Le voyage extraordinaire des derniers "dinosaures"

Par Rugbyrama
  • Colomiers - Béziers le 25/02/2018
    Colomiers - Béziers le 25/02/2018
  • Francois RAMONEDA - 30.10.2011 - Beziers / Narbonne
    Francois RAMONEDA - 30.10.2011 - Beziers / Narbonne
  • Simon Chevtchenko (Béziers)
    Simon Chevtchenko (Béziers)
  • Sabri Gmir (Béziers) - 4 décembre 2015
    Sabri Gmir (Béziers) - 4 décembre 2015
  • Jean Anturville
    Jean Anturville
  • Cedric Bistue
    Cedric Bistue
  • La déception de Simon Chevtchenko (Beziers)
    La déception de Simon Chevtchenko (Beziers)
  • David Aucagne Coach - Beziers
    David Aucagne Coach - Beziers
  • Francois Ramoneda - 18.09.2011 - Beziers
    Francois Ramoneda - 18.09.2011 - Beziers
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Samedi (15 h 15) à Guy-Boniface, l’ASBH défie Mont-de-Marsan dans son antre lors du premier barrage de la journée. Un retour en pleine lumière pour ce club légendaire aux onze Boucliers de Brennus, exclu des phases finales du monde professionnel depuis onze ans (2007, défaite face à Dax en demi-finale de Pro D2).

Une renaissance, qui n’aurait pas été possible sans une folle journée de juin 2011, qui marqua le retour en Pro D2 des Héraultais. François Ramoneda et Simon Chevtchenko, deux survivants de cette époque (avec Sabri Gmir) qui vivront peut-être leur dernier match demain (le premier cité est remplaçant et le second, titulaire), témoignent.

Francois RAMONEDA - 30.10.2011 - Beziers / Narbonne
Francois RAMONEDA - 30.10.2011 - Beziers / Narbonne

Le destin tient parfois à rien. À un drapeau levé par un arbitre de touche courageux, prenant son rôle au sérieux et devenant ainsi, le "Dieu" de tout un peuple et le "diable" aux yeux des vaincus. Nous sommes le 19 juin 2011 à Saint-Vincent-de-Tyrosse, à la dernière minute du match retour de la demi-finale du Trophée Jean-Prat (Fédérale 1). Les locaux accueillent Béziers lors du match d’accession pour le Pro D2 : "Je me souviendrai toujours de ce moment. Je suis descendu des tribunes pour venir au bord du terrain car je ne jouais pas. Nous sommes menés de quatre points (17-13, N.D.L.R.), c’est l’ultime minute et l’arbitre siffle une pénalité contre nous sur nos vingt-deux mètres en face des perches. Si Tyrosse la passe, ils montent en Pro D2 et c’est la fin d’un rêve. Mais l’arbitre de touche avait levé son drapeau pour signaler un mauvais geste au sol à l’arbitre. Et la pénalité est retournée. Je revois alors parfaitement Andrew Mehrtens ramasser le ballon et taper dedans de toutes ses forces pour qu’il aille en tribunes. François (Ramoneda) tombe alors à genou et nous rentrons tous sur le terrain. C’était magique, même si après, on s’était fait un peu agresser (bagarre générale entre supporters des deux équipes)."

Simon Chevtchenko (Béziers)
Simon Chevtchenko (Béziers)

Les yeux pétillants comme au premier jour, Simon Chevtchenko revit ce moment sacré comme s’il y était. Ce jour où Béziers remonte dans le monde professionnel, grâce aux nombres d’essais marqués face à Tyrosse (19-15 pour Béziers à l’aller ; 17-13 pour Tyrosse au retour). Point de départ d’une nouvelle destinée.

