Le Munster à terre

"Une défaite à Toulon nous tuerait". C'est en ces termes que s'était exprimé Donncha O'Callaghan dans l'Irish Times quelques jours avant le match à Mayol. Une déclaration exempte de toute ambiguïté, témoignage éloquent de la pression qui pesait sur les épaules des Munstermen avant ce choc. Et ils se sont, comme on le sait, littéralement écroulés, écrivant l'une des plus sombres pages de leur histoire dimanche. Ridiculisés par le RCT, les doubles champions d'Europe n'avaient plus perdu en poule sur une telle marge depuis octobre 2002 et une défaite à Gloucester (16-35). Un lourd revers qui les privés de quarts de finale de la H Cup pour la première fois depuis 1998.

Outre la défaite, cruelle, c'est la manière, décevante, qui a fait mal. Immédiatement dépassés dans l'engagement, les Irlandais n'ont jamais existé dans cette rencontre et n'ont été que l'ombre d'eux-mêmes. "Nous avons été pris d'angoisse après leur premier essai, analysait, hébété, le troisième ligne David Wallace après le match. Nous nous sommes totalement décomposés et leur avons offert des cadeaux dont Jonny Wilkinson s'est régalé." A Limerick ou à Mayol dimanche, la déception était proportionnelle aux attentes placées dans cette rencontre. "Le vestiaire était très sombre, très silencieux, reprenait Wallace. Nous avons une histoire dans cette compétition et n'avons pas été habitués, ces dernières années, à être éliminés à ce stade. Nous sommes très déçus." La presse irlandaise aussi, qui évoquait lundi un "empire en déclin" après un match "sans imagination, précision ou maîtrise dans aucun domaine du jeu". "Le Munster dit au revoir (en Français dans le texte) à une ère", titrait même The Irish Times.

La Ligue celte pour renaître

On sait que la tension autour de cette rencontre était immense, suffocante, paralysante. Constitue-t-elle la seule explication plausible toutefois ? Bien sûr que non. L'Irish Independant parle, ce lundi, d'une "équipe vieillissante". Les O'Callaghan, O'Connell, Stringer, O'Gara, Wallace, Hayes et autres Howlett, tous trentenaires, sont pointés du doigt depuis de longs mois déjà. Et se défendent : "Ce n'est pas la fin d'une époque, assure O'Connell. Il y a de très bons joueurs qui arrivent, des jeunes qui émergent et des mecs de qualité qui sont blessés. Je pense que nous sommes une grande équipe. C'est juste qu'elle ne joue pas bien en ce moment."

Il faut tout de même reconnaître que le Munster n'est plus ce qu'il était. Les joueurs eux-mêmes l'avouent du bout des lèvres."Peut-être que dans les années passées, nous aurions gagné cette rencontre comme nous l'avions fait à Perpignan la saison dernière", soufflait David Wallace. L'entraîneur Tony McGahan confirmait sans langue de bois : "Il est évident que nous étions moins performants depuis deux ans maintenant."

Alors cette défaite a-t-elle vraiment tuée la Red Army comme le prédisait O'Callaghan ? Il est trop tôt pour le dire. Et, bien sûr, les Irlandais veulent faire bonne figure : "Nous sommes à un carrefour et il suffit de retrouver le bon chemin", assure Paul O'Connell. L'ouvreur Ronan O'Gara précise : "Le Munster a encore beaucoup à offrir, il faut se ressouder et revenir encore meilleurs." Pour cela, il faudra digérer cette déception. L'équipe de Limerick, bien que blessée, n'est pas morte. Et elle compte sur la Ligue celte, qu'elle domine largement, pour renaître de ses cendres.