Le ruck, au coeur du jeu. Et de la victoire ?

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Publié le Mis à jour
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TECHNIQUE - En se déplaçant à Leicester, le Racing est face à un immense défi : gagner une demi-finale de Champions Cup en Angleterre. Et si la recette pour gagner peut demeurer un mystère, un ingrédient est nécessaire : gagner la bataille des rucks. Pourquoi, comment ? Eléments de réponse.

Si les traditionnels adages mettent l’accent sur la mêlée et sur la défense, il n’existe pas vraiment de dicton pour témoigner de l’importance cruciale du jeu au sol dans le rugby moderne. Un aspect du jeu déterminant et délicat que le Racing va devoir maitriser pour se donner une chance de remporter ce match.

Vitesse de libération, contrôle du rythme

Inutile de faire de faux mystères et de complexifier à outrance une phase de jeu aussi récurrente. Gagner la bataille des rucks, c’est contrôler le temps. En attaque, impossible de mettre de la vitesse sans maitriser ce secteur souvent oublié. En défense, gagner quelques précieuses secondes c’est offrir du temps à ses coéquipiers pour se redistribuer. Et comme nous avons pu le voir précédemment, contrôler le rythme, c’est contrôler le match. Et par conséquent son issue.

Cette obsession de la vitesse et notamment de la vitesse de libération est l’un des parents pauvres de l’analyse hexagonale. Contrairement à nos voisins irlandais ou des lointaines références sudistes, peu d’entraineurs admettent en faire une priorité, et surtout peu de chiffres apparaissent. A titre d’information, il faut savoir qu’au delà de 5 secondes pour libérer un ballon au niveau international, le ballon est considéré comme "lent". L’Irlande, référence européenne en la matière, affichait un magnifique 2,7 secondes de moyenne en 2014.

L'Irlande maîtrise les sorties de balle rapides
L'Irlande maîtrise les sorties de balle rapides

Alors, certes, nous ne pouvons pas résumer la capacité d’une équipe à faire la différence sur ce simple critère. Mais une corrélation évidente existe entre la capacité d’une formation à dominer ce secteur et ses chances de remporter une victoire. Illustration simple avec la Nouvelle-Zélande, référence mondiale dans sa capacité à ralentir les sorties adverses et à augmenter la vitesse de ses libérations à sa guise ou presque. Exemple encore avec l’Argentine, qui a maitrisé l’Irlande lors de la dernière Coupe du monde en partie grâce à sa capacité à accélérer le jeu sur ses temps forts et à réduire la voilure dans ses temps faibles. Finalement, maitriser les rucks, c’est maitriser le temps. Et comme nous le martelons régulièrement, le temps et l’espace sont les ressources les plus précieuses de notre sport. Pour cela, un seul geste pour l’équipe en possession de la balle : maitriser l’art du déblayage à la perfection.

Le rucks, phase technique ou physique ?

Déblayer… Pour tout vous confesser, j’ai toujours aimé ce geste. Peut-être parce qu’il n’a jamais fait partie de la panoplie idéale du joueur adulé par les foules. Peut-être aussi parce qu’il n’a jamais été apprécié que par ceux qui le réussissent. Enfin, très certainement parce que j’ai toujours eu la plus grande admiration pour le rudoyant pilier, le généreux deuxième ligne, l’âpre et modeste soldat, qui d’un coup d’épaule ventile l’adversaire aventureux. Un geste qui sous-entend de rendre le rugby propre ? Pas vraiment. Car ici, on fait le ménage sans rien laver. Du duel, pur et simple qu’on résume souvent à tort comme un geste purement physique. Faux. Paradoxalement, si le ruck est un geste d’abord physique - voire violent - il faut bien prendre conscience que l’évolution du rugby a su insinuer de la technique partout. Y compris dans la rude et difficile bataille au sol.

Les All Blacks excellent dans les rucks
Les All Blacks excellent dans les rucks

Il serait présomptueux de faire la liste de l’ensemble des informations à prendre en considération dans un temps minimal. Mais le joueur qui déblaye le fait - ou devrait - de manière "intelligente" en répondant à un série de question : s'agit-il d’un ruck ? Suis-je le premier ? Suis-je plus ou moins solide que mon adversaire ? Dois-je viser la zone du ballon ou la zone du joueur ? Et enfin, question ô combien importante : suis-je utile ? De ce questionnement intime (mais pas toujours complet) découle l’attitude à adopter et surtout le geste à faire. Rien de pire qu’un arrière s’empalant dans un ruck défendu par un joueur bien plus solide, d’un monstre arrachant tout sur son passage et s’écroulant dans le camp adverse ou d’un pilier qui vient poser la main sur un ruck déjà conquis.

Face à Leicester, le Racing pourrait aligner quelques spécialistes de l’exercice. D’abord l’illustration parfaite de l’importance de la technique individuelle avec Eddy ben Arous. Mais aussi avec un trop ultra-physique Bernard Le Roux et Wenceslas Lauret, les deux "pénibles", Chris Masoe, le très solide numéro 8. Enfin on soulignera l'importance d'un joueur aux qualités souvent mal appréciées, le géant gallois Luke Charteris, véritable poison dans la zone de rucks. Il résulte de ce geste une multitude de fautes potentielles et un secteur qui se transforme parfois en casse-tête, au sens propre comme au sens figuré.

L’esprit plus important que la règle

Les amoureux de la règle et les défenseurs de l’arbitrage vont bondir, mais c’est parce que ce secteur est presque impossible à régir qu’une forme de tolérance, parfois coupable, s’est installée. Il n’est donc pas rare de voir des abus, des dérives et même des mauvais gestes. La question peut parfois se poser : l’esprit de la règle est-il supérieur à son application ? Difficile de répondre. Mais le danger réside ici. Car face à Leicester, le manque d’intensité sera puni par les Anglais et l’excès d’engagement sanctionné par l’arbitre. Un dilemme. Sans domination nette et véritable dans ce secteur, le Racing ne gagnera pas. A l’inverse, l’indiscipline priverait à coup sur les Franciliens d’un succès sur le terrain des Tigers.

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