, de la coordination.

À l’adolescence, cette pratique a dû vous transformer physiquement ?

C’était très dur, très intense. Il n’y avait pas trop de musculation des jambes car nous étions jeunes mais ça m’avait bien renforcé le dos. C’est peut-être pour ça que, lorsque j’ai commencé le rugby, je me suis tout de suite bien senti physiquement.

Comment êtes-vous arrivé au rugby, justement ?

Il y a eu deux éléments déclencheurs. Lorsque j’étais à l’aviron, il y avait eu un tournoi interdiscipline qui m’avait fait découvrir le rugby. Ensuite, j’ai rencontré Marc Jourdaine dans un centre de loisirs. C’était un ancien joueur de haut niveau. Il m’avait dit : « Tu vas venir à la rentrée, tu es grand, tu es costaud, ça va te plaire je pense. » J’ai essayé et je n’ai plus lâché jusqu’à maintenant. J’étais à fond.

Que connaissiez-vous du rugby, avant ça ?

Avant ça (il rigole) ? En fait, le terrain de rugby était à côté de celui de foot, à Mantes. Il y avait un grillage qui séparait les deux. Un jour, il y a un ballon ovale qui est arrivé sur notre pelouse. Je me suis demandé ce que c’était. Je n’avais encore jamais vu de rugby. On a renvoyé le ballon et on s’est mis à regarder. Je me souviens avoir vu une mêlée, j’avais trouvé ça bizarre.

Qu’est-ce qui vous a le plus plu ?

En fait, quand j’avais 11 ans, on avait déménagé et changé de quartier. J’avais perdu plein de copains de vue et je les ai tous retrouvés au rugby. C’est surtout ça qui m’a donné l’envie d’y revenir chaque mercredi, chaque samedi. C’est toujours les copains, au début…

Saïd Hirèche est venu tard au rugby, pour jouer avec les copains
Saïd Hirèche est venu tard au rugby, pour jouer avec les copains Midi Olympique - Patrick Derewiany

Comment se sont passés les premiers pas, sportivement parlant ?

Je ne connaissais pas les règles. On m’a dit : « Tu plaques, tu prends le ballon, tu avances… » Je suis parti sur les basiques. J’étais à l’aise car j’avais mes potes autour. Ça a facilité les choses.

À quel moment le loisir est-il devenu plus qu’une histoire d’amis ?

Nous étions trois ou quatre de Mantes à être retenus en sélection régionale. Le Racing et le Stade français se sont intéressés à nous. Avec mon pote, qui s’appelle Omar Sy, comme l’acteur, on s’est dit : «On y va? On n’y va pas ?» Je devais rejoindre le Racing, lui était censé partir au Stade français. On s’est dit qu’on allait faire la route ensemble et je suis donc parti à Paris, avec lui. J’ai commencé à jouer en Reichel, j’ai pris le train… Ça me changeait. Le moment où j’ai compris que ça devenait sérieux, c’est quand je me suis mis à m’entraîner avec les pros. Je me suis dit : « Ça vaut le coup de s’accrocher, de s’envoyer, de faire les efforts. » Ce qu’il faut savoir, c’est que je partais de Mantes après l’école pour aller à Meudon ou Vaucresson, pour l’entraînement. Ça faisait beaucoup de route et on ne gagnait pas beaucoup d’argent. Les primes de match comblaient les frais d’essence. Avec mon pote, on s’est demandé si ça valait le coup, à un moment. Mais on n’a pas lâché. Lui est parti en centre de formation à Castres, moi j’ai continué au Stade. À 19 ans, j’ai eu mes premières minutes contre Bayonne. C’était le 19 novembre 2005, je crois. À partir de là, je me suis impliqué à fond pour être au niveau.

Que faisiez-vous, par ailleurs ?

Je n’avais pas arrêté l’école. Je cherchais un métier manuel que je pouvais commencer rapidement. Avec la seconde générale, je ne voyais pas trop de débouchés. J’ai donc choisi un BEP mécanique auto puis un Bac Pro. J’ai été embauché chez Renault. Ça n’a duré qu’un mois. Avec les entraînements, j’étais trop fatigué. J’ai donc repris les études avec un BTS technico-commercial.

