Atcher : "Faire de la Coupe du monde 2023 une grande fête"

  • Claude Atcher France 2023
    Claude Atcher France 2023
Publié le Mis à jour
Partager :

C’est jeudi à Paris, dans une salle du cossu immeuble situé au 5, avenue du Coq, où France 2023 a établi son QG, que le directeur du comité d’organisation de la prochaine Coupe du monde avait convié la presse. L’occasion pour lui de faire un tour d’horizon avant que les poules ne soient dévoilées ce lundi, à partir de 12h30.

Qu’attendez-vous du tirage au sort ?

C’est un moment important, l’acte fondateur de la Coupe du monde sur le plan du programme sportif puisque nous connaîtrons les oppositions dans les quatre poules. Cela va nous permettre de prendre un mois, un mois et demi, pour finaliser le calendrier et notamment l’identification des matchs dans chacune des villes. Nous rentrons sur le terrain, nous rentrons dans le match. C’est le coup d’envoi et c’est d’ailleurs le président de la République qui va souhaiter la bienvenue au monde. Je ne dis pas que ce qui s’est passé avant n’était pas important mais c’est l’occasion pour nous de faire la promesse que dans trois ans, nous allons faire de cet événement une grande fête, avec du partage et des stades pleins. On doit pouvoir aller au stade avec ses potes, boire des bières, sortir de ce moment particulièrement pénible que nous connaissons aujourd’hui.

Justement, quel est l’impact du Covid-19 sur votre feuille de route ?

Nous avons beaucoup de pudeur à nous plaindre parce que très franchement, nous avons une bonne temporalité. Quand je vois les événements qui auraient dû se dérouler en 2020 et 2021... Des fois on nous dit : "Est-ce que vous êtes sûrs que nous serons sortis de la crise en 2023 ?" Si ce n’est pas le cas, je pense que nous aurons d’autres problèmes à régler que ceux de la Coupe du monde. Nous allons donc partir du principe que nous en serons sortis et que ce sera le premier grand événement sportif international en France de l’après Covid-19.

Comment avez-vous fait pour optimiser votre travail pendant cette crise ?

Nous avons "profité" de cette période pour travailler des sujets de fond. Nous avons fait une revue complète du cahier des charges de chacun des projets avec la fédération internationale. Nous avons fait une revue budgétaire assez complète qui nous a permis à la fois de gérer le risque d’une diminution des recettes, en diminuant de 20 % le prix des billets sur les matchs les moins attractifs. Nous savons que nous avons entre 12 et 16 matchs où nous allons vendre les billets sans aucun problème et une vingtaine ou trentaine où ce sera plus difficile. Et nous avons baissé notre jauge prévisionnelle de remplissage de 94 % à 90 %. Ce qui mathématiquement nous a fait diminuer de 38 M€ les prévisions de recettes au niveau de la billetterie même si ce sera peut-être revu. Parallèlement, nous avons réduit les dépenses de 17 millions sans diminuer l’ambition ni la qualité.

En dehors de ce point précis, nous n’avons pas d’impact négatif. Tout le monde est en télétravail, chacun a sa feuille de route sur son projet. Le planning est en ligne, il n’y a pas de retard. Le tirage au sort en est un exemple, nous nous sommes battus avec la fédération internationale pour le maintenir. Malheureusement, si nous avions accepté qu’il soit un peu décalé, la France serait dans le premier chapeau (rires). Mais personne n’y peut rien et si nous nous voulons être champions du monde, il faudra battre tout le monde.

Ressentez-vous déjà de l’engouement autour de l’événement ou est-il encore trop tôt ?

En France, la notoriété de la Coupe du monde n’est pas encore au niveau où nous souhaiterions qu’elle soit mais il faut considérer que nous avons travaillé deux ans sur les fondations, l’ambition, la vision. Et nous avons le Covid-19 qui nous suit qui est anthropophage (sic) en matière d’espace et de communication. Après, nous savons que la Coupe du monde est un événement qui va mobiliser, qui va intéresser. A nous de continuer à bien travailler pour faire en sorte que nous allions au bout de nos objectifs. Mais nous sentons dans pas mal de domaines que l’événement, par son positionnement, sa vision et son ambition a accroché beaucoup d’intérêt.

