Ouverture du procès Laporte-Altrad : la défense demande des pièces supplémentaires

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PROCÈS LAPORTE-ALTRAD - Le "procès Laporte-Altrad" s’est ouvert ce mercredi après-midi au tribunal correctionnel de Paris. Mais la défense des cinq prévenus, qui exige d’avoir accès à des pièces du dossier dont elle a été privée jusqu’ici, a demandé au tribunal le renvoi en nullité de l’audience. Voici pourquoi…

Au tribunal correctionnel de Paris, vaste paquebot flambant neuf niché dans l’Ouest de la capitale, la salle d’audience 212 est juchée au deuxième étage. S’y serrent aujourd’hui une vingtaine de journalistes issus de tous les horizons, des magistrats, les victimes supposées (l’association Anticor, la Ligue Nationale de Rugby, la FFR, l’Urssaf Languedoc-Roussillon), un témoin (le directeur général de la FFR Laurent Gabannini), une poignée d’avocats ainsi que les cinq prévenus de l’affaire qui nous occupe : Bernard Laporte, Mohed Altrad, Serge Simon, Claude Atcher et son ancien bras droit à la société Score XV, Benoit Rover.

C’est donc là que s’est ouvert, merrcredi après-midi, ce qu’il est convenu d’appeler le procès Laporte et qui s’achèvera (en théorie) le 22 septembre prochain. Aux prémices de l’audience, la présidente Rose-Marie Hunault demandait d’abord aux cinq prévenus, tous acteurs majeurs du rugby français et international, de confirmer leur identité, avant de longuement présenter les chefs d’accusation aux uns et aux autres : "recel d’abus de biens sociaux" pour Claude Atcher, "corruption passive" pour Bernard Laporte, "prise illégale d’intérêts" pour Serge Simon ou "trafic d’influence actif" pour Mohed Altrad. C’est alors que survint le premier coup de théâtre de l’audience.

Le PNF a-t-il été approximatif ?

A la suite des présentations d’usage, les avocats de Claude Atcher et Benoit Rover formulèrent donc une première demande d’annulation des citations de leurs deux clients. "Madame la présidente, disait maître Celine Lasek, je vous demande d’annuler purement et simlement la convocation de Claude Atcher. Pourquoi il est poursuivi ? Quels sont les faits lui étant reprochés ? J’ai passé des jours à faire des calculs mais la somme avancée par le parquet national financier (de 80 400 euros, relative à une "prime sans cause" versée par la FFR, N.D.L.R.) ne correspond à rien. On reproche aussi à mon client des frais personnels "non prévus" : mais combien de frais, au juste ? Et non prévus par quoi ou par qui ? Quand on cite quelqu’un à la barre d’un tribunal, la citation doit avoir la précision de la lame d’un couteau et ce n’est pas le cas". Brice Grazzini, l’avocat de Benoît Rover, appuyait ainsi le renvoi de l’audience. "Comment peut-on, après quatre ans d’enquête, rédiger des poursuites aussi incompréhensibles ?"

Mis dans les cordes par les avocats de la défense, François-Xavier Dulin, le procureur de la république financier en charge de l’enquête, contre-attaquait aussitôt : "Avec Score XV (la société de Claude Atcher et Benoit Rover), on n’a jamais rien et on ne sait jamais rien ! Il n’y a aucune déclaration fiscale ou sociale (en 2016 et 2017, N.D.L.R.), rien ! Cette société est un fantôme et ce n’est pas possible dans un système déclaratif comme la France ! Vous m’interrogez à présent sur les frais soumis au reproche ? Je vous réponds ceci : toute la vie de M. Atcher est prise par la société Score XV : la crèche, le loyer et le reste... Score XV et Claude Atcher, c’est la même poche !"

La défense exige "les fadettes"

Unis face à une accusation constituée de deux magistrats du Parquet National Financier, les dix avocats de la défense s’étonnaient alors de ne pas avoir eu accès à certaines pièces du dossier. En réalité, il était ici question de fadettes (relevés détaillés des communications téléphoniques, N.DL.R.) sur lesquelles s’étaient appuyés les policiers de la BRDE (Brigade de Répression de la Délinquance Economique) pour avancer dans leurs recherches. Antoine Vey, l’avocat de Mohed Altrad, expliquait : "Je demande de pouvoir accéder aux fadettes qui ont permis aux enquêteurs d’avancer dans leur enquête. Nous n’avons eu jusque-là accès qu’à un tableau Excel n’ayant aucune valeur".

Puis s’adressant au vice-procureur François-Xavier Dulin : "Vous renvoyez au tribunal les gens sur des données que vous n’avez pas vues". Ce à quoi ajoutait Fanny Colin, l’une des avocates de Bernard Laporte : "Si ces fadettes n’existent pas, nous demanderons la nullité des procès verbaux s’appuyant sur celles-ci. Le tableau et le logiciel dont parle le parquet financier ne suffisent pas. Nous voulons les données brutes, voilà tout". Après avoir délibéré une heure durant, la présidente Rose-Marie Hunault décidait de suspendre l’audience aux abords de 18 heures, donnait rendez-vous aux prévenus le lendemain (13h30) pour la poursuite des débats, tout en demandant au parquet national financier de fournir au plus vite les fadettes en question au dossier.

Mais qu’adviendrait-il si celles-ci n’étaient in fine pas fournies ? Les procès verbaux s’appuyant sur des communications entre les prévenus seraient possiblement retirés de la procédure et avec eux, ce serait tout le pan consacré au volet de la commission de discipline (Bernard Laporte est soupçonné d’avoir fait pression sur celle-ci pour favoriser Montpellier et Mohed Altrad) qui s’écroulerait avec. Le procès pourrait-il être renvoyé dans son intégralité ? Impossible à dire à l’heure actuelle. Mais une chose est sûre : ces débats s’annoncent acharnés, longs et complexes…

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