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Serin : « Je fonctionne à l'instinct »

Par Pierrick Ilic-Ruffinatti
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Publié le Mis à jour
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Joueur le plus décisif de la Challenge Cup (trois essais, sept passes décisives), l'international tricolore (26 ans, 36 sélections) a remporté sa course contre la montre pour revenir à temps malgré sa blessure contractée à l'acromio-claviculaire. Une excellente nouvelle pour le RCT, qui pourra compter sur son maître à jouer face à Bristol.

Toulon disputera ce vendredi la finale d'une compétition démarrée il y a quasi un an...

Nous avons eu la chance de terminer premiers de la phase de poules la saison passée, en restant invaincus : c'est la conclusion de ce magnifique parcours qui se présente à nous vendredi. On connaît la qualité de Bristol, mais il faut gagner quoi qu'il nous en coûte.

Personnellement, ce sera la première «vraie» finale de votre carrière...

J'ai fait des phases finales chez les jeunes avec Bègles. J'ai également remporté un Grand Chelem avec les U20. Chaque journée était une petite finale, et on a finalement reçu l'Irlande au bout du bout du suspense. Ça se rapproche un peu de ce que je vais connaître vendredi, mais c'est clair que ce sera une première pour moi. Je suis si pressé...

Comment appréhendez-vous ce rendez-vous ?

Comme ceux face aux Scarlets ou à Leicester, à la différence que ce sera le dernier. Le gagnant remportera un trophée et écrira une ligne de l'histoire de son club, vous imaginez ? Chaque plaquage, chaque passe, chaque détail va compter. Il faudra être le plus propre possible sur notre stratégie, et avoir un point de plus à la 80e minute. On va essayer d'évacuer la pression toute la semaine, et aborder cette rencontre de manière positive.

Touché à l'acromio-claviculaire contre Llanelli, vous n'avez repris que le week-end dernier contre le MHR. Avez-vous craint que cette finale vous passe sous le nez ?

J'ai eu vraiment peur... Heureusement, le staff médical a été présent pour moi, et m'a remis sur pied avec une semaine d'avance. Il m'était cher de jouer avant la finale pour avoir un peu de rythme. Par chance je suis revenu, mais je ne peux pas cacher que j'ai vraiment craint de manquer cette finale.

Jouer, retrouver du rythme, mais également prendre un risque avec votre épaule...

Dès le soir de ma blessure, j'ai regardé le calendrier : la finale était dans quatre semaines. On m'a alors dit que ce serait juste, mais pas injouable. La solution ? Du repos. J'avais du liquide dans l'épaule, et par chance il s'est vite résorbé. On m'a ensuite fait comprendre que c'était de plus en plus faisable. Mais j'avais ce désir de reprendre une semaine avant, et le nouvel objectif est devenu Montpellier. On a tout mis en œuvre en ce sens. Et le jour venu, on a mis une coque et tout était pensé pour que je joue libéré. Je n'aurais jamais joué si je ne me sentais pas à 100%, par respect pour l'équipe.

Face à Montpellier, vous avez mis énormément de rythme. Était-ce une volonté de votre part ?

C'était les consignes : mettre le plus de rythme possible, de la vitesse et me mettre dans le rouge, afin de retrouver confiance avant d'aborder cette finale.

Vous êtes un joueur qu'on pourrait qualifier d'« instinctif » : vous tentez des coups, et face à Montpellier, alors que Toulon reculait dans le premier quart d'heure, c'est vous qui avez accéléré le jeu pour remettre votre équipe à l'endroit...

Je prends beaucoup d'initiatives, je fonctionne à l'instinct. Si je vois un coup, je vais le tenter quasi-systématiquement. Contre Montpellier, la consigne était de jouer, de les déplacer et de varier les styles de jeu. Et le petit côté que je tente (N.D.L.R. qui entraîne l'essai de Gervais Cordin, à la 13e), c'est anodin, mais c'est un maul où l'équipe avance. Je vois qu'il y a un deux contre un à jouer côté fermé. On avait vu dans la semaine que c'était un coup qui était tentable, et j'avais prévenu mon ailier : le petit Moretti. Alors quand je pars, je sais sans le regarder qu'il est prêt. J'aime mettre du rythme, emballer le jeu. Notre équipe a besoin de ça : on aime contrôler le rythme du match, et mettre de la vitesse.

Entre la Covid-19, vos titularisations à l'ouverture, votre blessure, les phases finales en septembre : de nombreux micro-événements rendent ce début de saison atypique. Comment l'avez-vous vécu ?

On savait qu'il faudrait s'adapter, mais notre première priorité a été d'essayer d'entretenir la grosse dynamique que nous avions en fin de saison passée. On ne voulait pas perdre le bon rythme qu'avait trouvé le groupe. Il a fallu s'habituer, mais c'est le cas de n'importe quel joueur de rugby dans le monde. On peut ajouter la problématique des stades vides, qui a été vraiment bizarre à appréhender... Mais notre groupe a rapidement trouvé des repères. Depuis le début de saison, on alterne le bon et le moins bon, mais globalement on s'en sort bien. Ça prouve que l'équipe a beaucoup de caractère.

Il a également fallu naviguer entre les blessures (Hériteau, Belleau, Cordin, Toeava, Etzebeth, etc).

Ç'a été le véritable point noir des premières semaines, notamment derrière. Beaucoup de jeunes ont joué, et s'en sont super bien sortis, heureusement pour nous. Ce n'est pas évident, quand tu es jeune, tu souhaites entrer petit à petit sur les feuilles de match, et si possible dans une équipe qui tourne, mais là non : on te demande d'intégrer et d'avoir un vrai rôle dans une équipe qui n'est pas parfaitement rodée. Ils ont vraiment été importants dans notre début de saison.

