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Quel serait votre ouvreur titulaire des Bleus pour le Mondial au Japon ?

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Publié le Mis à jour
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La question, posée ci-dessus, n’intéresse pas seulement notre rédaction. Elle tient en haleine le rugby français, qui se demande qui va diriger le jeu des Bleus au Japon. Alors il convenait d’interroger ceux qui connaissent le mieux le poste d’ouvreur, à savoir de nombreux anciens numéros 10, pour la plupart internationaux. Certains ont connu le contexte particulier d’une Coupe du monde, comme Christophe Lamaison, David Skrela ou Yann Delaigue. D’autres maîtrisent tout de même parfaitement les tenants et aboutissants du très haut niveau comme Jean Gachassin, François Gelez, Julien Peyrelongue ou Benjamin Boyet. Enfin, Vincent Etcheto ou David Darricarrère sont devenus des entraîenurs reconnus et leur opinion est forcément pertinente.

Tous ont accepté de s’engager et de livrer le ou les nom(s) qu’ils aimeraient voir sur les feuilles de match lors du Mondial. Et le moins que l’on puisse dire, c’est d’ailleurs que les avis sont aussi divers que partagés. Hormis Baptiste Serin, que nos spécialistes n’envisagent pas à l’ouverture, tous les postulants sont cités, même si Antoine Dupont est davantage vu comme une solution en cours de rencontre. Sinon, l’option de Romain Ntamack est privilégiée d’une courte tête, devant Camille Lopez. Thomas Ramos, qui a fini la saison à ce poste avec Toulouse, est aussi en embuscade. Cela reflète finalement la situation actuelle. Aucun ouvreur n’est installé dans les plans de Jacques Brunel et tout paraît encore ouvert (c’est vrai également pour le sondage des internautes !). Sachant, comme le rappellent les intervenants suivants, que beaucoup de choses peuvent se passer durant la préparation…

Vincent ETCHETO (Ancien ouvreur de Bordeaux-Bègles et Bayonne)

Vincent Etcheto
Vincent Etcheto Icon Sport

Lopez numéro un, Ramos numéro deux 

Tout le monde sait que je suis fan de Camille Lopez. Il est en fin de cycle mais il fallait l’amener à la Coupe du monde. Il est là et c’est très bien. Doit-il pour autant être notre ouvreur titulaire ? Il ne représente pas l’avenir pour préparer le prochain Mondial et, sur le niveau athlétique, il touche à ses limites même si je répète que je l’adore. Je trouve qu’il y aurait eu une certaine logique à miser sur Belleau, que j’ai trouvé costaud dans des contextes parfois difficiles, mais il est simplement réserviste. Un jeune comme Carbonel aurait pu permettre de se projeter sur la suite mais il n’est pas retenu. Ntamack ne joue pas numéro 10 dans son club, donc c’est difficile de le placer là. Pour moi, c’est dangereux de partir avec autant de joueurs polyvalents. Serin s’en sortira mais ce n’est pas son poste. Dupont en 10, c’est une hérésie à mes yeux. J’aime beaucoup ce joueur capable de casser les lignes, on peut le faire jouer ailier, centre mais pas ouvreur car il faut du jeu au pied, de la stratégie. On en revient au problème de base : quel projet veut-on ? Quel rugby souhaite-t-on mettre en place ? Avec quels joueurs peut-on l’adapter ? Quelle complémentarité entre le 9 et le 10 ? Les Anglo-Saxons savent déjà tout ça. Si on réclame un match winner, on peut mettre Dupont. Si on préfère un régulateur, on peut mettre Serin. Mais c’est du bricolage. J’ai l’impression qu’il n’y a eu aucune réflexion sur le jeu de notre côté. Un ouvreur, ça se construit. Nous, on les détruit parfois. À l’arrivée, je mettrais Lopez numéro un et Ramos numéro deux.Camille est celui qui présente la meilleure maîtrise du poste. Si on veut un rugby léché et une épine dorsale solide, il est le choix qui s’impose. Pour moi, Ramos est ensuite le plus doué de tous, même si sa demi-finale de Top 14 contre La Rochelle, à Bordeaux, n’est pas rassurante. Son profil se rapproche de l’idée que je me fais d’un numéro 10, plus que les autres précédemment cités. Il a le pied, l’intelligence et toutes les qualités pour s’imposer à ce poste. Mais il a besoin de s’y installer, de trouver des repères, car on ne le maîtrise pas en y jouant une fois de temps en temps. Arrière est une parfaite formation mais, à l’ouverture, il y a par exemple plus de pression et cela peut influer sur son rôle de buteur. 

