Festival Rugbimages : le XV de France jugé par ses anciens capitaines

Par Rugbyrama
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Quelque 250 personnes ont assisté, lundi soir à la Maison des Sports d’Albi, au débat du Festival Rugbimages sur le l'Équipe de France.

A la tribune ont pris place, par ordre d’apparition en équipe de France, quatre anciens capitaines des Bleus : Jean Fabre, Richard Astre, Abdel Benazzi et Fabien Pelous. La (belle) surprise est venue de Gaëlle Hermet, toute jeune (21 ans) capitaine des Bleues qui viennent de réaliser le Grand Chelem. L’équipe du Festival a demandé à Henri Nayrou (ancien "boss" de Midi-Olympique) et à Jean-Pierre Dorian (actuel patron de la rédaction de Sud-Ouest) d’interroger ces personnalités pour tirer le bilan du récent Tournoi des 6 Nations. En voici les temps forts.

Que retenez-vous de ce Tournoi, globalement ?

Gaëlle Hermet : Pour moi, ce capitanat, ce Grand Chelem, c’est tout nouveau. Je ne réalise pas encore. On a construit sur la force du groupe. On s’est surnommé "les affamées". On n’a rien lâché et on est resté humbles.

Abdel Benazzi : L'Équipe de France (masculine) est monté crescendo, même si elle a eu des fins de matches fatales, comme au Pays de Galles. Il y a eu de la continuité dans l’engagement, mais aussi dans le mauvais coaching avec les demis.

Richard Astre : On a remis l’agressivité au cœur du match. Maintenant, il va falloir y apporter la sérénité et la maîtrise.

Jean Fabre : Au niveau comptable, le bilan n’est pas meilleur que l’an dernier, avec trois matches à domicile. L’équipe avait perdu sa confiance et Brunel a bâti une équipe un peu commando. Il faut voir l’opinion que cette équipe avait d’elle-même dans la démesure de son effusion à célébrer la victoire contre les Anglais. On a retrouvé une âme mais les problèmes restent. Toute l’organisation du rugby doit aller dans le sens de l’Équipe de France. Et puis, je voudrais dire aussi que ce qui m’a choqué, c’est de voir le maillot de l’Équipe de France avec une publicité du groupe Altrad (applaudissements)…

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Sur l’éviction de Guy Novès avant le Tournoi

Fabien Pelous : Le connaissant bien, je ne pouvais pas soupçonner que l’équipe soit fade avec Novès. Je ne me l’explique pas. Ce n’est pas le meilleur technicien que j’ai connu mais le meilleur dans son rôle de manager pour mettre les joueurs en condition de tout donner pour l’équipe. Brunel s’est positionné en antithèse. Il est dans la connivence avec les joueurs pour en tirer le meilleur parti. Ça marche aussi.

Benazzi : Avant Novès, l’Équipe de France était sans projet depuis des années. Ç’a été une décision politique de l’écarter. Ça ne remet pas en cause ce qu’a été Guy Novès ni ce qu’il n’a pas eu le temps de construire. C’est lié à la personnalité de Laporte qui réagit parfois vivement comme ça se fait de plus en plus, aussi, dans le Top 14

Fabre : Il ne faut pas comparer les individus. Novès et Brunel sont deux hommes remarquables. Comparons les projets. Avec Novès, on parlait de jeu de mouvement et les joueurs ont oublié le combat. Le drame, c’est comme en Top 14, c’est qu’il faut gagner tout de suite alors qu’il faudrait d’abord bâtir un projet de jeu, prendre les joueurs adaptés à ce projet et laisser le temps au temps… On arrête l’explication de l’échec à l’entraîneur mais il y a tout un système. J’ai toujours mis des doutes dans le maintien de Novès quand Laporte est arrivé. On ne peut pas fonctionner avec un président et un entraîneur qui ne tirent pas dans le même sens. En Afrique du Sud, Novès s’est senti seul, il me l’a dit.

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Le Top 14 affaiblit-il le XV de France ?

Pelous : Sur certains postes oui. Pilier droit, ouverture… On doit plaider tous coupables. On n’a jamais eu un 10 comme joueur emblématique de sa génération. Mais là où on a le plus perdu, c’est dans le leadership des joueurs français. Beaucoup d’étrangers sont les leaders de jeu, de touche, de leur club. A tous les postes on manque de joueurs leaders. Quand on dit qu’on a une équipe fade, sans âme, on dit qu’elle manque de leader.

