De La Rochelle à Rio : l'incroyable parcours de Steeve Barry

  • Steeve Barry, membre de l'équipe de France à 7
    Steeve Barry, membre de l'équipe de France à 7
  • Steeve Barry file à l'essai contre l'Allemagne  - juin 2015
    Steeve Barry file à l'essai contre l'Allemagne - juin 2015
  • Steeve Barry lors d'un entraînement de France 7
    Steeve Barry lors d'un entraînement de France 7
  • Steeve Barry face au Portugal - juin 2015
    Steeve Barry face au Portugal - juin 2015
  • Le raffut de Steeve Barry face à l'Angleterre
    Le raffut de Steeve Barry face à l'Angleterre
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RUGBY SEVENS - Steeve Barry n’a que 21 ans quand il choisit l’équipe de France à 7 en 2012 : il peine alors à s’imposer à La Rochelle. Quatre ans plus tard, il est l’un des cadres de France 7 et devrait représenter son pays aux Jeux Olympiques de Rio. Le pari, risqué à l’époque, s'est avéré payant. Rencontre avec un joueur atypique.

Steeve Barry est disponible, mais pour le rencontrer, il faut éviter certaines heures, celles où La Rochelle joue. L’ASR, il l’a toujours dans un coin de la tête. Il m’envoie un message à chaque gros match, s’amuse Patrice Collazo, son ancien et futur entraîneur au Stade rochelais. Il suit les résultats, les performances des copains qui sont restés là-bas aussi. Pas seulement par conscience professionnelle, mais parce qu’il reste un supporter fidèle.

Avant de retrouver la tunique Jaune et Noire, l'international à VII a un dernier objectif : les Jeux Olympiques. Rio, voilà ce qui l’a décidé à partir. C’était un rêve de pouvoir essayer de jouer les JO. On n’y est pas encore, mais l’équipe est qualifiée, c’est déjà un grand pas pour la France. Lui imagine que l’équipe pourrait partir sans lui. C’est inconcevable ! C’est un des joueurs qui a le plus de temps de jeu. Je n’ose pas imaginer les JO sans lui, réplique Julien Candelon, son partenaire.

Steeve Barry file à l'essai contre l'Allemagne  - juin 2015
Steeve Barry file à l'essai contre l'Allemagne - juin 2015

Avec ses 137 sélections en carrière, et seulement 12 matchs ratés cette saison - dont les 10 rencontres des tournois de Singapour et Hong-Kong où il était malade - le centre ne semble pas en danger. Fausse modestie ou manière de se protéger d’une désillusion, Steeve Barry se plaît pourtant à répéter que personne n’a sa place. Seul le staff est sûr d’aller aux Jeux pour le moment.

Pomarel: "Steeve, c'est un bosseur"

L’encadrement, lui, ne se pose pas la question : il est devenu l’un des cadres de cette équipe de France à 7. Il a travaillé pour s’imposer. C’est un bosseur. Au début, il était centré sur lui-même, il avait des qualités individuelles, mais il s’est amélioré au niveau collectif, se satisfait le sélectionneur, Frédéric Pomarel. Quand il a commencé à 7, Steeve Barry jouait comme un ailier à 15, selon ses dires. En 4 ans, il a appris à transmettre son ballon. Il a gagné en maturité, ajoute Candelon.

Sa passe des deux côtés, ses qualités d’appuis et de vitesse, sa capacité à franchir la défense, sa régularité : ses entraîneurs, actuel et futur, et son coéquipier n’ont pas grand-chose à lui reprocher. En cherchant bien, Frédéric Pomarel trouve que, récemment, il a eu un petit passage à vide défensif, mais tout de suite il tempère : ce n’est qu’un passage, il sait se remettre en question. Julien Candelon parle d’un manque de densité physique, qu’il compense par son envie et son explosivité.

Steeve Barry lors d'un entraînement de France 7
Steeve Barry lors d'un entraînement de France 7

Barry: "Quand tu as 21 ans et qu'on te propose d'aller au 4 coins du monde..."

A tout juste 25 ans, Steeve Barry compte 37 tournois. En 2012, il a été l’un des premiers à signer avec la Fédération française de rugby. Quatre ans plus tôt, il a opté pour un pari risqué : France 7 était en chantier, les Jeux Olympiques étaient encore loin. Dès 2010, il a fait quelques piges : il a été repéré avec les Espoirs de La Rochelle à 7, avec qui il a été champion de France en 2011. Depuis, il est devenu champion d’Europe en 2014, et s’est qualifié pour les JO. Il a connu quelques désillusions aussi : la défaite en quart de finale contre le Kenya en 2013 reste l’un de ses pires souvenirs. En plus, je me pète l’épaule et j’en prends pour 4 mois. Tu prends une claque mentalement, mais aussi une claque physiquement, raconte-t-il, aujourd’hui avec le sourire.