Christophe LAMAISON (Ancien ouvreur du XV de France (37 sélections)

Ramos a le profil 

Je trouve que nous n’avons aucune certitude sur le numéro 10, mais c’est un constat que nous pouvons faire sur beaucoup d’autres postes. Par expérience, la Coupe du monde est une compétition à part, en vase clos, tellement différente de ce qu’un joueur connaît habituellement. Cette envie de réécrire un chapitre de l’histoire peut permettre à des jeunes de se révéler ou à des leaders de prendre les clés du camion. C’est vrai sur ce genre de poste clé. C’est le genre de compétition dans laquelle un numéro 10 peut faire surface et s’imposer, j’en sais quelque chose. Sur un Mondial, on retient souvent un 10 avec un jeu au pied productif pour son équipe dans les matchs décisifs. Je pense à Stransky en 1995, à de Beer en 1999 ou Wilkinson en 2003. Dans les moments clés, ce sont eux qui apportent les points qu’il faut. Un garçon comme Ramos peut endosser cette responsabilité par exemple. Je dis depuis longtemps qu’il a un profil d’ouvreur. Est-ce que ce sera lui ou un autre le titulaire ? Je ne sais pas, car cela dépendra aussi du système de jeu mis en place. Mais je trouve qu’entre l’expérience, la jeunesse ou la polyvalence, nous possédons trois ou quatre numéros 10 qui sont complémentaires dans le groupe.Même s’il n’est pas facile de mettre Ntamack qui n’a pas joué les phases finales avec Toulouse. Il faut juste prendre conscience que les choses repartent à zéro désormais et qu’un garçon peut tirer son épingle du jeu en devenant le chef d’orchestre de cette équipe.

David SKRELA (Ancien ouvreur du XV de France (23 sélections)

Lopez, la solution la plus évidente 

À mon sens, Camille Lopez est celui qui a le plus joué à ce poste depuis un certain temps, donc il s’impose. Il est plutôt bien en place, même si sa fin de saison a été difficile. Au-delà, c’est aussi le plus expérimenté. Je pense qu’il serait plus prudent de le faire commencer la compétition. Romain Ntamack est plus jeune, joue aussi premier centre mais manque peut-être d’habitudes au niveau international. Antoine Dupont peut dépanner, surtout sur une fin de match où son explosivité permet de casser les lignes. Pour moi, Thomas Ramos est plus un arrière qu’un ouvreur pour l’instant. Il a joué quelques fois en numéro 10 avec Toulouse, parfois avec réussite, d’autres moins. Mais ce ne serait pas lui rendre service que de le lancer à ce poste en équipe de France lors d’une Coupe du monde. Je crois qu’il le maîtrise moins bien que le poste de 15. Et, dans cette compétition, tout va encore plus vite qu’en Coupe d’Europe ou en Top 14 évidemment. Même si je sais que les choses peuvent rapidement changer dans un Mondial, je suis bien placé pour en parler. La préparation en vase clos, puis les matchs amicaux, vont dicter une hiérarchie. Deux mois, c’est long et c’est là que l’équipe peut se dessiner. Pour l’heure, je vois Camille Lopez comme la solution la plus évidente mais rien n’est figé. 

Jean GACHASSIN (Ancien ouvreur du XV de France (32 sélections)

Ntamack pour le jeu ! 

D’abord, ma question est la suivante : quel jeu l’équipe de France veut-elle pratiquer ? Le cirque Pinder et minimaliste de ces derniers mois ou un truc sympa, rapide et ambitieux ? Je parle du cirque Pinder parce que de nos jours, tout le monde balance le ballon n’importe où, dès qu’on arrive dans la zone de contacts. À mon époque, Jean Prat me disait que si j’étais pris par l’adversaire balle en mains, je pouvais quitter le terrain sur-le-champ. Alors, je choisis Romain Ntamack parce que j’ai envie que le XV de France renoue avec la prise de risque, le dynamisme et le jeu de passes. 

