Gelez : "Le rugby est définitivement lancé en Algérie"

Par Rugbyrama
  • François Gelez
    François Gelez
  • Jean-Jacques Crenca ne sera pas conservé par Agen à la fin de la saison
    Jean-Jacques Crenca ne sera pas conservé par Agen à la fin de la saison
  • Said Hirèche (Brive) - 7 janvier 2017
    Said Hirèche (Brive) - 7 janvier 2017
Publié le Mis à jour
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Le dimanche 5 novembre sera un jour qui fera date dans l'histoire du rugby algérien. Les "Fennecs" ont vaincu la Zambie (30-25) et remporté la Rugby Africa Bronze Cup 2017. François Gelez, le coach de la sélection, raconte.

Membre de Rugby Afrique depuis décembre dernier, l'équipe d'Algérie évoluera désormais à l'échelon supérieure... Une étape supplémentaire plus qu'un aboutissement pour François Gelez, qui entraîne actuellement la sélection aux côtés de Jean-Jacques Crenca.

Jean-Jacques Crenca ne sera pas conservé par Agen à la fin de la saison
Jean-Jacques Crenca ne sera pas conservé par Agen à la fin de la saison

Rugbyrama : Pour la première participation de l'Algérie à une compétition officielle, vous remportez la Rugby Africa Bronze Cup 2017. On imagine votre fierté...

François Gelez : "C'est la conclusion d'une belle aventure. Dès notre rencontre avec les dirigeants, ils nous ont expliqué qu'ils étaient partis de zéro, enchaînant des matches officiels depuis dix ans, et qu'ils attendaient impatiemment leur premier match dans un cadre officiel. Ce match, qui est la conclusion de dix années de travail, nous permet de gagner de la légitimité auprès du monde du rugby mais également auprès du ministère des Sports en Algérie. Jouer le match était déjà une première victoire. Le remporter est la cerise sur le gâteau. Désormais, le rugby en Algérie est lancé définitivement. C'est une belle émotion."

Vous vous êtes imposés en Zambie alors qu'ils n'avaient plus perdu le moindre match à domicile depuis 2002... ça en dit long sur l'exploit réalisé...

F.G : "Le voyage a été long, nous avons joué sous 35 degrés alors que nous n'étions plus habitués à ce genre de chaleur en France... Le contexte ne nous était pas favorable et le contraste physique forcement à notre désavantage. Le match a été long à terminer mais les joueurs ont été courageux : En deux coups bien menés, les Zambiens ont quasiment refait leur retard mais nos joueurs ont su trouver les ressources physiques nécessaires pour faire front sur la dernière action, et ramener la victoire. C'était une joie assez pure parce que les joueurs ne sont pas payés et que leur seule motivation est de créer une histoire du rugby en Algérie."

Vous avez eu combien de temps pour préparer ce match crucial ?

F.G : "Le match était prévu samedi donc nous sommes arrivés le jeudi pour s'entraîner le vendredi matin. Les joueurs se sont servis de ces deux entraînements pour mettre en place des choses intéressantes. Il fallait également penser à la récupération donc nous n'avons pas voulu surentraîner les joueurs. Nous avons également fait du tableau noir en précisant aux joueurs qu'il leur faudrait adapter la stratégie en cours de match. Les joueurs l'ont très bien fait en se montrant solidaires et en s'adaptant à leurs capacités du moment. Nous savions que la fatigue allait se faire sentir et qu'il faudrait serrer les rangs jusqu'au bout."

Intégrer la division 1 d'ici deux à trois ans

Sur quoi avez-vous basé votre succès ?

F.G : "Nous avions une ossature de joueurs évoluant en Fédérale 1. Ce sont donc des joueurs qui possèdent cette culture du haut niveau. Ils savent très bien ce qu'on leur demande donc le manque d'entraînements ne nous inquiétait pas. Nous savions les joueurs suffisamment intelligents pour s'adapter aux conditions du moment et appuyer sur nos points forts : nous affrontions des joueurs très rapides habitués au "seven" donc il ne fallait surtout pas tomber dans un rythme effréné. Nous nous sommes rapidement aperçus que nous étions plus costauds, raison pour laquelle nous avons insisté sur les ballons portés."

Grâce à cette victoire, l'équipe d'Algérie évoluera désormais dans la division supérieure, en Rugby Africa Silver Cup. Quels seront vos objectifs dans cette division ?

