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Du "Boni" dans l’air : l'édito du vendredi, après le décès d'André Boniface, légende du rugby français et de Mont-de-Marsan

  • André Boniface, légende de Mont-de-Marsan, s'est éteint le 8 avril 2024.
    André Boniface, légende de Mont-de-Marsan, s'est éteint le 8 avril 2024. Amandine Noel / Icon Sport
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Il y a finalement peu de noms, comme le sien, qui ont traversé les âges et les générations du rugby. Des joueurs auxquels on doit tant et bien au-delà de leur seul palmarès. Qui, dans l’histoire de ce sport, peut se targuer d’être associé à un geste depuis démocratisé (la passe croisée), à un mouvement de jeu et de pensée, à une manière de vivre son sport à contre-courant de la pratique généralisée ? Plus bohème, plus romantique, avec un sens de l’esthétique qui pouvait l’emporter sur la seule préoccupation de victoire, André Boniface pensait le rugby comme si la finalité d’un essai ou d’un succès ne pouvait se suffire à elle-même.

Tout cela semble loin, et pourtant… Il y a un peu de "Boni" qui flotte toujours dans l’air et continue d’alimenter les croyances du rugby, tel qu’on le vit en France. Quand les joueurs du XV de France, très récemment, ont émis le souhait de sortir d’un cadre de jeu trop restrictif pour retrouver de la liberté d’initiative, du mouvement, de la respiration, ils nourrissaient sans y penser son héritage : à la fois contestataire et ambitieux ; frondeur et rêveur. Fait-on plus français ?

Ugo Mola convoquait encore du Boniface dans le texte quand, au matin de la dernière finale de Top 14, il rappelait à ses joueurs qu’il s’agirait d’abord d’un "jeu", bien avant la "guerre" dont on leur faisait promesse face au Stade rochelais. Il faut jouer, oui, et oser pour embrasser ce que le rugby peut offrir de meilleur. Alors, c’est bien dans un dernier élan offensif décousu et dynamique que les Toulousains trouvaient l’ultime faille, par Ntamack, d’une passe de plus et d’une course folle. L’audace comme une délivrance, là où tant d’esprits chagrins auraient préféré les petits tas à l’infini, l’option sécuritaire de ceux qui pensent petit.

Cette envie de grand large et de libertés tranche avec le rigorisme tactique très anglo-saxon, certainement pragmatique en diable et dont on ne prouve plus l’efficacité. Mais on ne saurait finalement s’en affranchir : à chaque fois que les Bleus de France ont essayé de jouer autrement, de jouer comme les autres, singeant des paradigmes qui ne faisaient jaillir aucune étincelle en leur âme profonde, ils se sont finalement trompés, s’éloignant de leur ADN, de ce qu’ils sont vraiment et de ce qu’on leur inculque depuis gamins. C’est encore ici que "Boni", avant les autres, influença la pratique de son sport jusque dans ses écoles de jeu. D’abord au Stade montois, l’autre amour de sa vie. Puis dans les Landes et, finalement, tout un pays.

Cet esprit libertaire, c’est son plus bel héritage. Celui qu’on qualifie vaguement de "french flair", expression derrière laquelle on invoque tout et n’importe quoi, mais qui se résume finalement dans ce trait d’esprit d’André Boniface, disparu ce lundi et parti rejoindre son frère Guy, l’idole et la blessure de sa vie : "J’ai toujours pensé que le style ne nuisait pas à l’efficacité".

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