Une lettre qui fâche

Par Rugbyrama
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L'appel à la mémoire de Guy Môquet le jour du coup d'envoi de la Coupe du monde a visiblement desservi les joueurs du XV de France.

Le président de la République a demandé à ce que la lettre de Guy Môquet, jeune résistant de 17 ans à ses parents, juste avant d'être fusillé fusillé par les Allemands en octobre 1941, soit lue dans tous les lycées. Bernard Laporte et le staff tricolore se sont dit qu'une telle lecture pourrait donner un élan patriotique supplémentaire aux joueurs du XV de France. Lecture fut donc faite vendredi après-midi, à quelques heures du coup d'envoi de France-Argentine, et de la défaite inaugurale du XV tricolore dans le Mondial. Las, certains joueurs, et cela s'est vu dès le coup d'envoi du match d'ouverture du Mondial contre les Argentins, ont été pétrifiés.

Une lettre si émouvante, débordante de courage était-elle judicieuse comme préparation psychologique ? Se poser la question, c'est y répondre, même s'il faut admettre qu'un résultat final inverse aurait rendu cette initiative grandiose.

Didier Pleux, spécialiste du stress, confie ce lundi à nos confrères du Parisien-Aujourd'hui en France : "Cette lettre symbolise le sacrifice d'un jeune homme pour sa patrie. Or là, il ne s'agissait pas de faire la guerre, mais d'un jeu. Ce conditionnement était disproportionné. Après un tel épisode, les joueurs sont entrés sur le terrain comme si leur survie était en jeu. Chacun se retrouve alors à lutter avec lui-même. Il n'y a que de l'adrénaline et plus de réflexion. Chaque erreur se traduit par de la colère contre soi ou ses partenaires. C'est une mauvaise pression."

Clair et limpide. Pour preuve encore. Clément Poitrenaud, en costume dans les tribunes du Stade de France, lecteur désigné de cette lettre, était complètement bouleversé, bien longtemps après le coup d'envoi de la rencontre... Et que dire de cette déclaration d'Henry Broncan dans Midi Olympique ? "En 1969, nous avions effectué un déplacement avec le Toulouse UC à Saint-Junien, en Haute-Vienne. Jean-Claude Baqué, qui nous entraînait, nous avait amenés à Oradour-sur-Glane. Ce pèlerinage nous avait tellement marqués que nous étions menés de vingt-cinq points à la mi-temps. Cela demande d'aller chercher trop profond dans l'affectif."

Disproportionné, trop profond dans l'affectif. La lecture de la lettre de ce jeune héros, si elle est salutaire auprès des lycéens, n'a pas eu l'effet escompté sur nos Bleus. Comme le déclarait ce lundi matin sur les ondes de France Inter, le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque - également rugbyman durant 30 ans et frère du président du club de Grenoble - : "Cela a été une erreur de management si l'on emploie le vocabulaire de l'entreprise."

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