Robert Bru s'est éteint

Par Rugbyrama
  • Robert Bru en 2008.
    Robert Bru en 2008.
Publié le Mis à jour
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CARNET NOIR - Ancien entraîneur, au début des années 1980, puis directeur sportif du Stade Toulousain, mais également ancien professeur de rugby au Creps de Toulouse, Robert Bru est décédé ce samedi, à Salles-d'Aude. Il était âgé de 89 ans.

A Ernest-Wallon, il est considéré comme "le père de la méthode" toulousaine, celle qui a permis tant de victoires et de titres. Le mentor aussi du duo Villepreux-Skrela. Ses qualités pédagogiques et formatrices étaient reconnues de tous. Il était à la base des notions sur le rôle multifonctionnel du joueur. A Toulouse, il avait aussi élaboré un centre de formation extrêmement performant, dont le club recueille encore les fruits aujourd'hui. Il n'était pas souvent sur le devant de la scène, il brillait par son humilité. Mais son importance fut énorme, par son influence indirecte, mais très intense. Un vrai éducateur qui savait transmettre. C'est la raison pour laquelle ils sont si nombreux, pour l'avoir côtoyé au Stade toulousain ou au Creps, à le considérer comme une formidable source d'inspiration.

Midi Olympique et Rugbyrama.fr présentent toutes leurs condoléances à ses proches.

Jean Fabre, ancien président du Stade toulousain : "Il a créé l'ADN du Stade toulousain moderne"

"J'étais allé le chercher à Revel, il avait longuement réfléchi avant d'accepter car évidemment, je lui proposais un défi d'une autre dimension" se souvient Jean Fabre, professeur d'université et président historique du Stade Toulousain. " Il était discret en public, il n'était pas très médiatique. Mais en interne, il se faisait entendre. Il savait se tenir droit et il savait faire passer les messages qu'il voulait faire passer. Il était aussi très observateur et novateur dans les méthodes d'entraînement. En tant qu'ancien joueur, ça m'intéressait et j'ai découvert beaucoup de choses à son contact. Lors de nos premiers titres, il n'était plus entraîneur, mais croyez-moi, il était très important. Villepreux et Skréla avaient beaucoup d'admiration pour lui. "

A sa façon, bienveillante et humble, il tirait les ficelles techniques du théâtre rouge et noir : "Nous avions décidé que tous les entraîneurs devaient appliquer le même style et la même philosophie, pour que nos jeunes découvrent l'équipe première dans les meilleures conditions. C'était très important pour nous et c'est lui qui s'occupait de ça. Mais pour résumer son apport, je dirais que l'ADN du Stade moderne, c'est lui qui l'a créée, et les Villepreux, Skréla, Novès, Mola l'ont perpétuée. "

Didier Lacroix, président du Stade toulousain : "Une figure de notre club qui s'en va"

"C’est avec une grande tristesse que nous venons d’apprendre le décès de Robert Bru, lequel nous a quittés aujourd’hui à l’âge de 89 ans, à Salles-d’Aude, son village de toujours. Avec la disparition de Robert Bru, c’est une figure tutélaire de notre club qui s’en va, celle d’un entraîneur qui durant près de 13 ans porta notre équipe et posa les bases du "jeu à la Toulousaine", cette philosophie de jeu qui aujourd’hui encore est au cœur de notre ADN et qui anime plus que jamais notre projet sportif. Si sa contribution à l’édifice Stadiste perdurera encore longtemps, nous pleurons aujourd’hui un homme de cœur, de passion, fidèle à son club et à son amour du Rugby dans ce qu’il a de plus flamboyant et de plus généreux. Nous sommes de tout cœur auprès de sa famille, ses proches, tout ceux qui comme nous, ont eu le privilège de cheminer à ses côtés. "

Fabien Galthié, sélectionneur du XV de France : "Des principes dont je me sers encore aujourd'hui"

