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Hansen - Gatland : Fin de règnes

Par DUZAN Marc
  • Steve Hansen et Warren Gatland
    Steve Hansen et Warren Gatland Icon Sport - Avalon
Publié le Mis à jour
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Ce sont deux monstres sacrés de ce jeu, Steve Hansen et Warren Gatland, sélectionneurs de la Nouvelle-Zélande et du Pays de Galles, qui feront leurs adieux à leur sélection, au crépuscule de cette petite finale. Bye, guys…*

L’un incarne les All Blacks et leur domination sur le monde depuis 2011. L’autre est le visage de la renaissance galloise, l’homme ayant offert à cette minuscule principauté de 3 millions d’habitants le prestige qu’elle avait perdu depuis le départ des Princes de Galles, qu’ils se nomment Gareth Edwards, JPR Williams ou Barry John. Ce week-end d’automne, Steve Hansen dirigera pourtant son dernier match à la tête des Tout Noir. Warren Gatland, lui, dira au revoir aux Diables Rouges. Pour bien situer les deux personnages et l’influence qu’ils exercèrent sur leur monde, voici quelques chiffres : depuis 2012, Steve Hansen a connu 106 matchs avec les All Blacks et en a remporté 92 (87 % de victoires), un ratio qui fait aujourd’hui de lui le coach le plus "successfull" de l’histoire ; quant à Warren Gatland, il est le sélectionneur du pays de Galles depuis 2007, et a récolté durant son mandat trois grand chelems (2008, 2012, 2019) et atteint deux fois (2011, 2019) les demi-finales de la Coupe du monde. Pas mal, hein ?

Warren Gatland, sélectionneur du pays de Galles
Warren Gatland, sélectionneur du pays de Galles Icon Sport - Actionplus

Alors, si Hansen dira adieu au rugby pro au terme de ce Mondial, "Gat’s" prendra quant à lui en mains le destin des Chiefs, la franchise de Super Rugby basée à Hamilton, dans l’île du Nord de la Nouvelle-Zélande. C’est aussi lui qui mènera, et ce pour la troisième fois d’affilée, les Lions britanniques et irlandais en tournée en Afrique du Sud, en 2021. Ainsi, cette petite finale a beau ne faire rêver personne chez le grand public, elle aura cette année le mérite de sceller les règnes sans partage de deux dinosaures du rugby professionnel…

"Shag" et le "Messie"

Steve Hansen et Warren Gatland ont beau se vouer une évidente acrimonie, ils partagent sans le savoir - ou plutôt sans l’assumer - un nombre incalculable de similitudes : un humour corrosif, un sens évident de la punch line, un regard mi-inquisiteur mi-désabusé et, par-dessus tout, les protubérances stomacales propres aux hédonistes. À ce sujet, permettez-nous de penser que les rondeurs de Gatland sont pardonnables : le Supremo des Lions est un ancien talonneur et, à 25 ans, il pesait déjà 110 kilos. Les formes de Steve Hansen, elles, sont en revanche plus surprenantes et, concernant l’ancien trois-quarts centre de La Rochelle, on dirait volontiers que la fin de carrière mit aussi chez lui un terme brutal à toute forme d’activité physique, depuis largement supplantée par les croissants qui squattent les conférences de presse des All Blacks, viennoiseries au sujet desquelles le très austère Joe Locke (le patron de la comm’ néo-zélandaise) a l’habitude de confesser : "Servez-vous vite ! "Shag" (Steve Hansen) est en chemin !" L’origine de l’inimitié entre deux des techniciens les plus "bankable" de la planète rugby est évidente : Warren Gatland court après le poste de sélectionneur des All Blacks depuis une bonne dizaine d’années et, si le sélectionneur gallois pensait son heure proche avec le départ annoncé de Steve Hansen, "Shag" a depuis adoubé son actuel bras droit, l’impavide Ian Foster, quand le patron de la fédé néo-zélandaise, Steve Tew, a cette semaine assuré que le poste de sélectionneur des Tout Noir était incompatible avec celui de chef des Lions.

Steve Hansen, sélectionneur de la Nouvelle-Zélande
Steve Hansen, sélectionneur de la Nouvelle-Zélande Icon Sport - Actionplus

Entre les deux coachs kiwis, le désamour est d’ailleurs à peine dissimulé. On se souvient même qu’en 2012, au soir d’une large victoire néo-zélandaise au Millennium (33-10), Hansen s’était étonné face caméras de cette stratégie galloise visant à bouder les tirs au but en début de match pour défier les Blacks sur pénaltouches. "C’était une folie", avait ce soir-là assuré "Shag". Et lorsque les journalistes gallois lui avaient demandé pourquoi son rival avait opté pour un tel plan de jeu, Hansen avait répondu : "Vous lui demanderez vous-mêmes. Le Messie arrive d’un instant à l’autre…" Le Messie, hein ? C’est en tout cas ce qu’avait cru voir Bernard Laporte, lorsque le président de la FFR se persuada que Gatland mènerait les Bleus au titre de champion du monde en 2023. On connaît la suite.

Hansen ? Loin de l’ours mal léché que dépeignent si souvent les Néo-Zélandais lorsqu’ils parlent du personnage le plus important de leur micro-pays, "Shag" est un délicieux pince-sans-rire, un ancien flic qui aime la vie, le vin, la France et les femmes. Il y a quelques années, un chauffeur de taxi de Christchurch, à qui l’on demandait pourquoi les Kiwis surnommaient Steve Hansen "Shag", nous répondit d’ailleurs que ce terme - dont l’une des traductions autorisées est "copuler" - était un hommage au passé tumultueux du sélectionneur des All Blacks. Ce matin de novembre 2018 où on lui posa ouvertement la question, Hansen éclata de rire. "Il vous a dit ça ? Quelle connerie ! Quand je suis arrivé aux Crusaders, nous étions deux Steve : Steve Tew (actuel chef exécutif de la fédération néo-zélandaise) et moi-même. Pour nous différencier, Andrew Mehrtens m’a donc appelé "shag" (camarade). C’est ainsi que j’appelle quelqu’un, quand un prénom m’échappe. Et ça m’arrive assez souvent…" Au Midol, on ne connaît pas personnellement Warren Gatland. Pour avoir rencontré Hansen à plusieurs reprises, on peut en revanche vous assurer que le rugby perd là un personnage d’une rare intelligence, un homme dont les traits d’esprit et le recul sur le monde nous manqueront beaucoup…

* Salut, les gars…

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