Top 14 – Bernard Laporte (Montpellier) revient à Toulon avec un statut de "légende" aux yeux des supporters du RCT
Presque huit ans après son départ de la rade, le directeur du rugby de transition du MHR retourne sur la terre de ses exploits. Au sein du peuple Rouge et Noir, l’ex-président de la FFR reste idolâtré et son nom est écrit en lettre de noblesse dans l’histoire du RCT.
Dans ce brouillamini d’excès et de passion en contrebas du Mont Faron, Bernard Laporte est un paradoxe à lui seul : d’un ennemi avec sa bande à damiers de Bègles en 1991 à un statut de demi-dieu depuis son départ du RCT en 2016. "Et pourtant, à l’époque, un scepticisme entoure sa venue ici, avoue Julien Perpère, président des Fils de Besagne. Il arrive avec une image de Béglais, des casseroles dans le sac, un départ houleux de Bayonne. On se demande où l’on va." Patrick Fornet, président des Mordus, embraye avec le sourire. "Le duo Laporte – Boudjellal ? On se dit que ça ne va pas durer quinze jours ! C’est le feu contre le feu ! Bernard nous avait emmerdés sur la venue de Bastareaud, il y avait les histoires avec Bègles. On ne se sait pas trop s’il nous aimait…"
Dans le pays de Raimu, encore plus qu’ailleurs, les actes valent mieux que les mots : une triple couronne européenne (2013, 2014, 2015), un bout de bois (2014) et une palanquée de phases finales ont écrit les années Laporte dans le marbre. Ni le temps, ni les affaires qui ont suivi ne peuvent effacer cette aventure dorée durant laquelle Toulon "a plus gagné en trois ans qu’en 100 ans" rappelle Fornet, qui loue "son apport inestimable et sa trace immense dans la mémoire des Toulonnais".
Pour Perpère, ce débat ne mérite pas d’être mis sur la table : "Bernard restera celui qui nous a ramenés tout en haut, et il sera toujours adoré pour ça. Le reste est complètement secondaire. Ses affaires avec la FFR n’intéressent personne, et d’ailleurs on se fiche de ce qui se passe à la FFR. Culturellement, la Fédé a toujours été contre Toulon." En ouverture de la 19e journée, ce ne sera pas la FFR en face de Toulon, mais bien Bernard Laporte, à la tête de Montpellier depuis novembre dernier. "Ça sera particulier parce que c’est le match des anciens avec Patrice Collazo, Louis Carbonel, Justine Benoît, enchaîne le président des « FDB ». Pour Bernard, il y aura des applaudissements. On encouragera notre équipe, mais l’affection pour lui est réelle. Ça va faire bizarre de le voir avec un autre blason… C’est presque un petit déchirement avec un instant de nostalgie ! Mais, on se méfie de lui et notamment de la dynamique qu’il a su insuffler du côté de Montpellier. Avec lui, et surtout grâce à lui, ça marche !"
Du Muguet au Ciste, des retrouvailles "étranges" pour les supporters
Son alter ego partage l’avis, en apportant un autre angle de lecture. "Ça fait drôle de le voir face à nous, mais je pense que ça fait bizarre à Bernard d’être contre Toulon. On sait l’attachement qu’il a pour cette ville. Son discours lors de son départ est resté dans le cœur des supporters." Ce soir de juin 2016, au micro et accompagné par Mourad Boudjellal, Bernard Laporte avait déclaré sa flamme aux supporters Rouge et Noir. Une minute restée dans la légende, peut-être même au-delà de ce qui s’était joué sur le terrain. "Merci à toi Mourad d’être venu me chercher il y a cinq ans. Tu as su ranimer la flamme en moi. […] À vous, public, je vous dirais que je vous ai haïs (en tant qu’adversaire), je vous ai jalousés tellement je vous aimais, qu’on n’était pas comme vous à Bègles. […] On vous en voulait parce que vous êtes différents et qu’on voulait vous ressembler. Et ce n’est pas facile… Alors, après cinq ans, gardez ça ! Gardez le fait d’être différent ! Parce que tout le monde vous jalouse et tant qu’ils vous jalouseront, c’est que ça ira pour vous."
Ses mots prononcés résonnent encore dans le port, à travers les vagues et dans le chant assourdissant des gabians. "Aujourd’hui, qui nous jalouse… (silence), s’interroge Perpère. On aime Bernard pour son aventure auprès de notre club, mais aussi pour sa personnalité et son accessibilité avec les gens. Il est capable de parler avec n’importe quel supporter. Les mots sont tellement justes, et ils prouvent que les gens ne sont pas obligés de naître à Saint-Jean du Var pour nous comprendre et nous aimer. On est partis de Mayol en chialant lors de cette soirée. Cette aventure incroyable est en fait la rencontre entre un homme différent et des supporters différents. Ça fait une belle histoire d’amour."
Avec un demi-siècle de supporterisme à son actif, Fornet atteste que cet adieu a fait entrer le gamin de Gaillac dans le "panthéon du RCT". "En résumé, il dit qu’on emmerde la France du rugby et qu’on doit rester ainsi (sourire). On n’oubliera pas ça, et ça le fait entrer dans les cinq personnes les plus importantes du club, à côté notamment de Daniel (Herrero). Ce n’est pas anodin, et nos histoires seront viscéralement communes peu importe ce qu’il se passe à l’avenir." Aux yeux des Toulonnais, Laporte sera l’adversaire d’une après-midi, mais un allié d’une vie.
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