Collazo : "J'ai besoin de joueurs qui jouent pour le club et non à titre individuel"

  • Top 14 - Patrice Collazo (coach de Toulon)
    Top 14 - Patrice Collazo (coach de Toulon)
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TOP 14 - Après sa défaite à Agen, le RCT a connu une semaine "à la Toulonnaise", marquée par les sorties musclées de Mourad Boudjellal dans la presse. En interne, le ton est monté également. Patrice Collazo assure "ça fait du bien à un moment de se dire certaines vérités".

Le manager s'est présenté en conférence de presse, lucide sur la situation, n'épargnant pas ses joueurs, mais en gardant son esprit combatif. Il attend une réaction pour faire honneur à ce maillot Rouge et Noir.

Rugbyrama : Comment s'est passée le retour d'Agen et la semaine ?

Patrice Collazo : Le retour en bus était long. Cela a laissé le temps de bien réfléchir. Lundi, nous avons posé et analysé tout cela. Puis, nous sommes repartis pour préparer la réception de la Section. Mais à un moment, ça fait du bien également de se dire certaines vérités, même si ce n'est pas facile à entendre. Je pense que c'est nécessaire d'arrêter de parler, d'expliquer... il faut dire où on en est. Et surtout, que le rugby reste une histoire d'attitude et d'envie. Agen nous l'a bien montré. Si on ne met pas ça, derrière il n' y a rien.

Avez-vous changé des choses cette semaine ?

P. C. : Je le répète, s'il n'y a pas la dimension mentale, on ne peut rien faire. Sur la première période à Agen, nous n'avons pas envie, tout simplement. Sans cela, on ne peut pas exister dans ce sport. Nous sommes tombés sur une équipe qui avait envie, nous nous n'étions pas invités, même si nous avons fait illusion en seconde mi-temps. Mais notre comportement nous a plombé. Après, il y a des réactions individuelles, sporadiques, mais ce n'est pas une équipe. Nous n'avons pas joué en équipe ni pour ce que nous représentons : le Rugby Club Toulonnais. A partir de là, la sanction est immédiate et sans appel. Ce n'était pas beau à voir.

Nous allons mettre des joueurs que l'on estime capables de représenter le RCT

Quels ont été vos échanges avec les joueurs ?

P. C. : On s'enferme dans une pièce en se regardant dans les yeux et disant ce qu'il en est. Certains acceptent et repartent pour faire mieux, d'autres subissent. Aujourd'hui, avec le staff, nous allons coucher sur la feuilles les joueurs que l'on estime capables de représenter le RCT. Nous allons arrêter de nous mentir, de faire semblant de... J'ai besoin de joueurs qui jouent pour le club et non à titre individuel. Jouer à Toulon, c'est beaucoup d'avantages mais aussi quelques contraintes : qui n'en sont pas d'ailleurs à savoir s'envoyer sur le terrain. C'est la base. Sans ça, on parle de quoi ? Les vérités ne sont pas toujours belles à entendre mais quand on accepte, il faut une réaction derrière. C'est d'ailleurs ce qui me dérange, nous sommes plus dans la réaction que dans l'action. Je ne vais pas mettre des joueurs qui subissent. La saison est avancée avec des équipes qui nous mettent la pression derrière.

Cette équipe semble manquer de caractère, notamment à l'extérieur...

P. C. : À l'extérieur, c'est le baromètre d'une équipe, on voit son caractère, l'envie de vivre et de mourir ensemble. Sans résultats à l'extérieur, la pression à domicile est plus grande, vous ne jouez pas libéré et on remet en question tout chaque week-end, d'autant plus quand on ne met pas les ingrédients nécessaires. L'envie de jouer ensemble sur le terrain n'existe pas trop. Ici, il y a des standards à respecter. A Agen, force est de constater que beaucoup ne sont pas rentrés dans ce quota, après l'équipe n'existe pas. Contre le Stade-Français, beaucoup disent que c'est un miracle, mais nous y croyons pendant 82 minutes, nous donnons une image positive puis nous sommes transparents à Agen sur ce qui nous a fait gagner contre Paris.

Je n'ai pas besoin de déclarations dans la presse. Je m'enferme entre quatre murs avec le joueur et lui dis ce que je pense

Mourad Boudjellal a eu des mots durs pour Julian Savea. Comment allez-vous gérer le joueur ?

