Equipe de France 7: Leçon d'adaptation du XV au VII
En appelant quatre joueurs de Top 14 pour renforcer l'équipe de France pour les championnats d'Europe décisifs sur la route de Rio, le staff des Bleus du VII savait qu'il allait s'ajouter une vaste mission d'adaptation des nouveaux. En accéléré, puisque Rémi Grosso, Romain Martial, Marvin O'Connor et Fulgence Ouedraogo n'ont même pas eu deux semaines. Décryptage des secteurs d'apprentissages.
A peine la phase régulière du championnat terminée, Rémi Grosso, Romain Martial, Marvin O'Connor, et Fulgence Ouedraogo ont débarqué à Marcoussis au surlendemain de la dernière journée de Top 14. Pour se mettre au plus vite dans le bain des Bleus du VII. Rémi Grosso raconte: A notre arrivée, nous étions tous les quatre en récup' et en regardant la séance du matin, on s'est tous dit "merde" !
Si certains d'entre eux y avaient déjà goûté, tous ont découvert une discipline d'athlètes autant que de rugbymen. Et ces quatre renforts de l'équipe de France ne le deviendront pas en un mois et demi. Pourtant, moins de deux semaines après le début de leur intégration, ils disputeront déjà leur première manche du championnat d'Europe, celle de Moscou, ces 6 et 7 juin. Une compétition de six matchs de 14 minutes sur deux jours. Habitués à évoluer au maximum 80 minutes tous les week-ends, ces joueurs venus temporairement du XV, connaissent forcément un grand changement.
Des filières énergétiques à l'opposé
C'est le premier secteur sur lequel ces quatre-là devront s'adapter. Ça nous fait un peu peur, ce sont des efforts qui n'ont rien à voir, concède Romain Martial. Pourtant, le staff tricolore n'a pas insisté sur cette filière énergétique liée au rythme propre au VII. Impossible en deux semaines seulement. D'autant plus dans le contexte compliqué d'une fin de saison, décrypte le préparateur Julien Robineau. On prime plutôt la régénération et la récupération. Pas question de les changer complètement en un laps de temps très court, mais plutôt d'intégrer leurs spécificités au système. Puisque leurs profils ont été sélectionnés pour combler des manques. On avait besoin de la vitesse, de la puissance, et surtout de l'aérien, illustre l'entraîneur Frédéric Pomarel.
Les caractéristiques physiques de la discipline, ils les apprendront au fur et à mesure. Une période plus ou moins longue que chaque joueur venu du XV a connu avant eux. Il faut être capable de gérer, mais pas trop, se remémore Manoël Dall'Igna, venu en 2011 de La Rochelle. Au début, je faisais deux-trois actions puis j'explosais. J'ai commencé à trouver le bon compromis après trois ou quatre tournois. Niveau changement, le contenu des entraînements a néanmoins surpris Grosso : A XV, on fait des séances à rallonge, là on s'entraîne seulement 45 min, mais en courant 5 km.
Des repères visuels différents sur le terrain
S'ils ont beaucoup manipulé le ballon pendant ces quinze jours, c'est aussi pour tenter de modifier leurs automatismes. Ce qu'il faut vite comprendre, c'est la circulation générale, insiste Terry Bouhraoua, dans le rôle d'un conseiller depuis fin mai. A ce jeu, il ne faut pas avoir peur d'être en retard, on peut prendre de la profondeur. C'est ce que les quatre rugbymen de Top 14 doivent donc visualiser, en apportant une dimension supplémentaire à la réflexion sur les terrains. Aval d'O'Connor: Défensivement, il y a énormément d'espaces à couvrir, et à l'inverse il y en a aussi beaucoup en attaque... C'est un juste milieu à trouver.
Le message est passé. J'ai vite compris qu'il fallait être très patient et stratégique, reprend Grosso. A XV, on peut avancer la tête basse. A VII, nous devons être très pointilleux. En intégrant, dans le même temps, le système, autant offensif que défensif, et le projet des Bleus, axé sur le déplacement du ballon dans les couloirs. Une adaptation de plusieurs mois pour Manoël Dall'Igna. L'ancien ailier s'en souvient: Il s'agit de faire basculer nos repères de quinzistes à la vision beaucoup moins serrée du sept, puisque nos coéquipiers sont plus loin de nous. Des points de repères à trouver avec leurs nouveaux camarades de jeu, complète Pomarel. On a essayé de les positionner par rapport à leurs habitudes du XV, mais ensuite, ils se débrouillent. Reboosté, aussi, par ce renforcement, Terry Bouhraoua positive plutôt: C'est compliqué d'avoir de suite les bons réflexes, mais ces quatre-là connaissent le haut-niveau.
Une technique et des postes parfois diamétralement opposés
En outre, Grosso, Martial, O'Connor et Ouedraogo doivent également acquérir un certain nombre de connaissances sur le plan technique. Les longues passes doivent notamment être maîtrisées. Et l'arbitrage n'est pas le même. Plus tatillon, notamment, dans les rucks. Les règles appartiennent au VII, et ce n'est pas évident au départ, reprend Romain Martial. A travers de bonnes séances vidéos, et surtout sur le terrain, les derniers arrivés sont donc, sur certains points, repartis de zéro. En salle, ils ont d'ailleurs eu le droit à une séance sur tatamis pour reprendre les basiques, comme sur le contest où le VII demande une propreté exemplaire. Enfin, les trois grands et puissants que sont Martial, O'Connor et Ouedraogo doivent ajouter de nouvelles combinaisons propres à leur nouveau poste puisque, de par leurs profils, tous joueront devant.
Romain Martial en rigole: Ça nous a fait bizarre, la première fois, quand on nous a dit "allez les gros, on fait des touches " ! Même si ça ne chahute qu'un peu, on n'a pas l'habitude de ces positions. On sera peut-être plus compréhensifs en revenant en club. Bien aidé par les cadres du groupe bleu, Rémi Grosso reprend avec sérieux: Il nous faut apprendre à lifter et à retenir les combinaisons, même s'ils nous ont bien épuré la chose.
L'entraîneur des Bleus coupe: Mais ils comprennent vite. Les leçons sont limités, mais le staff a pu aller plus loin que prévu. Dans l'ensemble, la liste des compétences à acquérir est longue. On ne devient pas joueur de VII du jour au lendemain. Les erreurs sont indispensables pour apprendre. Le staff de l'équipe de France le sait, et aura un boulot encore plus important dans le coaching sur la route des Jeux. Ces quatre-là, eux, ont en tout cas hâte de franchir une étape dans le grand bain européen. Les progrès devraient suivre.
J'ai déjà un compte
Je me connecteSouhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?