Sinzelle : "La base du rugby, c’est de s’y filer"

Par Rugbyrama
  • Champions Cup - Jérémy Sinzelle (La Rochelle), face à Sale Sharks.
    Champions Cup - Jérémy Sinzelle (La Rochelle), face à Sale Sharks.
Publié le Mis à jour
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TOP 14 - Le trois-quart centre Jérémy Sinzelle fait le point quelques jours après sa prolongation avec La Rochelle jusqu’en 2023 et avant un déplacement à l’UBB périlleux mais alléchant.

Rugbyrama : Jérémy, vous avez prolongé votre contrat jusqu’en 2023 avec le Stade rochelais, pourquoi cette décision ?

Jérémy Sinzelle : J’espère que le projet va être ambitieux pour les saisons à venir et que des nouvelles recrues vont arriver. Après, j’avais un projet personnel qui me tenait à coeur sur l’Ile de Ré, ma femme se sent bien ici donc quand ta vie familiale est bien, tu as envie de rester où tu es.

Vous réalisez, à titre individuel, une première partie de saison très intéressante avec La Rochelle. Est-ce le meilleur début de saison de votre carrière ?

Je ne pense pas. À Paris j’avais fait de bons débuts. Après tout marche à la confiance. On est humains donc automatiquement quand tu sais que les coachs te font confiance, que tu es capable d’enchaîner les performances tous les week-ends, sur le terrain tu es plus libéré.

De temps en temps, il faut se dire les choses

Dans une ancienne interview, vous disiez que le management "stricte" vous convenez mieux malgré le début de votre carrière à Toulon et une expérience difficile avec Bernard Laporte. C’est toujours le cas ?

J’avais 20 ans et je sortais d’un management avec Philippe Saint-André où c’était un peu plus "cool". J’arrivais à enchaîner et Philippe ne me prenait pas trop la tête quand j’étais moins bon alors qu’avec Bernard, tout était carré et il fallait être bon le jour où il te donnait ta chance. Malheureusement, je n’ai pas été performant et c’était ce côté-là : tu n’as pas été bon, tu te fais engueuler à 20 ans, tu viens à peine de commencer et il te tombe dessus. Les réunions elles étaient vraiment dures et je n’étais pas prêt. Aujourd’hui avec plus d’expérience, je le prends différemment. Pour être plus performant tous les week-ends, c’est ce management qui me plaît.

Vous n’avez donc pas mal pris la colère de Jono Gibbes dans les vestiaires après la défaite à domicile contre Glasgow en Champions Cup ?

Ça remet les pendules à l’heure. C’est sûr qu’à force d’arrondir les angles, ce n’est pas top non plus. De temps en temps, il faut se dire les choses. C’est beaucoup plus simple. Il faut toujours faire le premier pas et pointer les choses qui ne vont pas pour pouvoir progresser par la suite. Et c’est sûr que depuis le début de la saison, ça n’a pas été fait et de l’avoir fait après Glasgow à la maison, on a gagné derrière donc il faut s’en servir pour la suite.

Justement la victoire à Glasgow, la première à l’extérieur, n’a-t-elle pas été frustrante pour vous ? Vous ne faisiez pas partie du groupe.

Non, j’étais très content pour le groupe. Ca nous met dans une nouvelle dynamique car gagner à l’extérieur c’est essentiel déjà pour se qualifier et aussi pour créer une bonne ambiance dans l’équipe. Les matches compliqués où tu gagnes à l’extérieur endurcissent le groupe. Et celle-ci est d’autant plus belle que beaucoup de jeunes ont joué. À la sortie, tu gagnes et il n’y a rien à dire, du moins dans l’état d’esprit : irréprochable. C’est top pour les mecs qui ont fait un super boulot.

La Champions Cup c’est terminé (…) À nous d’atteindre un Top 6

Dimanche, c’est l’UBB au Matmut Atlantique. Vous allez affronter peut-être la meilleure équipe de cette première partie de Top 14…

C’est une équipe très très bien organisée. Avec le nouveau coach qui est arrivé, tout est bien huilé donc il faudra répondre présent déjà dans le défi et le combat. À nous d’être aussi bien organisés et de tenir le ballon.

Le groupe semble être en progression constante, également dans le contenu des matches. Mais on sent que c’est aussi une saison de transition avec des joueurs partants. Quelles sont les réelles ambitions du club ?

