Dominici, une vie de Bleus à l'âme

  • XV de France - Christophe Dominici, une vie de Bleus à l'âme
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XV DE FRANCE - Ces derniers mois et au fil de l'hallucinante saga biterroise, on eut, au Midol, le bonheur de côtoyer de plus près Christophe Dominici : on a en garde aujourd'hui le souvenir d'un personnage de roman, un antihéros attachant, excessif, sensible et terriblement fragile...

Alors que Christophe Dominici n'était qu'un enfant, sa mère rendit un jour visite à un medium de l'arrière pays varois. Si celui-ci avertit d'abord madame Dominici de l'imminence d'un drame familial (alors qu'il avait 14 ans, "Domi" perdit en effet sa soeur Pascale dans un accident de la route), le clairvoyant lui annonça aussi que son seul fils avait un don. "Après le décès brutal de ma soeur, écrivait l'ancien ailier international dans son livre (Bleu à l'Ame, éditions du Cherche Midi), ma mère s'était persuadée que ce "don", c'était le rugby. Elle me répétait tous les jours: "Tu seras en équipe de France, mon fils, je te le dis !" Et moi, je lui répondais: "Mais, maman, tu m'as fait nain ! Comment veux-tu que je sois en équipe de France avec mon 1,72 mètre et mes 68 kilos, quand il y a des types qui ont des bras comme des cuisses et des cuisses comme des arbres ?" Ces "types" là, Christophe Dominici les fit pourtant tous passer pour des idiots, lorsqu'il les élimina les uns après les autres d'un crochet intérieur splendide, d'une grimace épatante, d'un pas de danse comme il en fit tant, au fil de trois Coupes du monde et 65 sélections...

Domi ? C'était un film, mazette, un vrai personnage de roman. Il avait, d'abord, cette façon tout à lui de répondre au téléphone : "Allo ninou ! Comment ça va ?" Dans ce "ninou", il y avait toute la prévenance, la douceur, la sensibilité et la fragilité dont il était empli les jours où il baissait la garde, lâchait le combat. Ces derniers mois, on avait ainsi eu le bonheur de côtoyer "Domi" de plus près, au fil de cette hallucinante saga biterroise qui l'avait accaparé corps et âme, une aventure pour laquelle il avait, in fine, laissé jusqu'à sa santé. Alors, on n'a rien oublié du jour où il nous reçut, enthousiaste, bouillonnant même, à son domicile de Boulogne-Billancourt pour présenter ce qu'il appelait alors "le plus beau projet de sa vie", racontant, gestes à l'appui, sa rencontre avec ces franco-emirati que nous pensions alors tout puissants, rêvant de faire de Béziers "le plus grand club d'Europe", s'émerveillant tel un enfant sur l'équipe qu'il s'apprêtait à construire et répétant, aux anges : "Regarde, ninou : Koroibete, Nonu, Taufa... Leurs contrats sont prêts... Ils seront bientôt là".

XV de France - Christophe Dominici, une vie de Bleus à l'âme
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Ce jour-là, "Domi" nous avait aussi présenté ses "amours", ses deux filles Chiara et Mya. Puis il avait pris sur ses genoux un énorme chat de 9 kilos (un Maine Coon appelé Jonah Lomu), allumé une cigarette, servi deux cafés avant de se projeter dans le rôle de "manager ou de président", il ne savait pas encore, qu'il embrasserait bientôt du côté de l'Hérault. "Tout le monde m'appelle, nous disait-il ce matin-là. La famille du rugby se souvient que j'existe et ça fait du bien !". Au fil des rebondissements que connut ensuite la saga biterroise, Christophe Dominici remua ciel et terre pour tenter de renverser, en force, les obstacles qui se dressaient face à lui. Excessif, immodéré, "Domi" s'était ainsi mis dans la tête que les caciques de la Ligue ne voulaient pas de lui dans le rugby pro ; au téléphone, il affirmait qu'"en fermant les portes de Béziers à Dominici, Paul Goze voulait juste se payer Bernard (Laporte)"; une nuit, il l'avait même fait savoir au président de la LNR, lequel reçut quelques textos salés, pour dire le moins, de la part de l'ancien ailier international.

De toute évidence, "Domi" avait mis tellement de lui dans le rachat de l'ASBH que l'issue de la saga, brutale et à ses yeux injuste, le laissa meurtri, blessé et à ce point fatigué qu'il coupa son téléphone durant plusieurs semaines, au terme du feuilleton, pour "reprendre des forces et faire le point", nous disait-il alors. La dernière fois qu'on eut Christophe Dominici au téléphone, c'était donc en septembre 2020 : ce matin-là, "Domi" appelait d'un nouveau numéro, s'excusait de son silence et, mettant à sa façon un terme soudain aux habituelles formules de politesse, promettait aussitôt de repartir au combat "pour Béziers" et les gens qui, là-bas, avaient tant cru en lui.

Passé ce coup de fil, "Domi" s'était alors évaporé. Mais plus longtemps, cette fois-ci. A tel point que la semaine dernière, un de ses amis nous confiait : "Christophe a pris conscience que les investisseurs qu'il avait défendus bec et ongles l'avaient probablement mené en bateau. Il a accusé le coup, repensé à la Facem et à tout un tas de trucs comme ça. Il avait tellement donné, vous savez : sa démarché était pure ; il n'avait menti à personne, lui..." Certains jours, "Domi" était très en colère. D'autres fois, il était totalement éteint. Mardi après-midi, et sans que l'on puisse réellement expliquer les raisons de son geste, Christophe Dominici a finalement choisi de mettre un terme à sa vie, laissant Loretta veuve, Chiara et Mya orphelines et, nous tous, totalement déboussolés par ce dernier crochet. Tu vas horriblement nous manquer, "Domi"... Ciao "ninou", on t'embrasse...

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