La chronique de H.Broncan

Par Rugbyrama
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Retrouvez chaque mercredi "Les pas perdus d'un coach", la chronique d'Henry Broncan, l'entraîneur du FC Auch-Gers.

Jeudi 22 Mars 2007.-

Aujourd'hui c'est Meilhan ; je devais avoir 5 ans lorsque mes parents m'ont conduit pour la première fois à la commémoration de la Tragédie: au petit matin du 7 Juillet 1944, les 2ème, 3ème et 4ème Compagnies du 116ème Bataillon de grenadiers du 2ème régiment d'infanterie allemand, environ 300 hommes, ont investi les fermes du Priou et de Larée dans lesquelles avaient pris position, depuis le 24 Juin, environ 90 maquisards. Dans un combat rendu inégal, un peu par le nombre, beaucoup par l'armement et l'organisation - des "pros" contre des "amateurs" - 72 résistants et 4 otages pris dans les fermes avoisinantes seront massacrés impitoyablement. Chaque année, à partir du Collège de Samatan, j'ai conduit à vélo des classes de 3ème sur le site. Quand je revois certains de ces élèves, ils me rappellent chaque fois, que le meilleur souvenir qu'ils gardent de mon enseignement, c'est cette visite sur ce lieu qui semble immobilisé parmi les épreuves du Temps. Depuis ma retraite de professeur, ce sont mes joueurs, après une longue marche à pied, qui m'accompagnent. J'ai toujours été fasciné par l'histoire personnelle de ces martyrs, les uns de droite et d'autres de gauche, toubibs, militaires de carrière mais aussi ouvriers agricoles et anars, catholiques, protestants, juifs venus d'Espagne, de Lorraine, de Paris, du Pays Basque... réunis pour résister à l'oppresseur. Heureux aussi de dire aux miens que leur chef JR était un ancien rugbyman du TUC, que JP était un bon 3ème ligne de Montréjeau, qu'AL jouait au FCA : le Stade de Miélan porte son nom... Avec émotion, je me souviens de ce texte d'Alain Bosquet écrit en 1944 "... Tous les jours seront des jours de violence, toutes les nuits seront de nuits de punition. Je me nourrirai des fusillades bleues et de plates cicatrices. Un matin, l'on me trouvera assassiné, le visage enfoui dans un faux passeport. Les hommes qui voudront m'enterrer demanderont : "Qui est-il ?" Personne ne dira "C'est quelqu'un qui se battait pour que le caillou soit pur, pour que l'oiseau soit limpide." "Quel est son nom ?" Personne ne dira "Il a le nom de cette colline qui brille, de ce pollen qui coule, de ce gazon heureux simplement d'être vert."

Vendredi 23 Mars 2007.-

Giboulées et inquiétudes sur le FC Auch Gers ; à l'absence déjà prévue de RB, le capitaine de l'équipe, s'ajoutent celles de son suppléant à la direction, S ST L, et celle du réalisateur numéro 1, l'ouvreur AL. Comme, autour du groupe, je ressens une ambiance des plus moroses, je m'inquiète beaucoup pour la réception du LOU. Encore aujourd'hui, un quotidien local, par le biais de ces micros-trotttoirs qui, sous couvert de liberté de presse, me paraissent voler à peine au niveau des caniveaux auscitains, relance la polémique sur mon départ. Il me semblait pourtant que tout avait été dit. Pourra-t-on être capable de se recentrer sur le match et la saison à venir ? Mon ami, le psychologue YN m'explique qu'il y a deux catégories parmi les pourfendeurs: les amoureux déçus qui ne me pardonnent pas ce qu'ils considèrent - à juste titre - comme une trahison et ceux qui m'ont toujours détesté, sur lesquels j'ai depuis neuf ans essuyé mes crampons et qui peuvent enfin lâcher les venins accumulés. Restent les amis fidèles ; je sais que je ne me suis trompé sur personne dans cette histoire et j'en suis fier ; ceux sur lesquels je comptais sont bien là et ceux dont j'avais prévu qu'ils me lâcheraient ont bien disparu.