Comment fonctionne le comité d’organisation ?

C’est un Groupement d’intérêt public, donc avec une mission d’intérêt général. Il n’y a pas un euros d’argent public qui est destiné à la Coupe du monde. Nous n’avons pas de subventions ni de soutien de l’État sur le plan financier. C’est un événement vertueux qui se doit d’équilibrer ses dépenses grâce à ses recettes. L’ensemble des bénéfices doit être réinvesti dans le développement du rugby et du sport en général.

La France a déjà organisé une Coupe du monde en 2007, quelles seront les différences ?

Je le répète souvent, aujourd’hui, un événement doit être accepté par le grand public. En 2007, nous nous étions beaucoup moins préoccupés de l’environnement sociétal de manière générale même si cela avait été un des premiers événements sportifs à se pencher sur la lutte contre le réchauffement climatique. Mais cela restait assez marginal. Là, nous nous sommes dit dès le départ qu’il fallait construire un événement qui soit responsable et exemplaire. Il faut que nous démontrions un impact positif sur un plan social, économique, mais aussi sur celui du rugby, des territoires, des collectivités. Nous n’avons pas délaissé la partie organisation car elle est capitale mais nous avons consacré beaucoup d’énergie à trouver le positionnement qui nous permette que la Coupe du monde soit acceptée, que cet événement ait un impact positif et pour démontrer aussi que nous sommes dans une phase de transition en matière de modèle de grands événements sportifs. Aujourd’hui, l’impact sociétal et environnemental doit être au moins aussi important que l’impact sportif et économique. Si nous n’avons pas compris ça, nous sommes à côté de la plaque.

Dans le détail, sur quoi travaillez-vous ?

Nous voulons construire des marchés agricoles autour des stades. Aujourd’hui, que ce soit dans un stade de rugby ou de football, vous allez manger un hot dog avec du pain et une saucisse en plastique, et de la moutarde américaine. Nous, nous allons proposer du pain traditionnel, du jambon de pays et des cornichons. Et nous permettrons aux agriculteurs de promouvoir leurs produits dans les stades. Tous les menus, des hospitalités à la restauration grand public autour des stades, seront signés par les grands chefs. Et cela n’aura pas d’impact sur le coût, où alors de manière marginale.

Et sur le plan environnemental ?

Nous allons travailler sur des plans de mobilité extrêmement propres. L’idée est qu’a minima 80 % des transports le soient. Avec les collectivités, nous allons essayer de construire des voies d’accès et des parcs pour les vélos autour des stades. Nous allons aussi proposer un partenariat avec les régions pour des modes de transports à 1€ afin que les gens puissent prendre le train, entre Agen et Toulouse ou Bordeaux par exemple, pour aller voir un match. Nous construisons avec la SNCF des programmes qui vont permettre des trains spéciaux.

Les joueurs seront-ils accessibles ?

Nous avons un grand projet : celui de les remettre au contact des fans. Aujourd'hui, nous nous apercevons que ce lien a quand même été un peu distendu. Nous avons malheureusement pris les mauvaises habitudes du football et nous voyons des joueurs avec des casques audios, ils arrivent au stade avec leurs casques audios, vont s’échauffer avec leurs casques audios, sortent du stade avec leurs casques audios, remontent dans le bus et retournent escortés par les motards à leur hôtel, où ils sont enfermés. Ce n’est pas comme ça que nous voyons l’état d’esprit du rugby. J’ai eu une réunion mardi avec les managers et je leur ai dit que c’était un des enjeux majeurs de l’exemplarité de cette Coupe du monde. Il faut que nous remettions en place ce lien, cette proximité, entre les joueurs et le public. Et j’ai un grand projet : déposer les joueurs à l’extérieur des stades. Je n’ai rien inventé mais ce sera la première fois sur un grand événement sportif international. Vous allez à Twickenham, les joueurs font 80, 100 m au milieu des fans et des spectateurs. Et cela peut s’organiser sans problème. C’est fondamental. La proximité des joueurs avec le public, c’est ce qui fait la valeur de ce sport.