Être pluriactif, était-ce une nécessité à vos yeux ?

Déjà, si j’avais arrêté l’école, mes parents et mes frères m’auraient éclaté. En plus, je ne savais pas à ce moment-là ce que ma carrière allait donner, si j’allais être professionnel. Jusqu’aux espoirs, je n’en avais aucune idée. Il était donc important que je continue à me former. C’est ce que je dis à tous les jeunes que je croise : l’école, c’est primordial pour faire d’autres rencontres, garder une ouverture d’esprit. Sinon, tu te renfermes et ce n’est jamais bon.

Quel regard vos parents portaient-ils sur cette possible carrière de rugbyman ?

À la base, ma mère ne voulait pas que je fasse du rugby. Elle avait peur que je m’abîme, que je me blesse. Elle a mis du temps à venir me voir jouer, même mon père. Au début, je me cachais même pour aller aux entraînements.Mes parents ne savaient pas que j’allais au rugby. La première année, j’allais à l’aviron à 14 heures et il y avait rugby à 18 heures. Entre les deux, j’attendais avec mon sac. C’était l’activité cachée. Le président, Pierre Lartot, avait été hypercool car je n’avais pas eu à payer ma licence la première année. Ça coûtait assez cher. Les années d’après, on pouvait la rembourser au fur et à mesure. C’est beau de faire preuve d’une telle générosité.

Comment ont réagi vos parents quand ils ont assisté à leur premier match ?

Quand ils sont venus, ils ont dit : « Mais c’est un sport de fou. » Ils trouvaient ça violent. Mais ils ont fini par accepter.

En pro, vous vous retrouvez donc en concurrence avec les Martin, Moni, Parisse, Rabadan, Sowerby. Comment le vivez-vous ?

C’était tout sauf simple. Il y avait des superstars, des internationaux au poste. Je les admirais quand j’étais en juniors et là, de se retrouver à leurs côtés, c’était bizarre. Je n’étais pas forcément prêt à intégrer une équipe avec de tels objectifs mais cette expérience a été très enrichissante. J’avais envie de jouer mais je savais que je devais faire mes preuves. Ces années m’ont forgé et appris une rigueur.

À 23 ans, vous partez à Aurillac. Comment le contact a-t-il été noué ?

C’est une longue histoire. À l’origine, je devais aller à Oyonnax. J’avais rencontré Christophe Urios à Lyon mais ça ne s’était pas fait. Aurillac était dans notre poule en espoirs. J’avais fait un bon match ce jour-là. Le responsable du centre de formation m’avait contacté en me disant qu’il cherchait un joueur dans mon profil. Il m’a demandé si j’étais intéressé, j’ai répondu oui. C’était parti pour l’aventure.

Et là, c’est un changement radical…

Partir de Paris pour aller à Aurillac ? Oui, ça a été difficile au début. Heureusement, il y avait Julien Maréchal qui était venu en même temps que moi. J’ai vécu un mois chez lui. Ça a permis de faire la transition. Mais ce changement d’environnement a été dur. Je me disais : « Allez, j’essaye pendant deux ans. Si ça ne marche pas, tu rentreras à la maison. »

Ce pari a finalement été payant.

Au début, je ne jouais pas beaucoup mais j’ai redoublé d’efforts et ça a fini par tourner. Je suis resté quatre ans. Ça m’a lancé dans le rugby professionnel et ça m’a fait rencontrer des tas de gens. Il y avait des Sud-Africains, des Fidjiens, des Australiens, des Tongiens plus tous les locaux. Nous avions un noyau avec tous les espoirs d’Aurillac et de Clermont, plus les Wallisiens qui se retrouvaient aussi tout seul. Je m’étais créé un nouveau cocon.

Puis, après quatre ans, direction Brive.

