La chronique de Pierre Villepreux

Par Rugbyrama
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Dans sa chronique hebdomadaire, notre expert Pierre Villepreux revient sur la victoire des Lions britanniques lors de leur dernier test contre les Springboks samedi dernier. Et se réjouit que l'équipe la plus joueuse l'ait emporté.

Le dernier test match des Lions contre l'Afrique du Sud a confirmé, et cette fois-ci par une victoire, qu'une meilleure qualité du jeu pouvait aussi déboucher sur un jeu gagnant. Bien sûr, on ne manquera pas de faire valoir que les Springboks ne présentaient pas leur équipe type et que leur succès dans les deux premiers matchs avaient considérablement diminué leurs motivations et indirectement alangui la violence qu'ils avaient imposée dans le combat lors des matchs précédents.

Ce vecteur du jeu est essentiel pour que les Sud-Africains soient efficaces et, du même coup, en étant physiquement moins destructeurs, cela a permis à ce dernier match d'être joué avec moins de retenue des deux cotés. On eu droit à de nombreuses et belles séquences de jeu qui ont traduit la belle humeur offensive des uns et des autres. Au jeu mieux huilé et plus collectif des Lions, leurs adversaires imposaient des coups plus individuels, mais ce jeu offensif des deux équipes n'a jamais été la conséquence d'un relâchement défensif la défense. Celle-ci n'a jamais failli ni d'un côté ni de l'autre.

Pour le public comme pour les joueurs, ce vecteur combat est en effet une dimension essentielle dans la construction du jeu collectif des Springboks. Quand ce jeu est gagnant comme dans les deux premiers tests, la performance s'évalue dans ce domaine plutôt que dans les autres dimensions du jeu, le tactique et le technique. La valeur émotionnelle ressentie n'en est que plus grande car c'est bien l'identité sociale et rugbystique de ce pays qui est triomphante. Le bien jouer même s'il est apprécié devient secondaire dans l'évaluation de la prouesse tant individuelle que collective.

Pourtant, dans ce match où ils furent menés au score rapidement, c'est ce bien jouer qui aurait pu les sauver. Mais quand on veut entreprendre parce qu'on y est obligé du fait du score défavorable, il faut non seulement prendre des initiatives mais aussi faire preuve d'adaptabilité et avoir la confiance pour le faire. Même si le jeu développé par les "Boks" pour parvenir près de la ligne de but adverse a été quelquefois déstabilisateur pour les Lions, les options de jeu choisies pour finir, près de la ligne de but adverse, leurs meilleures séquences faisaient trop appel à la seule force physique. Ce choix n'a jamais, bien au contraire, perturbé la défense adverse qui est sortie gagnante de ce duel et lui a permis de récupérer à chaque fois le ballon. Cette prouesse non attendue de leurs adversaires eut pour effet d'affaiblir mentalement les avants sud-africains. Obligés de sortir de leur rugby prioritaire, ils se fragilisèrent puisque contraints de proposer du jeu essentiellement sur les seules combinaisons des lignes arrières beaucoup trop prévisibles. La défense adverse su alors parfaitement détecter un des schémas de jeu pour ajuster une interception qui tua complètement le match.

Si les Lions ont gagné, c'est qu'ils ont accepté de produire du jeu tout au long du match, ce qui n'avait pas été le cas le match précédent quand ils arrêtèrent d'entreprendre alors qu'ils menaient au score. C'est aussi qu'ils proposèrent un jeu beaucoup plus efficace pour pénétrer dans la défense adverse. Chaque fois qu'ils choisirent de faire pénétrer le soutien dans l'axe par passe avant contact, ils créèrent des brèches énormes dans la défense et donnèrent au jeu une dynamique inhabituelle. Entrevue rarement dans les autres matchs, il y a eu une réelle volonté de jouer le jeu pénétrant en restant debout. Je ne doute pas que les coaches britishs sauront retenir la leçon et que cette option offensive pour pénétrer la défense va s'installer durablement dans les équipes britanniques. Ces savoir faire vont grandement enrichir leur jeu en créant plus d'incertitude pour la défense adverse. Cette option de jeu contrastait avec celui offert par les Sud-Africains, continuant sans beaucoup de succès à pilonner individuellement et sans variabilité la défense adverse.

Cette tournée, côté Lions, me semble positive pour le jeu et les progrès réalisés entre les matchs en début de tournée et la fin de celle-ci sont importants. Ce jeu (le volume et la qualité) mis en oeuvre par les meilleurs joueurs britanniques et irlandais va certainement se développer dans toutes les nations. Tant mieux pour l'Europe qui a tout à gagner dans le choix d'un rugby toujours plus entreprenant donc forcément plus volumineux. Attendons maintenant la compétition des tri-Nations du sud pour se faire un idée encore plus précise des forces en présence.

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