F.G : "Il ne faut pas se fixer de limites mais donner une vraie ambition à cette équipe parce que seules les victoires nous permettront de gagner en légitimité. Nous intégrerons ce deuxième niveau avec l'ambition de gagner tous les matches. L'objectif de tout le staff est de garder ce vivre ensemble que les joueurs ont su développer, et de le mixer avec une professionnalisation de la structure aussi bien en terme de logistique que de rugby pur : les victoires seront au bout. Nous avons des joueurs de très bon niveau mais nous pouvons encore en attirer des meilleurs."

Combien d'années vous donnez-vous pour atteindre le niveau 1 ?

F.G : "Cette victoire c'est un vent d'optimisme pour tout le monde. Nous avons envie de croire que ce n'est que le début de l'histoire pour l'équipe d'Algérie et qu'elle peut gravir petit à petit les échelons, pour acquérir dans le futur une légitimité internationale. Avec les dirigeants, le président et l'ensemble du staff, nous en discuterons en temps voulu mais je pense que d'ici deux à trois ans nous pourrons légitimement espérer intégrer le niveau 1. Cela demandera beaucoup d'investissement des joueurs, du staff mais également des dirigeants afin de mettre les moyens nécessaires à disposition de l'équipe. Nous partageons cette volonté commune de s'inscrire dans la durée."

Ce n'est ni le club med' ni une armée mexicaine

Vous entraînez la sélection algérienne depuis le début de l'année. Comment le contact s'est-il noué ?

F.G : "Une de nos connaissances, nous a mis en contact avec Allam Boumedienne, le manager de la sélection, avec qui j'avais évolué en sélections de jeune. Le contact s'est établi naturellement : nous étions à l’arrêt avec "Jeannot", avec l'envie de remettre le survêtement mais également de vivre une expérience différente, parce que diriger une sélection et un club sont deux choses différentes. Nous avons senti de l'enthousiasme de la part des dirigeants à tel point que nous nous sommes dits : "Pourquoi pas leur donner un coup de main" sans savoir combien de temps notre expérience allait durer. C'est notre devoir de rendre ce que nous avons reçu lorsque nous étions jeunes. Après avoir effectué deux stages au premier semestre, nous attendions la concrétisation de ces stages qui est venue ce week-end."

Avec cette victoire, on constate que votre travail mis en place a payé. Est-ce que vous avez prévu de continuer l'aventure ?

F.G : "Avec "Jeannot" nous avons des carrières à mener et espérons retrouver un club assez rapidement, chacun de notre côté ou en binôme : nous avons toujours été clairs à ce sujet vis-à-vis de nos dirigeants. Tant que possibilité nous sera offerte d'entraîner et d'accompagner cette équipe, nous le ferons avec beaucoup de plaisir. Nous avons un groupe très réceptif et avons envie d'apporter quelque chose à cette sélection. Deux matches sont prévus au mois de décembre dans le cadre du Tri-Nations (contre la Tunisie et le Maroc) et il me tarde déjà de retrouver mes joueurs."

À moyen terme, est-ce que vous pensez que ce coup d'éclat pourra inciter des joueurs à choisir la sélection algérienne ?

F.G : "Certains joueurs peuvent hésiter à se lancer dans le projet parce qu’il est tout nouveau. Nous avons envie de leur montrer qu'ils ne perdront pas leur temps à rejoindre cette équipe. Premièrement, parce que l'ambiance de travail y est agréable, et permet de vivre quelque chose d'hors du commun en sortant de la routine du championnat. Nous avons également envie qu'ils se rendent comptent de la compétitivité du staff ainsi que des moyens logistiques et médicaux mis à leur disposition. La sélection algérienne ce n'est ni le club med' ni une armée mexicaine. Dans les mois qui viennent, nous allons essayer de structurer l'équipe au mieux afin que les joueurs viennent en toute sécurité et se régalent en remportant des matches."

Saïd Hirèche est légitime pour intégrer le groupe
Said Hirèche (Brive) - 7 janvier 2017
Said Hirèche (Brive) - 7 janvier 2017

Vous avez ciblé des joueurs en particulier ?

F.G : "Contre la Zambie, beaucoup de joueurs du monde professionnel ne pouvaient pas être des nôtres. Nous comprenons par exemple très bien que Saïd Hirèche ne puisse pas se libérer pour l'Algérie alors que son équipe dispute un match crucial pour le maintien (contre le Stade français, le 5 novembre). Peut-être qu'il sera davantage intéressé pour nous aider en décembre prochain, ou en juin lorsque la saison sera terminée. C'est le genre de joueur légitime pour intégrer l'équipe : Nous restons en contact pour les accueillir lorsqu'une fenêtre de tir s'ouvrira. Dans les mois à venir nous aimerions compter entre quarante et cinquante joueurs de bons niveaux, en fonction des disponibilités de chacun."

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