Quoi d’autre ?

Les équipes vont séjourner en camp de base pendant un mois et j’ai également dit aux managers que je voulais qu’elles aillent dans les clubs, ouvrent les entraînements au grand public, rencontrent les gamins dans les écoles, parlent de leur culture, soient immergées dans une culture régionale et partagent cette expérience avec les habitants de la ville ou de la région dans laquelle elles doivent séjourner. J’ai reçu un accueil extrêmement favorable des managers qui sont conscients qu’il faut sortir de cet espèce d’enfermement dans lequel on met les joueurs où on dit : "Surtout, on n’y touche pas, ils ne doivent voir personne parce qu’ils doivent être concentrés, mettre des coups de tête dans les murs." C’est fini, il faut que l’on en sorte. Je veux aussi changer la sortie des joueurs sur le terrain. On ne les voit qu’au bout du tunnel, avec des flammes et de la fumée tout sauf écolo. Donc nous allons essayer d’éviter si nous pouvons en trouvant un moyen de faire sortir les joueurs au milieu de la foule, et au moins au milieu de gamins que nous allons sélectionner pour qu’ils accompagnent les joueurs dès la sortie des vestiaires. Parce que je crois qu’il faut recréer ce lien et rescénariser de façon partagée la sortie des joueurs sur un terrain qui est un moment important.

Comment seront choisies les villes qui accueilleront les matchs de l’équipe de France ?

Le premier critère, c’est qu’elle va jouer dans quatre stades. Si nous voulons faire la promotion de l’événement, c’est notre intérêt de la déplacer. Ensuite, les critères budgétaires en matière de potentiel de recettes seront associés à la jauge des stades. Nous savons qu’elle jouera son premier match au Stade de France, c’est la règle. Et potentiellement, en fonction de ses adversaires après le tirage au sort, elle jouera au moins deux de ses matchs dans des stades à forte capacité. Après, je vous laisse les identifier (sourire).

Comment allez-vous procéder aux attributions ?

Il y aura un principe d’équité. Dans chaque ville vont se jouer au minimum un ou deux matchs concernant les équipes parmi les 10 premières du classement mondial. Nous voulons des affiches dans chacun des stades. Et puis il y a d’autres critères, comme la proximité de l’Italie avec Nice, la volonté des Celtes de jouer à Nantes, des Irlandais à Bordeaux ou des Écossais à Saint-Étienne. Nous publierons tout ça fin février, trois semaines avant le lancement de la billetterie.

Revenons-en au tirage : sur quelle équipe du premier chapeau aimeriez-vous tomber ?

La Nouvelle-Zélande parce qu’elle nous a toujours réussi en Coupe du monde. Nous l’avons plus souvent battue (si les Bleus ont enregistré deux succès de prestige, en 1999 et 2007, ils ont toutefois perdu à cinq autres reprises face aux Blacks, dont les finales 1989 et 2011, NDLR). Le fait de l’avoir en poule, c’est la garantie de ne pas la retrouver avant la finale. Et ensuite, même si je sais que le staff ne l’acceptera pas, je rêve d’un match d’ouverture France – Nouvelle-Zélande pour lancer la Coupe du monde. Ce serait le match idéal. Nous devons discuter avec lui pour trouver un équilibre entre la valeur et le niveau du match, et le risque pour l’équipe de France. Mais en 2007, c’est le staff qui avait choisi l’Argentine et nous avons vu ce qu’il s’était passé (12-17, NDLR). Nous aurions peut-être mieux fait de prendre l’Irlande. Si nous voulons être champions du monde, il faudra battre tout le monde. Et regardez les Sud-Africains l’an dernier, ils ont perdu un match contre les Néo-Zélandais et ils finissent champions du monde. Ce n’est pas rédhibitoire de perdre un match en poule et parfois, c’est plus avantageux que de finir premier.

Et quelle serait votre finale idéale ?

Il y en a trois finales : France – Nouvelle-Zélande, France – Angleterre parce que c’est la guerre de 100 ans qui recommence et France – Afrique du Sud parce qu’ils sont champions du monde.

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?