François GELEZ (Ancien ouvreur du XV de France (8 sélections)
 

Ntamack est celui qui coche le plus de cases par rapport au jeu que semblent vouloir les coachs

J’ai l’impression qu’on se pose un peu la même question tous les quatre ans… Je ne suis pas dans le secret des dieux, mais si on analyse globalement la liste, il semble que le sélectionneur et son staff aient pris le parti d’un rugby davantage axé sur la vitesse que sur l’affrontement, de façon à répondre aux standards internationaux. Le fameux triptyque défense-occupation-conquête, ça ne suffit plus à gagner des matchs au plus haut niveau, tout le monde l’a compris et le XV de France semble décidé à aller dans ce rugby-là, plus ambitieux. De fait, au moment de désigner un 10, il faut choisir celui qui semble le plus à même de pratiquer ce jeu-là. Au moment du choix, j’élimine d’emblée Serin et Dupont, parce qu’on a bien vu lors d’Angleterre - France que si le jeu au pied est moins utilisé, il est d’autant plus important. Si on ne présente pas un ouvreur capable d’inverser la pression, on se met en difficulté, et il me semble que positionner un demi de mêlée reconverti serait trop préjudiciable. Il faut un spécialiste. Et parmi ceux-là, si on opte pour un rugby de vitesse, il me semble que Romain Ntamack est celui qui coche le plus de cases parmi la liste actuelle. Camille Lopez est peut-être meilleur dans la gestion pure, mais si on veut un rugby de vitesse, ce n’est peut-être pas là que réside son point fort… Certes, c’est Thomas Ramos qui était titulaire à Toulouse pendant les phases finales, mais cela n’est pas irrémédiable. Romain Ntamack a vécu un coup de moins bien après le Tournoi, qui était assez logique car il n’avait pratiquement pas eu de vacances, avec la Coupe du monde moins de 20 ans l’été précédent. Ce reflux physique a fait qu’il a perdu sa place en club pour la fin de saison, mais je me souviens qu’il avait auparavant bien su se débrouiller pour ses premières sélections, malgré un contexte difficile. Mais là, il est en train de souffler, et aura toute la préparation pour se refaire une santé… Vous savez, en 99, Titou Lamaison était loin d’être le premier choix mais il avait gagné sa place en faisant exploser les compteurs pendant la préparation. Si on part du principe qu’Antoine Dupont fait figure de premier choix à la mêlée, on obtient avec Ntamack une charnière assez complémentaire, qui a quelques automatismes de club. Si on partait avec cette paire-là en se gardant une charnière plus âgée pour gérer les fins de match, lorsqu’il ne faut pas se tromper, cela me semblerait un bon compromis.

Julien PEYRELONGUE (Ancien ouvreur du XV de France (6 sélections)

Ntamack, mais…

Honnêtement, Romain Ntamack m’impressionne beaucoup et dans les années à venir, je ne vois pas ce qui pourrait l’empêcher d’être le grand meneur de l’équipe de France. Pour moi, démarrer le Mondial japonais avec un tel joueur serait à la fois l’occasion de pratiquer un jeu dynamique et aéré mais aussi l’opportunité de préparer la Coupe du monde 2023. Le problème, et il est majeur à mes yeux, c’est que Romain Ntamack n’est pas titulaire en club, a disputé les phases finales sur le banc de touche et, si je peux comprendre les arguments d’Ugo Mola, je vois mal comment un joueur qui n’est pas indiscutable en club le serait du jour au lendemain en équipe de France. Camille Lopez ? Il a connu un Tournoi des 6 Nations difficile mais il a une vraie force de caractère, je pense qu’il a mis tout ça derrière lui.