Les bus magiques

Attablés au restaurant La Marjolaine, une bonne adresse située en face des majestueuses arènes de Béziers, les deux hommes se remémoraient il y a quelques semaines de cela, ces moments intemporels. François Ramoneda (31 ans) et Simon Chevtchenko (33 ans), sont les derniers témoins de cette époque (avec Sabri Gmir ; Francisco Fernandes portait lui les couleurs de Tyrosse), encore présents dans le groupe biterrois qui affrontera Mont-de-Marsan samedi. Capitaine ce jour-là, le flanker Ramoneda parle de l’euphorie qui a suivi : "Le retour en bus a été mémorable. Je me souviens de l’hérésie du truc : les mecs qui étaient torse nu dans le bus et qui fument des clopes, le Haka de Utu Maninoa face à celui de la légende Andrew Mehrtens, Johnny Howard à poil qui courait de partout… Il y avait trente "gonzes" entassés sur les derniers sièges et personne devant. Nous avions aussi rejoint des bus de supporters sur une aire d’autoroute. Je me souviens des fumigènes, des scènes de liesse et de l’état d’ébriété avancé de chacun."

Sabri Gmir (Béziers) - 4 décembre 2015
Sabri Gmir (Béziers) - 4 décembre 2015

Le centre Chevtchenko prend le relais du récit : "Moi ce qui m’a marqué, c’est quand on a arraché la trappe du bus et qu’on est tous monté sur le toit du bus à notre arrivée au stade de la Méditerranée, où plusieurs fans nous attendaient. À non, ça c’était au retour de la finale à Montauban (gagnée contre Périgueux, 13-6). On avait aussi brisé une vitre du car… C’était fou, à l’image de la fête qui avait suivi. Ce n’est pas le sommet rugbystique de ma carrière, mais humainement, ça l’est largement !"

Jean Anturville
Jean Anturville

Le dernier titre décroché par l’ASBH (sous les ordres de Jean Anturville et Christophe Chollet), qui retrouve alors le monde professionnel au terme d’une phase finale épique : "Je me souviens qu’on avait pris une branlée à Bourg-en-Bresse en quart de finale aller (23-9) et qu’on pensait que c’était terminé, avant de revenir de nulle part au retour (victoire 35-19). Entre les deux matchs, il y avait aussi eu un changement de président au club (Christian Portes laissait la place à Cédric Bistué, toujours en place avec Pierre-olivier Valaize)… C’était un peu chaotique comme parcours", ajoute Ramoneda. La finalité rêvée pour un groupe de potes, majoritairement originaires de Béziers, qui disaient adieu aux joies candides du monde amateur pour découvrir le sérieux du professionnalisme.

Cedric Bistue
Cedric Bistue

Une construction lente mais un espoir sauf

"Moi, j’ai aimé l’évolution des choses. Je trouve que le club s’est structuré en même temps qu’on a appris le professionnalisme : la diététique, la vidéo qu’on ne connaissait pas à l’époque, comme les entraînements structurés… Désormais, nous avons tout au stade. Nous sommes partis d’un rugby de copains et c’est cool de se dire qu’on va laisser le club à ce niveau", poursuit Chevtchenko.

Car les deux compères, qui ont disputé trois cent cinquante-cinq matchs à eux deux avec l’ASBH (212 pour Ramoneda et 143 pour Chevtchenko), raccrocheront leurs crampons à la fin de saison. Mais pas encore… Sept ans après leur folle épopée, ils vont revivre une phase finale avec leur club de cœur. Un cadeau inespéré ? Pas pour le flanker : "J’ai toujours eu l’impression qu’il y avait eu depuis notre remontée, une structuration dans le club. Malgré les nombreux changements d’entraîneurs, l’instabilité économique, le maintien sur tapis vert la première année ; on a toujours su en ressortir du positif. Et il ne faut pas oublier qu’il y a deux ans (en 2016), tu es second à la fin des matchs allers de la phase régulière et que finalement, tu ne te qualifies pas à la fin en t’écroulant (Montauban enlève le bonus offensif à Béziers et le prive de la qualification à la dernière journée). J’y croyais, mais à la vue de notre parcours cette année, je ne pouvais pas l’affirmer. Mais c’est une suite logique de l’évolution du club et du groupe." Le centre confirme : "En novembre, j’avais cette image dans ma tête : tu vas finir ta carrière à Béziers, on sera dixième et il y aura trois mille supporters au stade. Et là, on se qualifie pour les barrages, c’est monstrueux."