Je devais rester à Aurillac. Et puis, mon agent me dit que Brive cherche un troisième ligne. J’appelle « Casa » (Didier Casadeï), je le rencontre vite fait à Brive, il me demande des images. Je lui ramène une clé USB avec deux, trois matchs. Deux jours après, Nicolas Godignon me dit qu’il me prend. J’ai débarqué sur la pointe des pieds.

Hirèche avec le CAB en 2013 contre Toulouse
Hirèche avec le CAB en 2013 contre Toulouse Manuel Blondeau / Icon Sport - Manuel Blondeau / Icon Sport

Quels souvenirs gardez-vous de ce changement de club ?

Brive descendait juste de Top 14, il y avait plein d’internationaux. L’intégration s’est faite très facilement car les mecs étaient tops. Je pense qu’ils ont vu que j’étais un bosseur et que je ne faisais pas de boucan. J’avais connu une première année folle avec la montée à l’arrivée. J’étais arrivé à l’objectif que je m’étais fixé. J’avais envie de jouer en Top 14.

Avec le CABCL, ça a été un coup de foudre…

Je suis très attaché à ce club. Ca fait presque dix ans que j’y suis, ça veut tout dire.Je m’y suis identifié d’entrée. J’ai rencontré tant de mecs énormes, je ne pourrais pas tous les citer: des internationaux et des gars avec une super carrière qui gardaient une humilité remarquable. Il y a un côté amateur, familial, mais aussi une vraie exigence en parallèle. ça me correspond.En Top 14, nous sommes parmi les petits, il faut donc ajouter un truc en plus. Ca passe par l’état d’esprit. Quand l’entraînement est fixé à 9 heures, les gars sont là dès 8 heures ou 8h30 pour partager un moment ensemble. Le midi, avant, on mangeait presque tous ensemble.

Vous êtes au club depuis huit ans et ce qui marque, c’est votre régularité sur la durée. Est-ce une ligne de conduite personnelle ?

J’avais été frappé par une phrase de Guy Novès, lors d’un reportage. Il avait dit à un de ses joueurs, à Lamerat je crois, pour son premier match : « La régularité dans la performance, c’est ce qui fait que tu dures. » J’ai toujours eu cette envie d’être constant. Je suis tracassé car j’ai l’ambition de réaliser les matchs parfaits. Je ne me focalise que sur mes erreurs. Ça m’incite à faire des efforts en permanence.

C’est pour ça que vous êtes aussi rigoureux, en dehors des terrains…

C’est vrai que je fais très attention à tout ce qui touche à la nutrition, à la récupération, au renforcement. J’ajoutais aussi des séances en dehors des entraînements car j’en ressentais le besoin. Ce que je veux, c’est ne pas avoir de regrets quand ça sera fini, avoir tout donné.

Quand vous avez débarqué, le groupe briviste était réputé pour son côté fêtard. Vous y retrouviez-vous ?

Oui, ça vivait bien. Aujourd’hui encore, il y a des troisièmes mi-temps. Ça fait toujours du bien de passer ces moments ensemble : ils permettent de célébrer ou de se resserrer. Dans tous les cas, ça montre que le groupe est uni, qu’il y ait victoire ou défaite. On est ensemble, quoi qu’il arrive. Et puis il y a cette proximité avec les gens qui est énorme à Brive. Personne ne se prend pour un autre.

Saïd Hirèche lors d'un derby contre Clermont en 2015
Saïd Hirèche lors d'un derby contre Clermont en 2015 Manuel Blondeau / Icon Sport - Manuel Blondeau / Icon Sport

Buvez-vous de l’alcool ?

Non. Je fais attention.

Est-ce par conviction religieuse ou par professionnalisme ?

Les deux. Je me dis que ça ne fait pas du bien à mon corps.

Au moins, vous vous rappelez de toutes les soirées…

Oui, on vit des trucs un peu fous dans ces moments-là. Tu vois les mecs qui ont des délires, les langues qui se délient, c’est amusant. On en rigole le lundi.

Cette rigueur que vous vous imposez fait que vous ne faites pas votre âge… Vous semblez même vous bonifier au fil du temps.