Yann DELAIGUE (Ancien ouvreur du XV de France, 20 sélections)

 

Ntamack pour la continuité 

La première des logiques que je considère pour faire mon choix, c’est de faire jouer les joueurs à leur poste. Donc, pour porter le numéro 10 des Bleus, ce doit être Camille Lopez ou Romain Ntamack. Ensuite, ma deuxième logique, c’est celle de la continuité. Donc Romain Ntamack. Il avait pris la place d’ouvreur pendant le Tournoi des VI nations sur une logique sportive, pas sur blessure. Il avait alors été préféré à Camille Lopez et, sans être brillant non plus, je trouve que Ntamack avait fait de bons matchs. Alors, oui, on pourra toujours dire qu’il ne jouait que peu ouvreur avec le Stade toulousain mais cela reste son poste de formation. On pourra toujours dire qu’il n’était pas titulaire pour les phases finales. D’un autre côté, Lopez était, lui, titulaire avec Clermont mais on ne l’a pas vu très bon. Pour toutes ces raisons, je resterais sur Ntamack. Même si je concède que le poste est encore très ouvert. On peut même le considérer comme vacant. À ce titre, la préparation qui débute va être primordiale pour affirmer une hiérarchie. Il faudra prendre en compte tous les aspects : la forme physique des joueurs, ce qu’ils montreront sur le terrain à l’entraînement, leur leadership dans la vie du groupe. Les trois matchs amicaux de préparation, enfin, devront finaliser ce choix. Parce que, pour l’instant, le poste est effectivement très ouvert. Peut-être le plus ouvert de tous. Même si, quand on y réfléchit bien, il reste encore beaucoup de postes dans cette équipe de France où la hiérarchie reste à définir…

Benjamin BOYET (Ancien ouvreur du XV de France (5 sélections), consultant pour BEIn Sports
 

 

La charnière évidente, à l’heure qu’il est, c’est Dupont-Ramos

C’est très difficile, quand on n’est pas au sein de l’équipe, de savoir quelle stratégie compte adopter le staff. Voudront-ils bâtir leurs compositions en fonction des équipes que l’on va affronter ou au contraire, partant du principe que les matchs de poule seront pratiquement des matchs de phase finale, bâtir une ligne directrice autour d’un XV-type? À titre personnel, je pense que les Bleus partiront sur l’option de la continuité, ce qui vaut en priorité pour la charnière. Et la solution la plus évidente, à l’heure qu’il est, concerne la paire toulousaine Dupont-Ramos. Alors certes, il reste trois mois de préparation et certes, ces deux joueurs ont peut-être atteint leur pic de forme au mois de juin. Mais dans une situation idéale, je ne vois pas ce qui empêcherait cette charnière-là de s’installer, puisqu’elle a fait de bons matchs et conduit Toulouse au titre de champion de France.
Ramos est considéré comme un arrière dans la sélection de départ? Cela ne me pose pas de problème, tant on connaît l’importance de la polyvalence dans le rugby moderne. Qui aurait dit pendant le Tournoi que Romain Ntamack ne jouerait que quelques minutes pendant les phases finales? Mais c’est aussi ça, les fins de saison, où des repositionnements peuvent parfois enclencher une dynamique, comme ce fut le cas dans le ménage à trois entre Dupont, Bézy et Ramos. Les Toulousains avaient en outre l’avantage de maîtriser leur système de jeu, ce qui facilite grandement le travail de la charnière et n’est pour l’heure pas le cas des Bleus. Mais dans le cadre d’une préparation de Coupe du monde, lorsqu’on vit ensemble 24 heures sur 24, c’est le genre de retard qu’il est possible de rattraper. Ce que j’ai envie de dire au staff, avant cette Coupe du monde, c’est « soyons Français! » et poursuivons derrière la porte ouverte par le Stade toulousain, en laissant s’exprimer les Médard, Guitoune, Huget, Dupont, Ramos, qui ont été capables de faire des choses extraordinaires et de créer de l’incertitude.
Après, ce qu’il faut dire, c’est que les Toulousains ont eu la chance d’évoluer derrière un pack extraordinaire et une troisième ligne sans égale en France. À ce titre, je ne m’explique toujours pas l’absence dans la sélection de François Cros, mais bon, cela est un autre débat. Ce qui est sûr, c’est que le contexte sera différent, mais que si on est capable de répondre présent en défense et en conquête comme a su le faire le Stade toulousain, ses joueurs sauront s’exprimer pendant la Coupe du monde. On est assez loin des meilleurs pour l’heure, je pense justement que ça peut être le contexte idéal pour les Bleus. Surtout pour des jeunes joueurs…


 

 

 


 

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