L'altitude, à quoi bon ?

Ce n’est pas pour rien que Julien Deloire accompagnait Philippe Saint-André lors de la conférence de presse marquant le coup d’envoi du stage des Bleus à Tignes. Pendant onze jours, c’est lui qui va avoir le plus de travail car comme l’a rappelé le sélectionneur, 70% du boulot sera axé sur la préparation physique. Ce stage est véritablement notre premier poumon. On avait dix jours à Marcoussis pour préparer les joueurs et avoir un groupe homogène ayant la capacité à encaisser les charges de travail. Les matchs de préparation seront notre deuxième poumon. On lance vraiment le dur du dur, dit-il.

Les joueurs disponibles 24 heures sur 24

Celui qui a travaillé au tout début de sa carrière au Stade toulousain, avant d’intégrer en 2005 le Centre national du rugby (CNR) et la Direction technique nationale (DTN), a cette préparation dans la tête depuis fort longtemps. La première fois que j’ai parlé de la Coupe du monde à Philippe (Saint-André) c’est le jour où l’on s’est rencontré. Le projet de préparation germe dès lors qu’un staff naît et c’est en ce moment qu’il peut mettre en place les directives du sélectionneur. Lui qui a fait une partie de ses études en Nouvelle-Zélande, pour se rapprocher du rugby, avoue qu’il faut être un peu schizophrène pour faire ce métier. Pendant trois ans et demi on doit se contenter de préparer des joueurs à cinq jours et l’on est plus dans la réaction que dans la préparation. Là, on a une vrai réflexion de staff par rapport à un bon de commande et l’on bâti, c’est de la construction.

Il insiste beaucoup sur la récupération qu’il qualifie de travail caché. Accorder du temps à la récupération est aussi important que d’accorder du temps au travail, explique celui qui a vécu le 19 mai 2015 comme un déclic, car on sait que l’on va devoir centrer sur 36 individus. À Tignes, les joueurs sont désormais à sa disposition 24 heures sur 24 sachant qu’ils vont souffrir étant donné que l’altitude rend les exercices plus difficiles

Forcer le muscle à puiser l'oxygène, pour qu'il s'en souvienne

Il est le premier à le reconnaître, l’effet de l’altitude sur une préparation physique n’est pas une science exacte. On a vu aussi des grosses contre-performances et des gros coups de moins bien donc on a validé ce que l’on voulait faire pour ne pas partir dans l’inconnu mais avec des certitudes, révèle t-il. Il y a un an, les jeunes du Pôle France ont servi d’expérimentation. Il confie que l’on a pleinement rodé ce stage et l’on a pu gommer certaines erreurs que l’on a rencontrées pour valider les modalités d’entraînement.

Concrètement, les joueurs travaillent la résistance musculaire pour poser les bases du travail de force et de puissance qui sera entamé début aout. L’air est appauvrie en oxygène donc le muscle doit se forcer à puiser le peu d’oxygène qu’il trouve dans le sang. On sait que l’effet mémoire que l’on aura donné au muscle reviendra dans des conditions plus proches de la normale, justifie t-il. Ce travail sera ainsi agrémenté de quelques piqures de rappel qui doivent permettre de tenir au moins jusqu’à la fin du mois d’octobre…