Lamaison: "Remettre en avant le rugby français et l'identité du jeu à la française"

  • Christophe Lamaison, désormais ex meilleur réalisateur de l'histoire du XV de France
    Christophe Lamaison, désormais ex meilleur réalisateur de l'histoire du XV de France
  • "Titou" Lamaison lors de la demi-finale de la Coupe du monde 1999, remportée par les Bleus face à la Nouvelle-Zélande de Jonah Lomu
    "Titou" Lamaison lors de la demi-finale de la Coupe du monde 1999, remportée par les Bleus face à la Nouvelle-Zélande de Jonah Lomu
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Suite et fin de notre entretien avec Christophe Lamaison. L'ancien ouvreur vainqueur de la Coupe d'Europe avec Brive en 1997 et de deux Grand Chelem avec le XV de France en 1997 et 1998 analyse les difficultés du rugby français à faire briller la sélection nationale.

Que pensez vous du niveau de jeu produit XV de France depuis la finale du mondial en 2011?

C.L: On est rentrés dans une époque où tout se fait comptablement donc le résultat n'est pas positif. Maintenant, le niveau de jeu est-il associé à la performance? Dans ce cas, cela veut dire que nous n'avons pas forcément une bonne équipe. Sur le jeu l'équipe de France et son identité, il y aurait en effet quelque chose à redire. L'équipe de France est la vitrine du rugby français et quand je dis cela, j'ai un peu tout dit. Je mets surtout l'accent sur une politique de formation, sur une politique des clubs et le résultat, c'est l'équipe nationale. Aujourd'hui, ce que l'on peut reprocher à l'équipe de France, on peut éventuellement le reprocher aussi aux différents clubs par rapport à la politique de formation. Je pense que le débat se situe plutôt ici que sur le jeu des Bleus. Après, l'équipe de France est une sélection donc tu as toujours tendance à prendre les meilleurs mais les meilleurs aujourd'hui ne sont pas les plus frais, les plus en forme, les plus aptes à rentrer dans un nouveau système de jeu. Et les meilleurs joueurs du moment ne seront pas forcément les mêmes demain. Et la difficulté quand tu es entraineur du XV de France, c'est que tu n'as pas le loisir d'entrainer ton équipe, de la façonner selon tes souhaits. Tu es toujours en train de bricoler et de plus en plus. Maintenant, revoir une politique de formation et revoir peut être les systèmes pour remettre en avant le rugby français et l'identité du jeu à la française, ce serait intéressant d'avoir cette réflexion.

Je regrette qu'il n'y ait pas un championnat où l'on mettrait en avant les meilleurs joueurs français de moins de 23 ans par exemple

Que faudrait-il améliorer dans le rugby français pour que nous ayons une équipe de France très performante à l'image des Anglais, des All-Blacks, des Sud-Africains?

C.L: Je ne suis pas dirigeant! Il y a des personnes qui sont là pour trouver des solutions me semble-t-il. Ce que je peux éventuellement relever, c'est le manque de championnat parallèle entre les comités. Je regrette qu'il n'y ait pas un championnat où l'on mettrait en avant les meilleurs joueurs français de moins de 23 ans du comité ou de la région et que l'on médiatiserait autant que peut l'être la Pro D2 ou la Fédérale 1 par exemple. Cela permettrait d'avoir un œil plus avisé sur nos jeunes joueurs français et qui serait susceptible de postuler, dans un futur proche, à l'équipe de France.

"Titou" Lamaison lors de la demi-finale de la Coupe du monde 1999, remportée par les Bleus face à la Nouvelle-Zélande de Jonah Lomu
"Titou" Lamaison lors de la demi-finale de la Coupe du monde 1999, remportée par les Bleus face à la Nouvelle-Zélande de Jonah Lomu

Selon vous, pourquoi les jeunes talents français ne sont ils pas plus nombreux à jouer en Top 14?

C.L: Je ne sais pas. Quand on parle de politique des clubs, il faudrait plutôt poser la question aux différents dirigeants. Ce dont je m'aperçois surtout, c'est que les joueurs de l'équipe d'Argentine hormis quelques uns qui évoluent dans notre championnat, apparemment le meilleur du monde, préfèrent rester chez eux et privilégient le challenge sportif au financier. Ils ont des salaires beaucoup moins élevés chez eux qu'en France j'imagine mais ils préfèrent jouer le Four-Nations. Dans l'état d'esprit, c'est un signe fort. Après je ne sais pas dans quelles mesures on pourrait copier ce modèle là. De voir l'état d'esprit samedi dernier affiché par les Argentins et cette façon de jouer, j'ai trouvé cela extraordinaire. J'imagine que les présidents des clubs de Top 14 avaient un œil sur ces joueurs et envisagent notamment de les faire revenir mais je ne suis pas certain qu'ils soient d'accord pour faire le voyage. C'est encore une fois une question d'état d'esprit en préférant donner la primeur à une belle compétition plutôt que d'aller chercher un peu plus d'argent. D'autant plus qu'ils vont avoir une franchise pour le Super Rugby car leur championnat n'est pas aussi relevé qu'en Europe. Les Gallois et les Irlandais font globalement la même chose pour préserver leurs meilleures joueurs.

Je suis content que Camille Lopez arrive à ce niveau là

Nous avons de très bons ouvreurs français dans le championnat. Pourquoi est-ce si difficile pour eux de s'imposer et de performer en équipe de France?

C.L: Depuis très peu de temps, on a enfin des joueurs français qui évoluent au poste de demi d'ouverture dans les clubs de Top 14 ce qui n'était pas forcément le cas auparavant. Il y avait beaucoup d'étrangers qui couvraient ce poste et quand on voit cela, ça n'encourage pas les jeunes joueurs français à s'orienter vers ce poste comme c'est le cas pour les piliers droits par exemple. On commence à avoir des jeunes talents. Quand on voit Camille Lopez, on le découvre au plus haut niveau alors qu'il y a encore quelques années, il jouait en Fédérale. Encore une fois, la formation a son importance. Il est passé à travers les mailles pour évoluer et se retrouver où il est. Ce qui veut dire qu'il n'y a pas d'âge pour montrer son talent en tout cas pour le reconnaitre et le faire évoluer. Je suis content qu'un gamin comme ça arrive à ce niveau là. Il a encore une marge de progression et cela met du baume au cœur à des gamins qui peuvent se dire que eux aussi peuvent y parvenir. Je peux aussi prendre les exemples du petit Romain Lonca passé de Hendaye à l'Union Bordeaux-Bègles, de Charles Ollivon de St-Pée-sur-Nivelle à l'Aviron bayonnais et il y en a tant d'autres...C'est une source de motivation supplémentaire pour tous ces jeunes.

Quel est le plus beau souvenir de votre carrière?

C.L: (Long silence) C'est ma carrière! Je ne peux pas en garder un seul souvenir. Comme je disais tout à l'heure, cela fait plus de trente ans que j'ai cette passion là, j'ai fait des rencontres magnifiques. Je peux évidemment citer quelques matchs références mais globalement, c'est d'avoir pu vivre de ma passion durant toutes ces années. Et puis d'avoir eu cette chance inouïe d'être un privilégier par rapport à d'autres. C'est une réponse un peu bateau mais c'est la vérité. Avoir eu cette chance de rencontrer diverses personnes et des mecs supers. Avoir eu la chance de vivre une aventure humaine incroyable, avoir eu la chance de faire le tour du monde..Il y a toujours eu des bons souvenirs.

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