L’âge, ce n’est qu’un chiffre. C’est un ensemble de facteurs qui me permet d’être encore bien sur le terrain : il y a le fait que je ne lâche pas, que le staff m’économise par moments, que je puisse gérer ma fatigue… Et puis, il ne faut pas l’oublier : je vis de ma passion. J’ai la chance de vivre un rêve en jouant en Top 14. J’ai des copains qui évoluent en Fédérale 3, en Honneur. Je me dois de les représenter un tout petit peu, sans prétention aucune. De les rendre fiers. Ça me tient à cœur. Et puis la famille, évidemment.

D’ailleurs, comment votre mère suit-elle votre carrière ?

Elle m’appelle toujours après les matchs pour savoir comment je vais, si je me suis ouvert ou si je me suis fait mal.

Vous êtes le capitaine du club depuis trois ans. Comment avez-vous accueilli ce changement de statut ?

Je n’avais rien demandé, c’est un rôle qui m’a été confié. Je voulais juste être à la hauteur de cette responsabilité. J’essaye  d’emmener l’équipe du mieux que je peux. Je n’ai pas forcé ma nature. C’est juste encore plus important que je sois irréprochable : être à l’heure, avoir la bonne tenue… Comme ça, si tu as un truc à dire à un mec, tu es légitime.

Allez-vous, comme prévu, raccrocher les crampons en juin ?

On va voir. En tout cas, la fin approche.

Le troisième ligne pense à raccrocher les crampons à l'issue de la saison, en tout cas "la fin est proche" comme il le dit
Le troisième ligne pense à raccrocher les crampons à l'issue de la saison, en tout cas "la fin est proche" comme il le dit Icon Sport - Icon Sport

Comment l’appréhendez-vous ?

L’important est de rester jusqu’au bout fidèle à ce que j’ai été, dans l’investissement et dans l’état d’esprit. Je veux profiter de tous les moments car je sais que ça s’arrêtera bientôt.

L’arrêt d’une carrière, on le sait, n’est pas toujours aisé à gérer. Craignez-vous cette petite mort ?

Ça sera forcément difficile quand ça arrivera. Mais je me dirais que j’ai fait du mieux que je pouvais.

Votre reconversion devrait vous garder au plus près des terrains, c’est exact ?

J’ai passé mon DE il y a trois ou quatre ans. J’aimerais avoir le DES par la suite. Il est primordial d’acquérir des compétences avant de se lancer. Une fois que j’aurai arrêté, je finirai de me former. Et j’essaierai de transmettre ce que j’ai appris et de continuer à vivre un peu de ma passion, par procuration.

Vous ne vous imaginez pas ailleurs que dans le rugby?

Ça fait vingt ans que je suis à fond dedans. Je suis toujours aussi passionné. J’ai envie d’essayer d’entraîner, d’encadrer. Si ça ne marche pas, je me retournerai et je vivrai quelque chose de différent.

N’êtes-vous pas nostalgique d’une époque plus légère, moins calibrée ?

Le contexte a évolué mais j’aime toujours autant le rugby. Et je l’aimerai jusqu’au bout. Quand je discute avec des anciens, je vois bien qu’ils sont encore passionnés. Les à côté sont différents, c’est une certitude. Mais le sport en tant que tel, il ne change pas tant que ça : il y a toujours le partage, le dépassement de soi, l’engagement…

En tant qu’enfant des quartiers d’origine algérienne, avez-vous rencontré des difficultés en chemin ?

Il s’est passé des petits trucs mais ce n’est pas important. Dans ce sport, il y a une alchimie et une ouverture d’esprit qui prédominent. Quand tu portes le même maillot mais aussi quand tu es adversaire. Tu te rentres dans la gueule pendant quatre-vingts minutes, tu t’insultes mais après, tu te serres la main et tu es dans l’échange. En termes d’émotions, de vécu, de rencontres, c’est génial ce que ce sport m’a permis de vivre. C’est ce qui me restera, plus que les performances. J’ai beaucoup appris sur moi-même comme sur les autres.
 

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