Samedi 24 Mars 2007.-

Le LOU a bien progressé depuis le match aller: la patte de Ch L est incontestable: défense intelligente basée sur la glisse, touche impeccable, l'ouvreur sur un nuage, le 9 expérimenté et malin avec le directeur de jeu... Un point faible : la mêlée mais comme le sifflet ne comprend pas, notre défaite est logique... Beaucoup d'engagement chez les miens ; le jeune ouvreur fait de bons débuts; le nouveau capitaine AB se multiplie; les buteurs souffrent et la relation lanceur - sauteur bafouille... Reste à féliciter le LOU... qui part en stage, une semaine, en Béarn avant de gagner Maurice Trélut pour rencontrer le TPR... Imaginons le FCAG, huit jours, dans l'Ain, entre Lyon et Oyonnax! Mon Club, sans aller jusque-là, doit évoluer pour pouvoir rester dans le monde professionnel ; je me suis battu pour cela et c'est un peu découragé, beaucoup amer, que je m'en vais sans avoir réussi à imposer mes idées ; mon départ semble avoir réconcilié certains de mes opposants autour du Club... tant mieux si ce dernier peut bénéficier de nouveaux appuis : j'en serais heureux pour mes successeurs !

A la sortie des vestiaires, le couple St M m'attend, ils sont invités à dîner ce soir : ils arriveront en retard car ils ne veulent pas manquer notre rendez-vous hebdomadaire d'après-match.

Quelques joueurs me lâchent : "Il y avait moins de monde que d'habitude dans les vestiaires ! " Ils sont jeunes et la vie leur apprendra à choisir leurs relations.

Dimanche 25 Mars 2007.-

Les Espoirs et les Reichel reçoivent cette après-midi l'illustre Stade Toulousain ; en d'autres temps, je n'aurais jamais manqué un tel rendez-vous sur l'herbe du Bourrec, ce terrain craint par tous les voyageurs : ballons perdus dans le Gers ou derrière le champ de tir, cabossant tantôt les voitures, tantôt les passants, public restreint mais inconditionnel soumettant les arbitres à la pire des pressions...

Aujourd'hui j'abandonne les miens car je veux voir mon ami, le Président AL, à la tête de l'Entente Miélan/Mirande depuis plus de 20 ans. Parmi ses invités, l'ancien Président de Villefranche de Lauragais FC, une amitié elle aussi forgée par de multiples affrontements avec le LSC. C'est trop bon d'être là à discuter passé et avenir, mêlée et jeu au pied, maul et passe. J'ai entraîné AL en 1973 / 74 à Mirande ; il jouait 3/4 centre, attaquait bien mais oubliait trop souvent de défendre ce qui provoquait mon ire ; mes coups de gueules nous ont rapprochés : je suis toujours entraîneur, il est devenu un des chefs d'une entreprise parmi les plus florissantes du département ; membre du Comité Directeur du FCAG ; j'aurais aimé qu'il s'investisse davantage dans mon club ; il est resté fidèle aux siens, en Fédérale II. Il les tient à bout de bras : ce type-là est un seigneur, croyez-moi.

Dans les vestiaires, j'ai rencontré beaucoup d'anciens joueurs côté Miélan – Mirande mais aussi côté FCTT : que du bonheur de les revoir ! Qu'on est loin des polémiques de ces derniers jours ! Je me souviens qu'il y a une dizaine d'années, j'avais sérieusement pensé à rejoindre le FCT du Président D., depuis décédé ; j'avais voulu me colleter avec les enfants d'Empalot pour les conduire au Rugby ; j'aimais ce stade Corbarrieu des bords de Garonne ; imiter G., ce formidable éducateur de Massy !

Lundi 26 Mars 2007.-

Je n'ai eu qu'une seule entrevue avec un joueur d'Agen depuis mon adoubement ; c'est avec ML ; j'aurais aimé travailler avec cet homme qui fait partie d'une des familles les plus célèbres du Rugby Français : j'apprécie son investissement sur le terrain et son engagement dans la vie quotidienne. Nous nous rappelons aujourd'hui et il m'annonce qu'il va partir ; j'en suis malheureux mais je respecte sa décision : je crois que nous aurions passé de bons moments ensemble... A nos actes manqués !

PS : HS le chef de la tribu la plus célèbre du rugby samatanais est allé rejoindre Yvette de l'autre côté du miroir : j'ai joué avec ses cinq fils qui ont eu cinq garçons et j'ai entraîné l'un d'entre eux qui vient d'avoir un second garçon ; Henri a été champion de France avec l'USSL en 1951 ; Pierre, André et Bernard ont joué au plus haut niveau avec le LSC ; le petit fils Jérôme était titulaire en TOP 16 au FCAG - ouvreur, il avait fait tourner en bourrique le fameux ailier du SUA, RC, au Moulias - On annonce Léo, autre petit fils, encore cadet au LSC comme un futur grand. Dans cette famille, j'ai toujours été reçu comme un des leurs : gâté comme si je portais leur nom... j'ai perdu un second père !

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