En 2011-2012, l’Espoirs de l’ASR n’a joué que six matchs en Pro D2 : 4 en début de saison, puis il a dû attendre le mois de mai pour retrouver les Pros. Quand t’es jeune, tu prends ce qu’on te donne, tu grappilles du temps de jeu. J’étais déjà content de jouer ! A 7, Steeve Barry espérait un peu plus de stabilité. A l’époque, La Rochelle, qui voyait en lui un gros potentiel, lui a pourtant proposé un contrat de la même durée, et sans grande différence financièrement, selon l’intéressé. Prendre une décision comme ça aussi jeune prouve qu’il se remet en question. Patrice Collazo a une pointe d’admiration.

Steeve Barry face au Portugal - juin 2015
Steeve Barry face au Portugal - juin 2015

Dans les premiers temps, l’international a douté. Quelques amis du centre de formation comme Julien Berger, Charles Lagarde ou Arthur Cestaro découvraient le Top 14, pendant que lui galérait pour un billet à Rio. Le fait qu’on obtienne cette qualification olympique l’année dernière, ça m’a un peu rassuré dans le choix que j’avais fait, assure Steeve Barry. Le défi sportif a, évidemment, décidé le joueur, mais pas seulement. Quand tu as 21 ans et qu’on te propose d’aller aux 4 coins du monde, c’est une aventure humaine assez incroyable.

Candelon: "C'est le roi de la photo"

Steeve Barry immortalise chaque étape. C’est le roi de la photo !, exagère Julien Candelon. Depuis un an, sur son compte Instagram, apparaissent des photos de Wellington, de Vancouver, de Las Vegas… Et au milieu, Ruffec, sa ville charentaise de quelques 3 500 habitants, ou La Rochelle. Dès qu’il rentre de tournée, l’international revient là où tout a commencé. Quitter sa famille et sa région, ça a été dur, j’y suis très attaché. A 25 ans, il a envie de se poser. Steeve Barry reste secret sur sa vie, y compris avec ses coéquipiers, mais il devient intarissable quand il s’agit de la Charente et de la Charente-Maritime. A travers ses paroles, on a l’impression de partir en vacances là-bas souvent ! Si un jour il a besoin, il pourra penser à une reconversion à l’office du tourisme, s’amuse Julien Candelon.

Pour la saison prochaine, l’Atlantique Stade Rochelais compte sur lui, à l’aile ou au centre. Il ne faut pas plus de 5 minutes pour comprendre que l’impatience est aussi forte dans les deux camps. Quand il est parti, ça a été une énorme perte pour nous. C’est acté depuis très, très longtemps que Steeve voulait revenir au club… Il m’a rencontré et la conversation a duré 15 minutes ! On était tous très contents : il est Rochelais !, s’enthousiasme Patrice Collazo. Son futur joueur trépigne : Je n’aurais pas voulu aller dans un autre club que le Stade. Il me tarde de rejouer à Deflandre.

Le raffut de Steeve Barry face à l'Angleterre
Le raffut de Steeve Barry face à l'Angleterre

Quand il parle de l’antre rochelais, enfin Steeve Barry se livre un peu ; il deviendrait même bavard. Avec le Seven, on a joué des matches de fou, dans des stades comme Twickenham plein, ou Hong-Kong qui t’étouffe, mais je me souviens le premier match de championnat que j'ai joué à La Rochelle : c’était contre Périgueux. Patrice [Collazo, NDLR] m’avait fait entrer en premier, tout seul sur le terrain… J’avais 20 ans et je regardais le stade en ébullition, et j’étais comme un fou. C’était magique.

Bien partir, et mieux revenir

Avec ce retour à 15, en Top 14, un niveau qu’il ne connaît pas, Steeve Barry se met en danger. Je pense qu’on a besoin de ça aussi pour avancer, nous les sportifs, assure le joueur. Mais très vite son discours teinté d’humilité revient : Je sais que ça va être dur de gagner sa place. A La Rochelle, il y a du beau monde quand même… La concurrence le déstabilise un peu, la possibilité d’enchaîner deux saisons au haut-niveau aussi. Le manque d’espace, il y pense mais il y a d’autres facteurs qui entrent en jeu, dans le combat… En Top 14, tu joues contre des joueurs qui sont entre guillemets plus lents. Il va bien falloir compenser quelque part de toute façon ! Derrière son air malicieux, Steeve Barry laisse apparaître le compétiteur.

Avant La Rochelle et Rio, Steeve Barry veut jouer et obtenir un bon résultat au tournoi de Paris. Il a coché la date depuis quelques temps. On espère tous être sélectionné ce week-end-là. La France évite les quatre premiers mondiaux, et espère faire mieux qu’à Singapour. Déjà pour se rassurer avant les Jeux Olympiques. Mais aussi pour faire connaître le Seven. C’est un peu inconnu en France. Quand je dis que je fais du rugby à 7, parfois on me demande si je joue dans la ville de Sète ! Difficile de savoir quand ce joueur, faussement timide et "coquin" selon son sélectionneur, plaisante ou pas. Il assure qu’il n’exagère pas.

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