Lièvremont : "Chaque instant compte"

Par Rugbyrama
  • Marc LIEVREMONT - 11.05.2011
    Marc LIEVREMONT - 11.05.2011
Publié le Mis à jour
Partager :

Marc Lièvremont, au deuxième jour du rassemblement des Bleus à Marcoussis, promet un XV de France compétitif et accessible lors la Coupe du monde. Le sélectionneur, en marge de la présentation du dispositif de TF1, a fait le tour des dossiers chauds avec quelques journalistes, dont nous étions.

Marc Lièvremont, la préparation pour la Coupe du monde vient de débuter. Est-ce que le plus important se joue maintenant ?

Marc LIEVREMONT: Je ne dirais pas que c'est le plus important, mais chaque instant compte. C'est le moment où le groupe doit se former. J'en ai jouée une (en 1999, NDLR) et je sais qu'il ne faut pas galvauder ces premiers jours. Nous en sommes aux tâtonnements, on réapprend à se découvrir. Je sais qu'on se souvient aussi de ces moments de vie, qui comptent autant que le reste. Des sorties, un entraînement difficile, des conflits finalement résolus... Tout cela compte. C'est une compétition tellement magnifique, une aventure humaine tellement splendide que je souhaite profiter de chaque instant. Je ne veux pas avoir de regret. Je veux bien être triste à en pleurer si on ne va pas au bout de nos rêves, mais je ne veux pas qu'on se dise se dise "ah, si j'avais donné plus, si j'avais plus tiré dans le sens du collectif...". Dès aujourd'hui, il faut donner sens à toutes nos actions. Un match de rugby se joue à très peu. On essaie de planter le décor, de mettre le cadre, de faire en sorte que les joueurs s'approprient le projet. Nous en sommes aux balbutiements et cela doit prendre de l'ampleur.

Que va-t-il se passer pendant ces deux mois de préparation ?

M. L. : Il y a énormément de choses à faire. La trame est physique et physiologique pour commencer, avec du rugby à petites doses, d'abord sur la technique individuelle, et cela ira crescendo. On cherchera aussi de la cohésion avec des intervenants extérieurs, des journées de transition où on va sortir les joueurs de leur cadre, dans des contextes plus ou moins ludiques, plus ou moins physiques, pour provoquer certaines réactions et pour aller dans le sens de cette cohésion.

Allez-vous poser beaucoup de règles ?

M. L. : Non, et les moins strictes possibles. Je suis le garant de l'état d'esprit du groupe mais je veux responsabiliser les joueurs. C'est la première fois en quatre ans que j'ai un groupe sur la durée, avec des joueurs a priori reposés même si on a une problématique avec des blessés. Ils savent ce que j'attends d'eux. Pendant l'aventure, il y aura du stress, de la fatigue, des tentions. Cinquante personnes pendant quatre mois, c'est énorme, mais on parle aussi de plaisir. J'attends un groupe exemplaire. Ils ne doivent pas oublier qu'ils ont été enfants et qu'ils ont rêvé. Je veux un groupe ouvert vers l'extérieur, pas de vase clos. J'ai accepté toutes les missions demandées par l'organisation sur place avec des enfants, des éducateurs, tout en étant missionnés sur notre objectif.

Est-il possible qu'un Knysna se produise en Nouvelle-Zélande ?

M. L. : Je n'étais pas dans le bus, je ne sais pas ce qui s'est passé, même si on a entendu toutes les versions. Je ne vois pas Servat, Dusautoir ou autre refuser de descendre d'un bus de l'équipe de France pour aller s'entraîner. Le rugby est pro. Il est confronté à beaucoup d'individualisme, mais je suis garant de l'état d'esprit du vestiaire, de cette cohésion, du partage et de l'altruisme. Je pense qu'on est à l'abri, mais je parle souvent de vigilance.

Avez-vous réglé en interne le chapitre de l'Italie ?

M. L. : Tout n'est jamais complètement réglé. L'Italie, c'était lié à l'organisation du rugby français, compliquée, qui fait que les joueurs sont pris entre le marteau et l'enclume, entre l'équipe de France et les clubs, entre des sensibilités différentes. J'en suis à minuter mes séances d'entraînement et on fait souvent du bricolage par rapport à nos adversaires. Cela fait trois ans qu'ils préparent les joueurs, avec un suivi. Nous, il va falloir aller sur de la réathlétisation pour certains, des soins pour d'autres. J'aurais aimé, le 28 juin, avoir trente gladiateurs reposés et performants.

Vous pouvez rassurer tout le monde sur le fait qu'on ne reverra pas un groupe distendu ?

M. L. : Je suis bien placé pour vous dire que l'ambiance est bonne. Le ciment d'un groupe est la victoire. On n'a pas été super bien servi ces dernières années, j'en ai la responsabilité car je porte le projet. Mais on est au sommet de (il ne finit pas sa phrase et cherche ses mots)... Vous parliez de tensions, il y en a entre la FFR et la Ligue, entre les présidents entre eux, c'est le contexte français. Le groupe vit bien, vous le verrez, on sera très très ouverts, je n'ai aucune crainte par rapport à ça. Des non-dits et des tensions, il y en aura toujours. Il faut se dire les choses, crever des abcès, les trente élus devront partir comme une famille de grands frères. La semaine entre l'Italie et le Pays de Galles a été magnifique humainement. On est entraîneur pour ça, pour ces émotions. On passe de la colère, à l'apaisement, on réexplique, on réimplique les joueurs, puis vient une forme de pardon.

Où en est le projet de jeu ?

M. L. : Il y aura une continuité mais aussi des changements car le rugby bouge énormément. Je parle d'un contraste entre le rugby du Top 14 et le rugby de l'hémisphère sud. On a eu récemment un bon exemple avec la Coupe du monde des moins de 20 ans, avec des directives d'arbitrage qui vont dans le sens du rugby du Sud, et pas celui de nos joueurs, centré sur les fondamentaux, la conquête, la défense. Il faudra trouver le juste milieu avec ce rugby de très très haut niveau, auquel ils ne sont pas habitués. J'attends aussi des joueurs qu'ils amènent leur pierre à l'édifice. La réussite dans un sport collectif se fait soit quand une équipe s'approprie le projet collectif en étant encouragée par l'entraîneur, comme au handball avec Claude Onesta, ou dans le conflit. J'aimerais autant que ça se passe bien. On va beaucoup échanger avec les joueurs.

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?