Macalou : "J'avais l'impression d'être une brebis égarée"

  • Sekou Macalou face au Racing 92.
    Sekou Macalou face au Racing 92.
  • Sekou Macalou (France)
    Sekou Macalou (France)
  • Jake Aron Mcintyre (SU Agen) & Sekou Macalou (Stade Français)
    Jake Aron Mcintyre (SU Agen) & Sekou Macalou (Stade Français)
  • Sekou Macalou (Stade Français)
    Sekou Macalou (Stade Français)
  • Sekou Macalou (Stade français) file à l'essai face au Racing 92.
    Sekou Macalou (Stade français) file à l'essai face au Racing 92.
  • Sekou Macalou (Stade Français) vs Castres
    Sekou Macalou (Stade Français) vs Castres
  • Sekou Macalou (Stade Français) vs Toulon
    Sekou Macalou (Stade Français) vs Toulon
  • Sekou Macalou de France durant le test match entre France and Nouvelle-Zélande au Stade des Lumieres le 14 Novembre 2017 à Lyon, France.
    Sekou Macalou de France durant le test match entre France and Nouvelle-Zélande au Stade des Lumieres le 14 Novembre 2017 à Lyon, France.
  • Sekou Macalou (Stade Français)
    Sekou Macalou (Stade Français)
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Décrocher un entretien avec Sekou Macalou ressemble à un parcours du combattant. Le garçon est jeune. On le dit timide et introverti. Il refuse quasi systématiquement tout contact avec les médias. Avant le début du Tournoi des 6 Nations, celui que l’on présente comme l’un des plus grands espoirs au poste de troisième ligne a pourtant accepté de répondre à nos questions.

Une fois la carapace brisée, le jeune international formé à Sarcelles s’est livré, d’une petite voix douce mais avec une grande lucidité, sur un parcours parfois chaotique. Touchant à l’intime, l’entretien aurait dû être publié pendant le Tournoi mais le Parisien a finalement été sanctionné suite à "l’affaire d’Édimbourg", après les deux premiers matchs vécus en tribunes. Nous avons revu Sekou Macalou cette semaine, après un entraînement de son club, le Stade français. L’occasion de terminer cet échange. Tout est dit ou presque, sans faux-semblants. Seul l’épisode écossais reste en suspens…

Midi Olympique : Avant le Tournoi, alors que vous figuriez dans le groupe des 30 français présélectionnés, vous nous aviez confié l’envie de "jouer le plus possible". Finalement, vous n’avez pas été retenu une seule fois… Quel est votre sentiment ?

Sekou Macalou : Je regrette de ne pas avoir pu m’exprimer durant ce Tournoi. J’avais clairement envie de jouer tous les matchs mais ça ne s’est pas passé comme prévu…

Sekou Macalou (France)
Sekou Macalou (France)

Comment avez-vous vécu votre mise à l’écart de l’Équipe de France après l’affaire d’Édimbourg (sept joueurs français ont été entendus par la police écossaise pour une affaire de viol présumé, avant que la plainte ne soit retirée ; ils ont été sanctionnés par la FFR) ?

S. M. : Oui, j’en garde quelques regrets. Mais j’assume les conséquences.

? Voici le groupe des 31 joueurs retenus par le sélectionneur Jacques Brunel et son staff pour défier l'Italie vendredi 23 février à l'@orangevelodrome #FRAITA #soutiensleXV pic.twitter.com/rcpHaK4gfC

— France Rugby (@FranceRugby) February 13, 2018

On dit que vous avez notamment été sanctionné pour ne pas vous être dénoncé à l’instant où la police écossaise vous a confondu avec Yacouba Camara. Alors, vrai ou faux ?

S. M. : Je ne veux pas m’exprimer sur ce sujet. Cela relève de ma vie privée.

La FFR confirme que certains joueurs sont entendus par les autorités Écossaises. Nous sommes en attente de plus d'informations.

— France Rugby (@FranceRugby) February 12, 2018

L’Équipe de France est-elle toujours un objectif ?

S. M. : Oui, évidemment. J’ai clairement envie d’y revenir. Pour cela et avant toutes choses, je dois d’abord me concentrer sur mes performances avec le Stade français. Nous sommes dans une situation délicate, je dois d’abord penser à sauver le club. La suite…

Jake Aron Mcintyre (SU Agen) & Sekou Macalou (Stade Français)
Jake Aron Mcintyre (SU Agen) & Sekou Macalou (Stade Français)

On vous dit timide. Est-ce pour cela que vous fuyez les médias ?