Avant votre blessure, vous avez évolué à l'ouverture à deux reprises. Comment vous êtes-vous senti ?

J'ai alterné le bon et le moins bon. Malheureusement je n'ai pas trouvé le rythme lors de la première mi-temps contre les Scarlets : j'avais beaucoup de pression et je n'ai pas trouvé la clé du jeu. On s'est mis le doute au début du match en loupant des occasions franches, et je me suis mis à douter. En suivant je me blesse à l'épaule. C'était vraiment un match à oublier pour moi.

Étiez-vous amoindri avant la rencontre ?

Dans la semaine j'étais touché aux adducteurs, mais je n'étais pas blessé : j'étais à 100% au coup d'envoi. Avec le recul j'aurais mieux fait de ne pas jouer (sourire). Heureusement, contre Lyon ça c'était super bien passé. On avait mis du rythme, et on avait pris du plaisir. Mais j'ai évolué à l'ouverture pour dépanner, le temps que «Carbo» revienne de sa commotion intervenue contre La Rochelle. Peut-être qu'on me demandera à nouveau de jouer 10 au cours de la saison, comme ça pourrait arriver pour Duncan (Paia'aua) ? On alternera, et on s'adaptera le moment venu.

À la veille de sa première finale, considérez-vous que ce jeune groupe est en train de trouver sa carburation ?

Avec les retours de blessés, tout le monde se déchire aux entraînements, travaille fort dans l'intérêt du groupe. C'est positif pour tout le monde. Et comme les résultats suivent, ça met du positif dans les têtes. Le groupe avait besoin de retrouver le goût de la victoire avant la finale, et Montpellier nous a mis sur d'excellents rails.

Vous avez rejoint Toulon il y a maintenant un an. On vous sent épanoui, autant sur qu'en dehors du terrain : êtes-vous toujours convaincu d'avoir pris la bonne décision en signant au RCT ?

Et comment !. Je suis très heureux à Toulon. Ça n'a pas été facile pour moi au début, car je quittais une famille... J'étais resté 10 ans à Bègles, et je ne savais pas trop où je mettais les pieds. Mais il m'a fallu à peine deux semaines pour comprendre que ça allait être quelque chose de beau à vivre. J'ai eu la chance de rapidement enchaîner les matchs, de me faire de super potes. On a un groupe de déconneurs, on rigole énormément. Puis il y a un savant mélange entre l'expérience et la jeunesse, les Français et les étrangers. Enfin, il y a des hommes à la tête qui tiennent la barre, ça file droit, c'est important pour nous. Enfin, on sent qu'on est au cœur d'un projet chouette, avec notamment le nouveau centre d'entraînement qui va permettre au groupe de fonctionner encore mieux. Il y a juste une chose que j'ai eu le privilège de découvrir la saison passée et qui me manque au plus haut point...

On vous écoute.

Les supporters : ils sont fantastiques. L'engouement qu'il y autour du rugby et du RCT, dans cette région, cette ville, c'est quelque chose à vivre dans sa carrière. Ç'a été une révélation pour moi. Certaines personnes ne vivent que pour le rugby à Toulon, et ça donne envie de se surpasser quand tu es sur le terrain.

Avez-vous aujourd'hui le sentiment de pratiquer le meilleur rugby de votre carrière ?

En rejoignant Toulon j'ai franchi un vrai cap. Je venais d'un club où je me mettais énormément de pression individuelle. Je voulais à tout prix réussir dans mon club de cœur. Alors qu'à Toulon, je suis arrivé dans un club qui avait déjà tout gagné. Le désir n'était alors pas d'écrire, mais de réécrire une histoire dans ce club. Et tous les mecs sont dans cet état d'esprit. Ainsi je me mets un peu moins de pression. Puis je m'étais promis à mon départ de ne pas « partir pour partir » mais bien de partir pour réussir. Alors j'ai enlevé la pression négative que je me mettais sur les épaules. Ça me permet de jouer encore plus sur mes qualités, et j'ai progressé dans ma tenue de matchs et la façon de gérer les temps forts et les temps faibles de l'équipe. Ce départ m'a fait du bien mentalement et psychologiquement. À Toulon, j'ai passé un cap.

Sébastien Tillous-Borde dit que dès votre arrivée, vous êtes devenu LE leader du RCT. L'avez-vous ressenti ?

J'ai un petit vécu au niveau international, ce qui m'a donné beaucoup d'expérience... Le groupe est jeune, et il a été important de prendre cette responsabilité. J'ai essayé de me servir de mes expériences passées pour parler aux mecs. À Bègles on a toujours été là pour moi, et désormais c'est à moi de renvoyer l'ascenseur. Les mecs posent des questions, et j'essaye de les accompagner, de les aider à assimiler le projet. Il est important que tout le monde pense le même rugby. Et c'est ce qui permet à ce groupe de bien vivre, qu'importe l'âge ou la nationalité des mecs. J'aime l'idée de transmettre ce que j'ai appris. Je n'ai pas toutes les clés, mais j'essaye de partager les petits trucs que j'ai découvert depuis le début de ma carrière.

Un mot, enfin, sur Semi Radradra, avec lequel vous avez joué un an à Bordeaux, et que vous allez croiser ce vendredi avec Bristol ?

C'est un joueur extraordinaire, un athlète exceptionnel, qui est capable de tout faire sur un terrain : il peut casser la ligne, plaquer, faire des offloads d'un autre monde... Mais le problème c'est qu'à Bristol il n'y a pas que lui : je pense à un joueur comme Max Malins notamment, leur arrière. Bristol est une équipe très solide : il faudra faire attention à Semi, mais ne pas se focaliser uniquement sur lui, sinon on risque d'ouvrir des espaces. Il n'y aura donc pas de plan anti-Radradra !

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