Astre : Les Blacks ont développé le leadership et les nouveaux arrivants sont entourés par des papas. Entre l’équipe de France et les All Blacks, il y a une grande différence de critères de sélection. Chez les Blacks, on juge d’abord la capacité à s’intégrer au groupe avant de penser aux systèmes de jeu.

Benazzi: On a deux institutions qui ne marchent pas ensemble. En Angleterre, j’y jouais à l’époque, tout a été organisé deux ans avant pour que l’Angleterre soit championne du monde (en 2003). Ils continuent à fonctionner sur ce modèle. En France, il n’y a aucune relation des clubs avec équipe nationale et aucune solidarité entre eux. L’équipe actuelle à la FFR voulait absorber la Ligue à son arrivée…

Pelous : En Angleterre, il y a 12 clubs et environ 450 joueurs pro. En France deux voire trois divisions entre 35 et 40 clubs et environ 1300 pro. Il y a à peu près 200 joueur pro dans les autres nations de l’hémisphère sud, en Irlande ou au Pays de Galles, deux clubs en Ecosse… On n’a pas la même conception du rugby pro que les autres…. Mais en a-t-on les moyens ?

Fabre : Il faut définir une priorité. Si c’est l’équipe de France, il faut s’organiser en conséquence. Ce n’est pas, hélas, ce qu’on a fait en France, quand est arrivé le professionnalisme.

Hermet : Chez les filles, nous n’avons pas ces problèmes. Moi, je suis encore étudiante. On est totalement amateur. Des filles sont sous contrat fédéral à VII. Les Néo-Zélandaises et Anglaises sont déjà pro. Ça viendra chez nous aussi mais je ne sais pas quand. On concilie vie active et sport.

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Brunel a-t-il fait une erreur en sortant Machenaud ?

Astre : Contre l’Irlande, Dupont sort sur commotion et Machenaud revient mais ne tape pas la pénalité qui aurait pu être décisive. A Cardiff, il sort encore et c’est Trinh-Duc qui rate… Alors oui, Machenaud aurait du taper ces deux pénalités. Mais je voudrais débattre sur comment on choisit les joueurs en fonction de leur poste. Pour moi, c’est une aberration que le demi de mêlée bute. Cet arrêt de jeu, c’est l’occasion de donner des consignes, de rassurer les partenaires. On détourne la véritable fonction du demi de mêlée. La force d’un neuf, c’est de voir qu’un pilier boîte. Et en plus s’il rate son tir, il perd sa concentration. Quand on voit des 9 plonger dans regroupement et des gars de 2m qui attendent au large… Ce n’est plus le rugby.

Pelous : Ce qui est sûr c’est qu’on forme nos 9 à être buteur.

Astre : C’est une hérésie ! Dans la culture du rugby français, on a construit des demis transmetteurs qui n’utilisaient jamais le jeu au pied. Les arrières Papillon Lacaze et Pierre Villepreux ont créé le décalage sur les extérieurs. Pour les Français, c’est ça le bien jouer. On a dévalorisé les postes et les demis français ne sont pas des stratèges comme ailleurs.

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Avec qui partir en Tournée ?

Benazzi : Cette tournée est une aberration. Trois tests en Nouvelle-Zélande avec des joueurs lessivés à la fin d’une saison épuisante. On va prendre une raclée. Il faut trouver d’autres solutions. Même s’il y a des retours ce sera compliqué de rivaliser. Je crains les soixante points, on est convalescents. Et après, même le public néo-zélandais y perdra de l’intérêt.

Pelous : Il y a d’autre façon de mener une économie équitable entre Nord et Sud. World Rugby réfléchit à une seule période de Tournée dans l’année en novembre décembre une année sur deux dans chaque hémisphère. Tel qu’il est organisé, le rugby gêne surtout la France, pas trop les autres nations.

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Bastareaud capitaine ?

Pelous : Mathieu a fait un Tournoi de très belle facture sur le plan sportif. Il est entré dans le terrain médiatique par une porte dérobée. Longtemps connoté comme joueur turbulent, seulement physico-physique. En plus en venant de banlieue dans un monde du rugby très traditionnaliste. Il s’est fait sa place désormais.