S. M. : Je ne suis pas trop timide mais je ne suis pas du genre à beaucoup parler. Et ça, depuis toujours.

Avant votre première sélection en novembre, votre ancien entraîneur, Gonzalo Quesada, déclarait dans nos colonnes : "Au début, Sékou n’avait pas franchement décidé d’être professionnel dans sa tête. Il faisait preuve d’un manque de concentration lors des séances vidéo, il oubliait des entraînements. Mais entre le gamin que j’ai connu à son arrivée et le joueur que j’ai quitté en fin de saison dernière, il y avait déjà eu une énorme évolution. Il a gagné en maturité et en professionnalisme, même si sa marge de progression est immense. Dès qu’il aura pris pleinement conscience de son potentiel, il sera probablement le meilleur troisième ligne français." Qu’en pensez-vous ?

S. M. : (il sourit) Avec "Gonza", ce fut parfois un peu tendu. Je mettais un peu trop de temps à me replacer lors de certains entraînements, je mettais aussi du temps à comprendre ce qu’on me demandait. Peut-être que tout est arrivé un peu trop vite pour moi… J’ai mis deux ans à assimiler ce que l’on attendait de moi dans le monde professionnel. Aujourd’hui, ça va mieux.

Sekou Macalou (Stade Français)
Sekou Macalou (Stade Français)

Votre côté dilettante vous a-t-il joué des tours ?

S. M. : Oui, un peu. J’ai toujours eu du mal à m’adapter. Quand je suis arrivé au pôle France, j’ai rencontré les mêmes difficultés. À Marcoussis, tout était carré, organisé et pointu. Je n’avais jamais été habitué à ça. Je pensais que tout allait se passer tranquillement, sans problème. Je venais simplement faire du sport, comme lorsque j’allais au Stade Nelson-Mandela à Sarcelles. Je voyais que les autres mecs bossaient comme des dingues, qu’ils voulaient tous devenir professionnels. Moi, j’avais l’impression d’être une brebis égarée. Il m’a fallu quelques mois pour me sentir bien.

Avez-vous le sentiment d’avoir perdu du temps, finalement ?

S. M. : Certainement puisque je ne me suis pas investi comme j’aurais dû le faire ces dernières années.

Est-ce un regret ?

S. M. : Non. J’ai quand même pris du plaisir.

Vous fixez-vous des objectifs pour l’avenir ?

S. M. : Non. Je ne l’ai jamais fait.

Sekou Macalou (Stade français) file à l'essai face au Racing 92.
Sekou Macalou (Stade français) file à l'essai face au Racing 92.

Pourquoi ?

S. M. : Parce que je vis au jour le jour. Tout simplement.

N’avez-vous jamais craint de ne pas réussir à vous installer dans ce monde professionnel ?

S. M. : L’an passé, oui je me suis posé des questions. Je me suis notamment interrogé sur un éventuel changement d’environnement. L’idée m’a traversé l’esprit de changer de club pour aller voir ailleurs si je pouvais m‘épanouir plus facilement. Je me suis même demandé si j’étais vraiment fait pour le sport pro. Finalement, j’ai choisi de rester au Stade français et je ne regrette pas mon choix.

Le fait que Bakary Meité, votre ancien partenaire à Massy, vous ai rejoint au Stade français vous a-t-il fait évoluer ?

S. M. : À Massy, il m’avait vraiment beaucoup aidé. C’est lui qui m’a fait comprendre que je devais me secouer un peu, que je devais me sortir les doigts du… Depuis qu’il est arrivé au Stade français, il ne s’est pas privé de me recadrer parfois.

Pourquoi ressentez-vous encore le besoin d’être "recadré" ?

S. M. : Parce que je peux vite me disperser. Lors des entraînements ou d’une séance vidéo, il m’arrive encore de décrocher.

Sekou Macalou (Stade Français) vs Castres
Sekou Macalou (Stade Français) vs Castres

Comment l’expliquez-vous ?

S. M. : Je suis quelqu’un de très détendu. Jamais stressé.

Même avant de jouer les Blacks pour votre première apparition chez les Bleus, en novembre ?

S. M. : Non, vraiment. J’étais juste content d’être là et de jouer au rugby. Sans prise de tête.

Que ce soit pour passer le permis de conduire ou même pour un rendez-vous avec une fille, vous n’avez donc aucun stress ?

S. M. : Non. Si ça marche tant mieux, sinon tant pis. Je ne vais pas en mourir. Mon éducation est ainsi faite. Mes parents m’ont toujours dit que l’essentiel était de respirer, de manger et d’avoir un toit sur la tête. C’est ma philosophie de vie.

À quoi ressemble votre vie justement, hors du rugby ?

