Le temps d'une soirée, Béziers est revenu dans le mythique temple de Sauclières...

Par Maxime Gil
  • Le public du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil
    Le public du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil
  • L'entrée du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil
    L'entrée du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil
  • Pierre, supporter de l'ASBH - Photo : Maxime Gil
    Pierre, supporter de l'ASBH - Photo : Maxime Gil
  • Le public du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil
    Le public du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil
  • Yvon, supporter de Béziers - Photo : Maxime Gil
    Yvon, supporter de Béziers - Photo : Maxime Gil
Publié le Mis à jour
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MATCHES AMICAUX - Vendredi soir, Béziers affrontait Narbonne en amical. Un derby dès la fin juillet, de quoi lancer la saison sous les meilleurs auspices. Mais plus qu’un simple match de préparation, la rencontre s’est déroulée au stade de Sauclières, là où l’AS Biterroise a forgé sa légende dans les années 1970 et 1980. L’espace de quelques heures, les Biterrois ont connu un bond dans le temps...

À l’entrée du stade, devant un portail bleu, ils sont plus de 3000 à brandir leur sésame. Ce n’est qu’un match amical certes, le premier qui plus est, mais d’aucun n’aurait cru un jour tenir à nouveau entre ses mains un billet avec inscrit, côte à côte "AS Béziers Hérault" et "stade de Sauclières". Le ticket n’est plus le même qu’il y a trente ans, c’est sûr. Aujourd’hui, on scanne ces bandes noires pour s’assurer de la validité du titre, bien loin du temps où l’on se contentait de déchirer le morceau de papier en guise d’accès au stade.

Mais le souvenir est bien là. Et l’émotion tout autant. Les retardataires se pressent devant la billetterie, aussi imposante que des meurtrières de château fort. De quoi donner l’ambiance, à l’entrée d’une forteresse qui aura été imprenable bien plus longtemps que le Michelin de Clermont-Ferrand. Entre le 5 janvier 1969 (contre Brive, 0-6) et le 11 octobre 1981 (contre La Voulte, 10-19). Mais c’était un tout autre temps.

L'entrée du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil
L'entrée du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil

Les stigmates du temps

La façade du stade est bien abimée, portant le poids de ses 97 ans d’âge. Et surtout, les stigmates des combats qui se sont déroulés au "Temple de Sauclières". Des stigmates comparables à ceux que pourrait porter Armand Vaquerin, ou visibles aujourd’hui sur d’autres hommes qui ont fait la réputation de ce lieu et de ce club, tels que Michel Palmié ou Alain Estève. Et sans oublier ceux portés par le Sorcier de ce temple : Raoul Barrière. Le détenteur de la potion magique qui a guidé cette équipe 6 fois sur 11 vers le graal, le bouclier de Brennus.

Aux murs, les inscriptions sont presque effacées et l’on ne distingue que deux "Gradins populaires" et "tribune pesage" en lettre épaisses rouges. L’entrée en tribune se fait dans l’angle de l’en-but, entre le virage nord et la tribune principale. Devant le grillage, la vue est imprenable sur tout le stade. Un stade chargé d’histoire. Et au moment de fendre la foule et de s’installer dans la désormais unique tribune homologuée à recevoir du public (bien qu’un virage ait été exceptionnellement ouvert), les échos qui résonnent dans les travées sont similaires : les souvenirs, les souvenirs, les souvenirs… Sauclières vibre pour le rugby, une fois par an, lorsque les finales régionales viennent se jouer dans l’enceinte, posée entre le Canal du Midi et l’Orb. Mais pour Béziers…

Lettre au Temple de #Sauclières avant #ASBHRCNM #PROD2 #Légende #Béziers #Rugby pic.twitter.com/luQ2b84K80

— Rugbiterre (@Rugbiterre) July 27, 2017

Le dimanche 30 avril 1989 a sonné le glas de l’histoire d’amour entre l’AS Biterroise et son stade. Un dernier baroud d’honneur, contre Brive, en huitièmes de finale retour du championnat de France. Devant 7022 spectateurs venus dire au revoir au "Temple", les Biterrois ne vont faire qu’une bouchée des Brivistes (32-6). Le CAB rentre en Corrèze les valises pleines et l’ASB fête dignement son départ, même si l’aventure s’arrêtera en quarts de finale contre Toulon. Désormais, c’est la pelouse du stade de la Méditerranée que les Biterrois foulent.