Benazzi : la meilleure des choses c’est de l’avoir responsabilisé. Le fait d’être capitaine à Toulon, l’a révélé. Tout dépend qui joue à ses côtés, il lui faut un centre complémentaire. Il faut l’encadrer pour qu’il se sente concerné par le projet.

D’autres satisfactions individuelles ?

Benazzi : J’ai beaucoup aimé l'abattage de Camara. Il a 23 ans mais prend des initiatives. Pélissié aussi.

Astre : Vahamina a fait, sur la continuité, des performances de très haut niveau.

Pelous : On a pléthore de talonneurs : Chat, Marchand, Bourgarit… En neuf aussi. Tous avec des profils différents. Et selon qui tu choisis, tu décides de jouer différemment.

Benazzi : Pour en revenir au 10, je pense que Morgan Parra devrait terminer sa carrière en 10.

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Morgan Parra en 10 ?

Astre : Quand ils ont vu que Lièvremont le mettait à l’ouverture pour la finale de 2011, les Néo-Zélandais ont eu très peur, chez eux, de ne pas être champions du monde. Ils l’ont ciblé d’entrée. Je le dis aussi à Jean-Pierre Romeu (Clermont) qu’ils font une erreur de ne pas le mettre à l’ouverture.

Guirado est-il le seul leader ?

Fabre : Il y a des leaders. J’ai vu Trinh-Duc rameuter ses joueurs. Un leader a une action sur le terrain mais aussi en dehors. Le capitaine doit être fédérateur, faire le lien avec l’entraîneur, voire le président.

Pelous : Un leader ça se forme aussi. Plusieurs leaderships sont nécessaires et chacun peut prendre sa partie. Le leadership de soirée est important aussi, avec ou sans modération. Dans notre formation on passe beaucoup de temps dans la salle de musculation et à la répétition de gestes techniques, mais il va falloir en passer dans la formation du leadership. Quitte à rater une passe de temps en temps.

Astre : La difficulté du capitanat c’est dans un match éliminatoire. Il doit veiller à ce que l’extérieur ne vienne pas anéantir ce qu’on a préparé. Le rôle du capitaine est renforcé. Il y a celui qui harangue et celui qui sait calmer. A Béziers, on avait la règle des 3 P : pousser, plaquer, progresser. Des choses simples, au capitaine de les rappeler dans les moments de doute.

Hermet : C’était la première fois que j’étais capitaine avec des joueuses qui ont 50 caps. J’ai été épaulée. Je me sens plus capitaine de jeu. Pas de soirée (rires). Le capitanat c’est un rôle très important dans une équipe. Je le prends à cœur et je compte amener l’équipe le plus loin possible. Le staff m’aide énormément. Et des partenaires sur et en dehors du terrain.

Benazzi : On a senti Guirado lassé, pas respecté. Par moments seul. L’équipe a beaucoup tourné autour de lui ce qui empêche émergence d’autres leaders. On l’a senti en plein doute, après deux ans de défaites. J’ai beaucoup de respect pour lui. On ne peut pas dire qu’il sera capitaine jusqu’en 2019 mais commençons par monter une équipe stable autour de lui.

Pelous : On voit les jeunes. Camara, Dupond se sont affirmés. Une première ligne jeune, à part à droite, un poste où on est en difficulté même chez les jeunes. Mais ailleurs, on en a autant que les autres. On a vanté Itoje comme le meilleur joueur du monde. Qu’est-ce que Camara a de moins que lui. Même en 2e ligne, il aurait la même activité. Il faut être fier de notre formation ! Je veux rester positif, je suis sûr que Guirado va mener cette équipe jusqu’au Mondial 2019. Il y a des signes positifs qui montrent qu’on peut être performant jusqu’à la Coupe du monde.

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Le prochain débat du Festival Rugbimages se déroulera vendredi 23 mars à la Halle aux Grains de Lavaur. Il aura pour thème "le rugby en état de choc" (protocole commotion, règles du plaquage, déblayage…)

Tout le programme du Festival (du 19 au 29 mars) est consultable sur www.rugbimages.com

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