"J'ai fait la connaissance de Robert Bru à la fin des années 80. Il était alors professeur de rugby à l'université Paul-Sabathié de Toulouse. Il y avait là Michel Marfaing, Emile Ntamack, Rémi Trémoulet, Bruno Dallariva, Guy Jeannard... Robert ? Il arrivait le mardi soir au bord du terrain, avec sa belle barbe ; il distribuait les maillots, verts et jaunes à mon souvenir, et l'entraînement débutait. Une heure de jeu libre, déstructuré, un pur bonheur. Une fois que c'était parti, on ne voulait plus s'arrêter. Son principe de base, c'était la recherche d'espaces, la quête de l'épaule faible, le jeu debout, le jeu dans le sens… C'est le rugby qui faisait le succès du Stade toulousain des années 90, dans une équipe où les avants étaient tous de formidables manieurs de ballons. C'est le rugby qui s'opposait aussi au credo de Jacques Fouroux, pour qui la prise du milieu du terrain était le point de départ de tout mouvement. Et les idées de Robert Bru, ce sont aussi des principes dont je me sers encore aujourd'hui, en équipe de France. Robert, il était pédagogue, intelligent. C'était un grand entraîneur. "

Denis Charvet : "Merde, Robert est mort..."

Comme de nombreux joueurs passés par le Stade toulousain, l'ancien trois-quart centre international rend un hommage ému à Robert Bru, décédé ce samedi, considéré comme le père de la méthode toulousaine. " Robert, c'était un révolutionnaire. Un sage. Un mec toujours en avance sur son temps et sur tout. Il réfléchissait au rugby mais, surtout, il t'obligeait à y réfléchir avec lui. C'était un grand visionnaire mais qui aimait rester dans l'ombre, toujours discret et humble. Je lui dois ma venue à Toulouse. Merde, Robert est mort... C'était quelqu'un de rare, en fait, comme on en croise peu dans sa vie. Cela faisait pourtant longtemps que je ne l'avais pas revu. J'aurais dû le revoir, j'aurais aimé le revoir mais la vie m'a fait prendre d'autres chemins. Et comme toutes ces grandes personnes, c'est quand ils partent que vous regrettez de vous être éloigné. Avec son départ, c'est un peu de ma vie qui s'en va. Merde, Robert est mort et c'est tant d'émotions qui remontent... "

Mola : "Le créateur du rugby moderne"

"Il a presque formé toute la crème des entraîneurs du rugby français. Je suis allé le voir il y a quelques mois dans son village et il m'avait dit des choses incroyables sur le jeu, sur la manière de fonctionner. J'ai retrouvé de nombreuses similitudes dans ce que je faisais de manière inconsciente parce que j'avais été bercé par ces méthodes-là. Honnêtement, j'avais passé une journée extraordinaire. J'étais parti pour y rester deux heures... J'y suis arrivé à 11h et je suis resté jusqu'à 17h ou 18h. On a échangé, on a mangé, on a bataillé... Il me posait plein de questions hyper sensées. Cela m'a réellement marqué et ce souvenir restera à part. Il était tellement passionnant et passionné. Il n'était pas dogmatique mais tellement convaincu sur le jeu et le processus. Il m'avait notamment confié des choses sur l'école de rugby : "Tout le monde gueule sur les gosses en disant "fais la passe, fais la passe" mais un gamin de 6 ans, le ballon, il le garde ou il le jette. Arrêtez avec la passe. Mettez-le le situation pour que, justement, il comprenne pourquoi il aura, à un moment ou à un autre, l'utilité de faire la passe." En fait, il te mettait en éveil sur tout. Je voulais aller le voir depuis des années. Je m'étais lancé dans un tour de prises d'informations pour faire une sorte de livre blanc du Stade toulousain. L'idée, c'était d'auditer tous les mecs qui ont porté cette méthode. Chez lui, c'était profond sur tout : la formation, les hommes, le jeu, etc.. J'ai pris tellement de notes, je pourrais en parler pendant des heures... Son discours est à la fois hyper simple, tourné vers le bon sens, mais, dans l'éducation des entraîneurs, c'est réfléchi sur la mise en situation : "Pourquoi tu fais ça ?" C'était un mec incroyable. C'est le père de la méthode même si je ne suis pas fan de ce mot. Lui était contre ça, contre cette reconnaissance. Plus que le père de la méthode, c'est, il y a cinquante ans, le créateur du rugby moderne. Qui est toujours d'actualité aujourd'hui ! A 89 ans, il était d'une modernité incroyable en termes de réflexion sur le rugby. Sa parole était intergénérationnelle. Puis c'est le garant d'un état d'esprit. Pour lui, derrière chaque joueur, il y avait un homme. Il avait humanisé la manière d'entraîner et de fonctionner. Tous ceux qui ont eu, dans leur apprentissage de ce sport, la capacité à réfléchir sur le rugby ont été marqués par cet homme."

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