Rome, théâtre de honte et de cauchemar pour le XV de France

La tâche est indélébile. L’humiliation à jamais gravée dans l’histoire honteuse du XV de France. Ce 12 mars 2011, dans le cadre décrépi de Flaminio, l'Italie s'imposait face à la France (22-21) pour la première fois depuis son admission dans le Tournoi des 6 nations en 2000. Les Français se compromettant par instant dans un hourra rugby fade où l'étroitesse de leurs gestes et la faiblesse de leur imagination n’inquiétèrent jamais une Squadra Azzurra pétillante. Le lendemain matin, après un aparté houleux avec ses joueurs, Marc Lièvremont composait une véritable dramaturgie dans le salon de presse du Westin Excelsior Hotel. Une tirade de trente minutes hallucinante. C'est difficile de classer les déceptions, lâchait le sélectionneur. Je suis désappointé et le mot est faible. C'est une triste défaite. Je suis partagé entre la déception et la colère. De manière assez soft, je suis assez désabusé. Je m'étais engagé les yeux dans les yeux vis-à-vis de certains joueurs mais tout est remis en question pour la Coupe du monde. C'est le match de trop. Je me suis peut-être trompé. Les joueurs ne sont pas capables de se prendre en charge. Tout est remis à zéro. Une explication fatidique pour Sébastien Chabal, Jérôme Thion, Yannick Jauzion, Clément Poitrenaud, Aurélien Rougerie et Sylvain Marconnet.

Lièvremont en 2011: "C'est le match de trop. Tous est remis à zéro"

Le rugby français se pensait certainement à l’abri d’un camouflet de plus. Et pourtant, l’invraisemblable n’aura pas tardé. 3 février 2013 : devant les 60.000 spectateurs du Stadio Olimpico, le XV de France signait une prestation infâme, ridiculisé par des Italiens inspirés, joueurs, tout simplement supérieurs (23-18). Mais la réaction de Philippe Saint-André, refusant le marasme, était aux antipodes de l’envolée de son prédécesseur. Un grave coup d’arrêt ? C'est un bien grand mot, commentait-il avec pragmatisme. On a eu trop de manques. On a fait une  dernière demi-heure catastrophique. Automatiquement, dans le vestiaire, il y avait énormément de tristesse, de frustration. Surtout, tu sens qu'à un moment on avait le match en main et on n'a pas su le tuer. Et ça, on ne peut s'en prendre qu'à nous et je m'inclus totalement dans cette défaite. Mais le coup d'arrêt n'est pas complet. Il va  falloir travailler.

Saint-André: "Il ne faut pas vivre dans le passé"

A quarante-huit heures d’une nouvelle virée dans la ville éternelle, les rescapés de ces deux désastres, et notamment Huget, Dusautoir, Guirado et Mas pour la triste après-midi de Flaminio, refusent toute psychose. C’est sûr que ce ne sont pas de bons souvenirs mais il ne faut pas être paralysé, insiste Nicolas Mas. On n’avait pas été présents dans le combat. Il faut simplement être conscient que ce sera un très gros match de rugby. Ils ne lâchent rien. Mais que restent-ils de ces deux revers ? Le doute ? L’appréhension ? Il reste du souvenir, glisse Philippe Saint-André. Mais il ne faut pas vivre dans le passé. Il faut vivre avec le futur. Pour nous, c’est dimanche en Italie. Il faut le préparer le plus sereinement possible, le plus sérieusement possible, avec enthousiasme. Pour chasser ces fantômes romains.