Une ossature se dessine pour le Mondial

S’il y a bien une chose qu’on ne peut pas reprocher à Jacques Brunel durant cette tournée, c’est de suivre scrupuleusement son fil conducteur. Il avait annoncé en début de rassemblement sa volonté d’insuffler de la continuité et s’y est tenu. Dans les faits, pas de sanction après la gestion de fin de match catastrophique contre les Springboks (26-29) ni de revue d’effectif pour le dernier test contre les Fidji. Si près du Mondial japonais, ne doit-on pas y voir, si ce n’est l’équipe de départ virtuelle face à l’Argentine le 21 septembre 2019, du moins une solide ossature ?

"Un groupe est en train de se construire, c’est évident, répond Brunel sans ambiguïté. On a beaucoup parlé d’épine dorsale et on essaie de donner aux joueurs cette stabilité et cette confiance pour qu’ils trouvent des repères et que cela permette à l’équipe d’avancer. Il reste peu de matchs et on a toujours dit qu’il fallait que les joueurs vivent et jouent ensemble pour trouver une complicité. On essaie donc de la maintenir même si ces choix sont contraignants car on ne donne pas la possibilité à des joueurs de participer à l’élaboration du projet".

On pense évidemment à Jonathan Danty et Sébastien Bézy, sur aucune feuille de match dans cette tournée, et un peu plus encore à des Chavancy, Pélissié, Vakatawa ou Gourdon, un temps retenu par le sélectionneur des Bleus avant de disparaître des radars. Quant aux absents pour cause de blessure (Parra, Lamerat, Fofana, Ben Arous, Le Roux…), ils savent qu’ils devront cravacher pour réintégrer le bon wagon.

Toutes les grandes nations ont cette continuité et cette confiance renouvelée aux joueurs

À l’inverse, les onze Bleus qui vont enchaîner les trois tests en tant que titulaires (Poirot, Guirado, Maestri, Vahaamahina, Iturria, Lauret, Picamoles, Serin, Lopez, Bastareaud, Thomas) peuvent se dire qu’ils tiennent le bon bout pour aller au Japon. C’est notamment le cas de Baptiste Serin, un temps cinquième dans la hiérarchie des demis de mêlée tricolores (derrière Parra, Machenaud, Dupont et Couilloud) mais satisfaisant en ce mois de novembre : "Toutes les grandes nations ont cette continuité et cette confiance renouvelée aux joueurs, notamment à des postes clés. Quand on regarde les All Blacks, il n’y a quasiment jamais plus de deux changements et souvent sur blessure. C’est très important pour ma part, comme le fait de travailler avec le même ouvreur. Cela permet de se libérer un peu plus, de prendre des initiatives et d’avoir un peu moins peur de faire des erreurs. C’est plus facile de jouer son rugby quand on a la confiance d’un coach".

Plus encore que Serin, Camille Lopez peut estimer qu’il sera, sauf blessure ou Tournoi des 6 Nations apocalyptique, l’ouvreur des Bleus à la Coupe du monde. Sans se croire déjà arrivé, lui aussi savoure la continuité instaurée par Brunel : "C’est forcément une bonne chose car on a peu de temps pour travailler ensemble. Jouer souvent avec la même équipe permet donc de trouver des automatismes. Le fait d’enchaîner donne aussi de la confiance même si cela n’assure en rien une place pour le Tournoi des 6 Nations et encore moins la Coupe du monde". Pour l’épais noyau dur dont il fait partie, cela sent quand même plutôt bon.