S. M. : Il n’y a rien de particulier à savoir, croyez-moi. Et puis, je préfère rester discret.

Il paraît que vous vivez avec un serpent. Vrai ou faux ?

S. M. : C’est vrai, j’avais très peur des serpents dans ma jeunesse. Mais j’ai voulu en avoir un chez moi. Il n’est pas dangereux. Je lui donne une souris par semaine à manger.

Sekou Macalou (Stade Français) vs Toulon
Sekou Macalou (Stade Français) vs Toulon

Vous avez commencé le rugby à Sarcelles. Quels souvenirs gardez-vous de cette époque ?

S. M. : C’est là où tout a commencé pour moi. J’ai touché mes premiers ballons de rugby en poussins et j’y suis resté jusqu’en cadets. Sarcelles, c’est comme une grande famille. Avec une superbe ambiance. Je n’en garde que de bons souvenirs et je suis vraiment attaché à ce club.

Mais comment êtes-vous venu au rugby ?

S. M. : Notamment grâce au tournoi des écoles qui est organisé tous les ans là-bas. Les entraîneurs m’ont dit que le rugby allait me plaire, ils ne se sont pas trompés. J’ai vite été mordu. J’avais essayé le football et l’athlétisme mais sans vraiment accrocher.

Avec votre pointe de vitesse, vous auriez pu faire carrière aussi en athlétisme…

S. M. : Je n’ai été inscrit à l’athlétisme qu’une année alors ça fait un peu court pour se projeter sur une carrière. C’était surtout de la découverte. Mais, oui, je courais déjà assez vite à l’époque et on m’avait surclassé avec la génération 1994 (il est né en 1995, N.D.L.R.) pour tout ce qui était sprint et vitesse.

Sekou Macalou de France durant le test match entre France and Nouvelle-Zélande au Stade des Lumieres le 14 Novembre 2017 à Lyon, France.
Sekou Macalou de France durant le test match entre France and Nouvelle-Zélande au Stade des Lumieres le 14 Novembre 2017 à Lyon, France.

Depuis, avez-vous travaillé particulièrement cette vitesse ?

S. M. : Non, pas vraiment. J’ai appris quelques techniques de courses mais je n’ai jamais franchement axé mon travail sur la vitesse.

Vous avez longtemps joué à l’aile à vos débuts. Y preniez-vous du plaisir ?

S. M. : Quand j’étais au pôle France, je jouais effectivement ailier. Même chose à mes débuts à Massy avant qu’Olivier Nier (alors entraîneur de Massy) me conseille de passer en troisième ligne. Il m’avait dit qu’en évoluant à ce poste je pourrai jouer avec les seniors, en Fédérale 1. Alors, j’ai dit banco.

Au regard de votre activité sur le terrain, ne vous êtes-vous jamais ennuyé au poste d’ailier ?

S. M. : (Il rit) Je me suis parfois emmerdé, c’est vrai. Les ballons n’arrivaient pas toujours, quelques fois même jamais. Mais j’aimais bien ce poste qui, lors de certains matchs, m’offrait beaucoup d’espaces et la possibilité de jouer des duels.

Vous avez également évolué quelques fois au poste de troisième ligne centre avec le Stade français. N’est-ce pas ce poste qui vous offre le plus de liberté et d’espace ?

S. M. : Si. J’ai beaucoup aimé y jouer même si jouer troisième ligne aile me va bien avec le plan de jeu du Stade français. J’aime ce que l’on me demande de faire.

Sekou Macalou (Stade Français)
Sekou Macalou (Stade Français)

Vous brillez par votre faculté à déchirer les rideaux défensifs mais ne vous manque-t-il pas un peu de technique individuelle pour assurer la continuité du jeu ?

S. M. : C’est vrai. Il me manque encore l’exécution du geste juste, au bon moment. Savoir faire le bon choix et ne pas me précipiter. Il m’arrive encore parfois de ne pas savoir quoi faire avec le ballon. Du coup, je pousse ma course au maximum et je me coupe du soutiens de mes partenaires, au risque de perdre le ballon…

Ce défaut de lecture vous frustre-t-il ?

S. M. : Oui. Mais c’est de ma faute. Parce que je dois travailler un peu plus.

Pour terminer, êtes-vous inquiet de la situation de votre équipe avant de recevoir, ce samedi, le Stade toulousain ?

S. M. : Non. On aborde ce match avec confiance, beaucoup d’envie. Et avec nos armes également. Évidemment, la situation est un peu stressante, comme si nous avions une épée au-dessus de la tête. Nous n’avons pas le droit à l’erreur. Mais je ne suis pas inquiet, nous avons les moyens de gagner.

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