Maintenant la Coupe d’Europe on ne va pas se mentir c’est terminé. Il reste le championnat. À nous d’essayer d’atteindre un Top 6 pour pouvoir se qualifier et rejouer la Champions Cup, qui est le plus excitant. À nous de nous donner les moyens, pour le groupe, pour tout le monde et de prétendre à quelque chose cette année car je pense qu’on en a les capacités. Mais il va falloir être beaucoup plus rigoureux à l’entraînement et dans les matches.

Personnellement, on vous qualifie souvent de "couteau suisse" de la ligne de trois-quarts. Cette polyvalence vous a-t-elle fait défaut dans votre carrière, on se souvient de votre utilisation à l’ouverture durant la période Collazo-Garbajosa ?

Pas du tout. Je pense que Xavier Garbajosa m’a donné ma chance en jouant numéro 10. Cela a enrichi mon caractère, ça a fait de moi un autre homme et un autre joueur. Je râlais beaucoup et je me plaignais de mes performances mais franchement c’était top. Avec un peu de recul, ça m’a permis de voir le jeu de rugby différemment parce que tu gères clairement 14 mecs autour de toi !

Vous avez gagné partout où vous êtes passé donc c’est une évidence, vous allez gagner aussi avec La Rochelle !

Après c’est un sport collectif, ce n’est pas individuellement qu’on gagne les titres. Le plus important c’est d’avoir un groupe soudé pour prétendre à quelque chose. Si ce n’est pas le cas, on n’y arrivera jamais. La clé est d’arriver à ressouder le groupe et qu’on ait beaucoup plus de complicité entre nous.

Vous disiez notamment que la vie de groupe était le plus important dans le rugby..

Je pense oui. On me parle de défense, d’attaque, de bien jouer au rugby. C’est évident que l’année où on est champion de France avec le Stade français, on jouait très bien et on défendait très bien mais ce qui fait la force, la base de tout, c’était la cohésion qu’on avait entre Français, étrangers, jeunes et vieux. Dès qu’on faisait un truc ensemble, on le faisait tous ensemble.

Cette année à la Rochelle, les jeunes ont pris leurs responsabilités et poussent le groupe vers le haut, il semblerait..

Ça tire le groupe vers le haut. Et ça met un peu de concurrence dans l’équipe et c’est elle qui te rend meilleur. Quand tu n’as pas de concurrence, automatiquement tu te reposes sur tes lauriers. Quand ça pousse derrière, le week-end tu as envie de montrer que tu es là. C’est ce qui manquait un peu depuis que je suis arrivé à La Rochelle et au fur et à mesure, ça commence à venir. Aujourd’hui ce sont les jeunes qui montent et c’est génial mais il faut que ça continue avec un recrutement l’année prochaine qui soit assez performant pour que tout le monde soit en concurrence et un groupe de jeunes aussi qui monte en puissance. Un mélange des deux.

Ce n’est pas parce que tu ne deviens pas international que ta carrière est ratée

Vous n’avez jamais été sélectionné en équipe de France A. Est-ce une déception ?

Non. Le train est clairement passé. Aujourd’hui, on a une double génération champions du monde des moins de 20 ans, il faut s’appuyer dessus. J’ai bientôt 30 ans, clairement un joueur de 30 ans qui n’a aucune sélection ça n’a aucun intérêt. Mais ce n’est pas parce que tu ne deviens pas international que ta carrière est ratée. J’ai eu la chance de jouer en première division tous les week-ends. L’équipe de France c’est un plus. Tu y es, bravo, mais si tu n’y es pas, ce n’est pas raté.

Vous vous êtes souvent considéré comme un joueur avec peu de qualités mais qui donne tout sur le terrain, n’est-ce pas un peu réducteur ?

Peu de qualités c’est sûr, je ne peux plus jouer à l’aile je ne vais pas assez vite. Le jeu au pied, on a vu quand j’ai joué 10, c’était compliqué. (…) Je suis plus passeur-animateur que celui qui va traverser le terrain. J’essaye de jouer le plus juste possible et d’essayer de mettre mes copains dans les bonnes positions et les bons espaces. Après, on fait un sport de combat et je pense que la base du rugby c’est de s’y filer. Être vaillant. Je n’ai pas que des points négatifs mais déjà pour un joueur de rugby, si tu as ce côté, ça y fait beaucoup.

Propos recueillis par Paul Arnould

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