Interview de légendes - Jauzion : "En 2010, on s'est soudés au fil des rencontres"

  • ITV de légendes avec Yannick Jauzion.
    ITV de légendes avec Yannick Jauzion.
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TOURNOI DES 6 NATIONS 2022 - Titulaire lors des cinq matchs du dernier grand chelem des Bleus en 2010, le centre tricolore Yannick Jauzion est bien placé pour évoquer ce dernier titre du XV de France. Pour nous, il a accepté d'ouvrir la boîte à souvenirs...

Dans quel contexte entamez-vous ce Tournoi 2010. Aviez-vous senti venir cette belle performance ?

Pas du tout, non. Le Tournoi 2009 ne s'était pas forcément très bien passé (La France s'était classée à la troisième place avec trois victoires et deux défaites, ndlr.). Nous n'étions pas favoris au moment de commencer le Tournoi 2010, loin de là. Ce qui a été assez surprenant en 2010, c'est l'état d'esprit qui s'est créé au sein du groupe, la cohésion qui a pris, au fil des matchs, entre nous. Dès le premier match en Ecosse, on a été au rendez-vous, puis à mesure que les rencontres passaient c'est monté en puissance. On s'est soudés au fil des rencontres. Cela n'avait rien à voir avec les Bleus de cette année où l'on voit qu'il y a vraiment des individualités qui ressortent et portent le groupe. Nous, c'était vraiment un lien fort entre les joueurs, mais il n'y avait pas de facteur X qui faisait des différences énormes. Mais nous n'étions vraiment pas partis pour gagner le Tournoi.

Dès le premier match, vous vous imposez en Ecosse sur le score de 18 à 9. Avez-vous des souvenirs de cette entrée en matière ?

Pas vraiment de l'Ecosse non, je me souviens davantage de notre victoire la semaine suivante contre l'Irlande (33-10, ndlr.). Je me souviens d'un début de match très intense des Irlandais mais on avait réussi à faire le dos rond, et cela avait bien fini pour nous.

Pour le compte de la troisième journée, vous vous déplacez au pays de Galles. Vous gagnez 20-0 à la mi-temps, mais ne l'emportez que 26-20... Avez-vous eu peur ?

Il ne m'en reste que des flashs, mais c'était à l'image de tous les matchs contre le pays de Galles : quand on les laisse revenir dans la rencontre, devant leur public qui les porte, ils deviennent très dangereux. On avait plutôt bien maîtrisé la rencontre, puis on avait géré l'écart au score. Et c'est vrai que cette troisième victoire avait commencé à nous donner des idées pour gagner le Tournoi...

C'est à ce moment que le grand chelem n'est plus un fantasme mais devient une possibilité ?

C'est sûr qu'au fil des matchs, on y croit de plus en plus, tout le monde est galvanisé. Il n'y aplus d'appréhension, moins d'inhibition.

Pour le quatrième match, vous gagnez 46-6 contre l'Italie, mais un petit relâchement en fin de rencontre fait que vous encaissez deux essais et gagnez finalement 46-20...

Effectivement. Le travail était fait, alors on s'est un peu relâchés et il y avait aussi l'envie de se tourner au plus vite vers le dernier match...

C'est drôle car vous étiez en 2010 dans la même situation que les Bleus 2022 : en position de faire le grand chelem avant de recevoir l'Angleterre au Stade de France...

Les Anglais adorent ce genre de matchs. Ils veulent imposer un défi physique, imposer leur jeu... Et puis ils terminaient bien le Tournoi. Forcément, cette défaite à domicile contre l'Irlande leur avait fait mal à la tête (16-20, ndlr.), mais malgré tout ils avaient les moyens d'imposer leur jeu à n'importe qui.

Aviez-vous eu du mal à gérer la pression de cette rencontre ?

Pas spécialement non. En revanche je me souviens que nous avions été surpris par l'intensité des Anglais. Pourtant, on s'y était préparé. Mais ils nous avait quand même surpris. Les Bleus devront gérer ça. J'imagine qu'ils sont prévenus et qu'ils s'y préparent, mais il ne faut pas paniquer.

Est-ce que mentalement, le risque de tout perdre sur le dernier match est dur à porter ?

Les Bleus ne doivent pas ce mettre dans cet état d'esprit. Bien sûr qu'un grand chelem c'est génial. Mais il ne faut pas se laisser aveugler par l'objectif. Il faut aborder le match et le travailler comme un autre. Sinon il ne vont pas jouer leur jeu. Si nous avons gagné en 2010, c'est parce que nous étions sûrs de ce que l'on voulait mettre en place. Je parle sur l'ensemble du Tournoi, car ce dernier match contre les Anglais, s'ils le gagnent, pour moi c'est pareil. Il méritaient quand même la victoire, car nous n'avons pas été très forts. Par contre sur l'ensemble du Tournoi, on méritait ce titre. L'objectif est une chose, mais il faut aborder ce dernier match en restant soi-même. C'est que les Bleus doivent faire.

Vous aviez disputé les cinq matchs au centre, où vous aviez été associé à quatre reprises à Mathieu Bastareaud. Comment fonctionnait votre association ?

Plutôt bien je dois dire, nous étions plutôt solides ! Ca se passait bien. Mathieu en était encore à ses débuts, mais il était dans son rôle et on utilisait à bon escient ses qualités physiques. On s'était organisé en fonction de ça.

Quel message adresseriez-vous aux Bleus ?

Ce que je disais tout à l'heure : soyez vous même ! Qu'ils jouent leur jeu. Certes, il y a la perspective du grand chelem, c'est un peu comme une finale. Mais ils doivent l'aborder simplement, pour être à la hauteur de leur potentiel. Il faut s'engager et vivre ce match à fond. La chance, c'est que les Anglais ne sont pas dans la même situation : ils ne peuvent plus gagner le Tournoi. En ce sens, ce n'est pas vraiment une finale, et les Anglais n'ont aucun intérêt à fermer le jeu. Ca, c'est un bon point pour les Français. Il manque un match référence aux Anglais, donc ils ne vont pas fermer la rencontre.

Avez-vous des souvenirs de la célébration de ce grand chelem ?

Houla... Je ne sais plus du tout. Le match était tard, au Stade de France... Dans ces cas là, on arrive toujours à l'hôtel vers 1 heure ou 2 heures du matin, donc ça raccourcit forcément la soirée ! Nous n'avions pas été reçus à l'Elysée dans les jours suivants... Je pense qu'ils avaient encore l'habitude de gagner les Tournois ! Cette fois, si ça le fait, cela devrait être différent...

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