Ambadiang : "De tels propos de la bouche d'un joueur, c'est inacceptable"

Par Rugbyrama
  • Pro D2 - Christian Ambadiang - Nevers
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Publié le Mis à jour
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PRO D2 - Victime d'insultes racistes lors du match contre Provence Rugby, Christian Ambadiang s'est confié sur les évènements qui se sont déroulés vendredi soir. Interview exclusive :

Racontez-nous les faits ...

On est un peu avant la mi-temps. Il y a un petit accrochage. On essaie de séparer, le joueur vient vers moi, me dit plusieurs insultes puis là j'entends ça ("Je vais te brûler, mangeur de bananes", NDLR). Je préfère ne pas trop m'étaler sur ce moment parce que je préfère attendre d'autres informations qui sortiront dans la semaine. Mais sur le moment, je n'ai pas vraiment réalisé ce qu'il venait de se produire. J'en parle quand même à l'arbitre de touche avec un coéquipier pour savoir s'il a entendu. L'arbitre répond par la négative.

Avez-vous été choqué ?

Il y a toujours eu des insultes dans le rugby. Des propos qui font dégoupiller l'adversaire, c'est monnaie courante dans notre sport. Mais entendre de tels propos de la bouche d'un joueur, c'est inacceptable. D'autant que ce joueur a des coéquipiers de la même couleur de peau que moi. J'avais envie de lui demander : "Est-ce que tu dirais la même chose à tes coéquipiers ?". Je ne pense pas.

En avez-vous parlé avec votre équipe ?

Oui, les joueurs d'abord. À mon président à la fin du match puis à mon entraîneur. Dès qu'il a su, Régis Dumange est allé en discuter avec les responsables de l'équipe adverse. Et notre staff a demandé à ce que ce soit écrit dans le rapport du match.

Et vous, qu'avez-vous fait à la fin du match ?

Je me suis changé et je suis parti dans le bus. C'est en attendant mes coéquipiers que j'ai vraiment saisi l'ampleur de ce qu'il m'avait dit.

Avez-vous eu peur de ne pas être cru par d'autres personnes que votre équipe ?

Non du tout, le joueur est venu me parler à la fin du match, il s'est excusé et a prétexté avoir dit ça dans le feu de l'action sans vraiment y réfléchir. Il n'a pas nié avoir dit la phrase. Et Provence a reconnu les faits dans le communiqué.

Justement, l'avez-vous lu ce communiqué ?

Oui, mais c'est normal j'ai envie de dire. Il n'allait pas nier quelque chose que le joueur a lui-même avoué avoir dit.

Le message sur Instagram est de votre initiative ?

Oui, je voulais dire quelque chose mais pas le soir même. J'allais écrire à chaud et ce n'est pas une bonne chose. J'avais déjà eu une expérience en U19 en Afrique du Sud où, lors d'une bagarre, j'avais réagi sans réfléchir et je m'étais battu. J'avais pris trois mois de suspension. Donc j'ai commencé à rédiger quelque chose le samedi matin mais au moins, j'avais les idées claires.

Avez-vous un ressentiment particulier à l'encontre du joueur de Provence Rugby ?

Non, je suis quelqu'un de gentil au fond. J'aimerais qu'il tire une leçon de ce qu'il s'est produit. Je sais qu'il a une famille et ça m'attristerait que cette erreur affecte sa carrière.

Mais vous comprenez quand même qu'il mérite une sanction ?

Oui, mais c'est pour ça que dans mon cœur, je ne souhaite pas que ce soit la fin de sa carrière. Mais en même temps, je suis conscient qu'il est impossible qu'il n'écope pas d'une sanction.

Pourquoi ne pas avoir divulgué son nom ?

Je ne veux attaquer personne. En écrivant, j'ai pensé à la protection de la personne. J'ai parfois eu des messages dégueulasses d'une personne tiers que je ne souhaite à personne. Je ne voulais pas que la même chose lui arrive à lui à plus grande échelle.

Aviez-vous déjà été confronté au racisme dans le rugby ?

À l'école oui, mais ce n'était jamais vraiment sérieux. Depuis que j'ai commencé à voir une vraie perspective de carrière dans le rugby, je n'ai jamais rien connu de tel. Pour moi le rugby, c'est le combat sur le terrain et la convivialité en 3ème mi-temps où on se sert la main et on boit des coups ensemble.

Est-ce possible de vous voir quitter la pelouse si cela se reproduit à l'avenir ?

J'aimerais et je pourrais le faire. Mais je ne joue pas que pour moi. Je joue pour ma famille qui est loin de moi, où je suis le premier à travailler et à avoir un vrai salaire. Et je joue aussi pour mon équipe.

Propos recueillis par Gauthier BAUDIN

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