P. C. : Julian sera dans le groupe ce week-end (ndlr : il était absent de l’entraînement ouvert à la presse ce jeudi à Mayol). Il n'est pas là car il s’entraîne à Berg (centre d'entraînement). On verra s'il est sur la feuille ou non. Tout le monde attend une réaction, ça fait vendre, le buzz... mais j'ai un match à préparer. Si je considère qu'il peut apporter, il sera dans l'équipe, s'il n'est pas compétitif non. Mais je n'ai pas besoin que l'on me dise ce que je dois faire. Encore heureux que ça ne fonctionne pas comme ça. Le plus important pour moi, reste que l'équipe joue ensemble. Le club est le plus important, avec l'image que l'on va donner aux supporters. Le reste pour moi, ce sont des choses qui font le buzz. Je n'ai pas besoin de déclarations dans la presse. Je m'enferme entre quatre murs avec le joueur et lui dis ce que je pense. Quand un joueur ne joue pas, soit il n'a pas été bon, soit c'est un choix stratégique, soit il est au repos. Ce n'est pas une déclaration qui fait que. Je me base sur des critères sportifs. Après chacun son mode de fonctionnement et sa communication.

Est-ce que ce genre de déclaration ciblant un joueur peut-être positive pour une équipe ?

P. C. : En tant que joueur, je sais comment je réagirais si on me piquait comme ça. Mais chacun réagit comme il veut. Certains diront que c'est violent, d'autres que ça ne leur fait ni chaud ni froid ou encore que ça fait du bien. Julian est un faux problème, c'est collectivement que nous avons failli. Mais sur le match à Agen, à l'exception de deux trois joueurs et le banc qui a apporté quelque chose, le reste est passé au travers.

Quand je parle du club à un joueur, je dois voir quelque chose sur son visage, dans ses yeux

Vous avez insisté sur le caractère et l'envie. Les jeunes montrent cela. Plus tôt dans la saison vous aviez dit être prêt à partir avec les jeunes. Est-ce le moment ?

P. C. : Vous verrez la composition... Il y a quelque chose d'essentiel pour moi. Quand je parle du club à un joueur, je dois voir quelque chose sur son visage, ses yeux. Si je n'ai pas ça, c'est une fin de non recevoir. Je préfère partir avec des joueurs qui ont envie, qui réagissent lorsque je leur parle de Toulon. Le plus dur comme entraîneur, c'est lorsque vous parlez du club et qu'en face il n'y a pas de réaction. Là ça devient compliqué. Je veux des joueurs qui vivent le club pas qui le traversent. Quand on vient ici, comme dans tous les clubs, on enfile un maillot et on représente quelque chose. Il y a un devoir de perpétuer quelque chose par rapport à ceux qui sont passés avant.

Vous avez l'impression d'avoir face à vous des mercenaires ?

P. C. : Dans un club, on trouve ce que l'on veut y mettre. Si un joueur vient et qu'il met le minimum, il est vite démasqué. Un club se vit au quotidien dans les sourires et les coups de gueules. Il peut y avoir des sorties médiatiques comme celles du président, c'est comme ça et encore heureux. Mais si chacun met ce qu'il faut, je ne suis pas certain que la sortie du président est la même. Je peux comprendre la déception des supporters et du président. Le plus important pour moi reste que le RCT retrouve de la fierté, que les supporters se reconnaissent dans l'équipe dès ce week-end. Le reste c'est du vent.

Nous avons parlé des joueurs. Le staff se remet-il également en question ?

P. C. : Comme les joueurs, nous nous remettons en question. Je me remets en question nous vous inquiétez pas, nous travaillons chaque jour pour mettre en place des choses. Si vous me demandez si j'aimerais rentrer sur le terrain : oui, pas longtemps mais ce serait possible. J'ai signé au dernier moment dans un groupe déjà fait. Il y a des joueurs de qualité, certains ont beaucoup à donner à Toulon, d'autres ont déjà beaucoup donné et n'ont plus grand chose à donner. A nous le staff d’insuffler un renouveau. Je ne suis pas le meilleur entraîneur du monde, mais avant de parler de stratégie, de technique, il y a une base au rugby. Si elle n'y est pas, on peut parler pendant deux heures, sortir faire des matchs chaque jour, mais on n'en gagnera pas un.

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