La déception de Simon Chevtchenko (Beziers)
La déception de Simon Chevtchenko (Beziers)

Dans un sourire complice, les deux hommes font référence à cette folle remontée de l’ASBH au classement. Avant-dernière à la mi-novembre à cause d’une série de quatre revers, dont deux à domicile (Narbonne et Angoulême), l’équipe semble au bord de l’implosion. Mais le groupe s’est remis en question, sans concession et a ensuite enchaîné quatre succès salvateurs en décembre. Avant la suite que l’on connaît : 77 % de victoires en 2018 et une série de huit matchs sans défaites (7 succès dont 4 consécutifs à l’extérieur), avec notamment des triomphes historiques à Perpignan, Colomiers, Narbonne et Carcassonne…

Tout à gagner à Mont-de-Marsan !

Une remontée fantastique qui ouvre les portes des barrages à Béziers. Une fin de saison en apothéose que les intéressés ont eue peur de rater : "J’ai passé des mois de janvier et février durant lesquels j’étais au plus mal. J’étais cuit complet et rugbystiquement, j’étais nul. Je me dégoûtais moi-même et je me disais : si tu termines ta carrière comme ça, cela va te faire très mal ! Je le voyais arriver gros comme une maison", précise Simon Chevtchenko. "Moi aussi j’ai douté, car j’ai pris trois ou quatre mois de "frigo" avant de réintégrer progressivement l’équipe", note François Ramoneda.

David Aucagne Coach - Beziers
David Aucagne Coach - Beziers

Dimanche dernier, les partants ont été fêtés comme ils le méritent face à Nevers, pour leur dernier match à la Méditerranée. Une sortie, offerte par deux entraîneurs, David Aucagne et David Gérard, ciblés sur l’aspect humain et le respect des anciens, qui n’est plus une fin en soi pour le numéro 12, titulaire samedi à Mont-de-Marsan : "Ce sera très dur chez les Montois face à qui nous avons pris une branlée cette année (43-12). Mais il y a tellement de choses qui nous ont réussies depuis le début à Béziers et aussi tant de choses négatives surmontées, que je me dis vraiment pourquoi ne pas aller loin. Avec notre dynamique actuelle et le parfum des phases finales, pour moi, jouer à l’extérieur ou à domicile c’est pareil ! Maintenant, j’espère donc finir ma carrière à Ernest-Wallon (finale) ! Ma sortie rêvée serait celle-là. Un titre de Fédérale 1 en 2011 et une montée en Top 14 en 2018." Le troisième ligne le reprend au vol : "Oui, mais si ça arrive, ce ne sera pas ta sortie car tu vas signer un an de plus !" Chevtchenko enchaîne : "C’est vrai, si on monte en Top 14, nous faisons une saison de plus à un euro l’année avec François !"

Francois Ramoneda - 18.09.2011 - Beziers
Francois Ramoneda - 18.09.2011 - Beziers

Trêve de plaisanteries, le barrage à Mont-de-Marsan est dans toutes les têtes et Béziers est concentré comme jamais : "Sur un match à l’extérieur, où nous n’avons rien à foutre là et rien à perdre, face à des Montois qui sont eux sous pression, tout est possible. C’est la beauté d’un match de phases finales… Je pense honnêtement qu’on peut battre n’importe qui et à l’inverse, perdre contre n’importe qui. C’est un peu bateau, mais c’est la réalité !", conclut François Ramoneda, remplaçant samedi.

L’histoire de Béziers, un outsider que personne n’attendait et dont tout le monde a "peur" aujourd’hui. Un géant endormi mené par deux de ses plus fidèles soldats samedi, déterminés à prolonger encore un peu le bonheur d’une folle aventure démarrée il y a sept ans de cela. Et dire que tout a commencé suite à un drapeau levé…

? J-1 pour le barrage de PRO D2 opposant le Stade Montois Rugby Pro à l' ASBH Officiel au stade Guy Boniface ! Découvrez la composition biterroise pour ce premier match de #PhasesFinalesProD2 ??
Continuons à écrire notre histoire, tous ensemble ! #AquiEsBesiers #SMRASBH pic.twitter.com/lVcmbuS8MR

— ASBH Officiel (@ASBHOfficiel) April 20, 2018
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