Émotion et souvenirs

Depuis, aucun match n’a été disputé par une équipe première de l’ASB(H) sur cette pelouse, désormais réservée à l’équipe de football de la ville (National 1). Alors, forcément, au moment de revenir, l’émotion est palpable sur le visage des plus anciens fidèles, qui n’auraient raté pour rien au monde cette rencontre. "C’est magnifique. Moi je venais déjà dans les années 1960. C’est plein de souvenirs. Ça fait un peu de nostalgie, de l’émotion le fait que le club organise cela", témoigne Pierre, supporter de 70 ans, au moment de rentrer dans le stade.

Pierre, supporter de l'ASBH - Photo : Maxime Gil
Pierre, supporter de l'ASBH - Photo : Maxime Gil

En tribune, Christian, du haut de ses 72 printemps, est déjà installé. Pour lui qui était, à l’époque, "aux populaires. Je surveillais les gens qui rentraient gratuitement", ce retour à Sauclières est "une belle pensée parce que moi aussi j’ai joué avec les Juniors et les Cadets". Son premier souvenir en tribune n’est pas très précis temporellement. Mais côté terrain, il n’est pas prêt de l’oublier : "C’était un Béziers - Narbonne où y avait eu un peu de gifles", raconte-t-il en rigolant.

Les drapeaux et banderoles sont de sortie, le rouge et le bleu flotte dans un Sauclières qui se met à vibrer (presque) comme avant lorsque Simon Chevtchenko (capitaine du soir) sort en premier du tunnel de Sauclières pour entrer sur la pelouse. Ça y est, c’est reparti. Béziers est de retour sur sa pelouse. Avant cela, passage obligatoire auprès des anciens du club : "On a été accueilli par Richard Astre et plusieurs autres anciens joueurs nous ont faits un petit discours. C’est normal. Il faut leur rendre tout ce qu’ils ont donné au club", raconte David Gérard, entraîneur des avants de l’ASBH.

Le public du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil
Le public du stade de Sauclières à Béziers - Photo : Maxime Gil

"L’arbitre au canal"

On ne saurait dire si des ondes particulières sont diffusées dans cette antre mais sur terrain, une certaine tension s'installa après un premier essai de l'arrière Daminiani, qui a rappelé à certains les exploits de Jack Cantoni. Plaquages rugueux, chambrages, échauffourées… les ingrédients du derby étaient bien là. Et tel un Béziers - Narbonne des années 70 qui déchaînait les passions, 4 cartons jaunes et 1 carton rouge ont été distribués par M. Bouzac (Languedoc). Match amical ou pas, certains vieux réflexes de l’époque sont naturellement ressortis chez des habitués. "L’arbitre au canal !", a notamment jailli à plusieurs reprise de la tribune. Seule ombre au tableau : les difficultés en mêlées, qui contrastaient avec le rouleau compresseur qu’était l’AS Biterroise.

Si l’ASBH avait le match en main (28-14), le sursaut d’orgueil des Narbonnais en fin de rencontre a permis au RCNM de revenir à 28-28. Mais sur le renvoi, les joueurs de Christian Labit se mettaient à la faute. À 40m face aux poteaux, la décision fut unanime sur le terrain : les trois points. Car l’adage dit "qu’un derby, ça ne se joue pas, ça se gagne". Un choix qui a divisé en tribunes, entre le chauvinisme qui a salué cette décision, à l’inverse de ceux qui prônaient le jeu pour cette rencontre amicale. Iona ne trembla pas (31-28). "On est content d’attaquer sur une victoire. C’était primordial pour la confiance", confiait David Gérard à l’issue de la rencontre.

Yvon, supporter de Béziers - Photo : Maxime Gil
Yvon, supporter de Béziers - Photo : Maxime Gil

Côté supporters, l’opération séduction a marché. Yvon, 77 ans, en était ému. "Ça fait plaisir de revenir à Sauclières. On revoit les anciens, les nouveaux, c’est très bien". À l’avenir, l’opération pourrait être renouvelée. C’est en tout cas la volonté de David Gérard. "J’espère que ce ne sera pas un coup d’essai et qu’on reviendra ici une fois par an. Je pense que ça ferait du bien aux joueurs de rester proches des gens et de l’histoire du club". Sauclières et ses supporters ne demandent que cela. Et pas dans 30 ans.

Reportage de Maxime GIL, envoyé spécial au stade de Sauclières

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