Top 14 - "Un côté monumental", "un événement assez rare" : les anciens bayonnais se souviennent d’Anoeta

Par Pablo Ordas
  • Yoann Huget sous le maillot de l'Aviron Bayonnais.
    Yoann Huget sous le maillot de l'Aviron Bayonnais. Nicolas Mollo / Icon Sport - Nicolas Mollo / Icon Sport
Publié le Mis à jour
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Neuf ans après sa dernière délocalisation à Anoeta, l’Aviron bayonnais va de nouveau jouer un match dans l’enceinte des footballeurs de la Real Sociedad, samedi, face à Pau. L’occasion, pour quelques anciens joueurs, d’ouvrir la boîte à souvenirs…

C’est en 2009 que l’Aviron bayonnais a décidé, pour la première fois, de délocaliser une de ses rencontres de Top 14 à 50 kilomètres plus au sud de Jean-Dauger, en Espagne, marchant ainsi sur les pas du voisin biarrot, qui avait fait le premier pas en avril 2005 lors d’un quart de finale de H Cup face au Munster. Depuis ce 21 août 2009 et une victoire face au Stade français Paris (38-24), l’Aviron a délocalisé trois autres matchs de championnat à Saint-Sébastien. Le club basque a toujours gagné lorsqu’il jouait à “domicile”, que ce soit face à Toulouse (mars 2011, 19-13), Toulon (mars 2013, 33-28) ou Paris (avril 2014, 24-19). Les deux défaites de l’Aviron, en Top 14, à Anoeta ont eu lieu à “l’extérieur”, sur deux derbys délocalisés par le BO (12-6 en 2009, puis 40-10 en 2011). Une rencontre amicale s’est également jouée en août 2012 et Biarritz avait gagné 10-0. “Un match à Anoeta, c’est un événement assez rare. C’est une rencontre particulière, mais c’est avant tout une fête. On n’a pas envie de passer à côté”, pose l’ancien bayonnais Yoann Huget. “Ce sont des choses dont on te parle, tu es sollicité pendant la semaine et ça te renvoie l’importance de l’événement”, ajoute Jean-Joseph Marmouyet.

Iguiniz : “L’arrivée en bus m’avait marqué”

Une délocalisation à Anoeta, c’est avant tout un rendez-vous qui vient casser la routine des joueurs, finalement habitués à vivre des semaines qui se ressemblent. “Ok, c’est un match de championnat parmi 26 autres, mais tu ressens l’excitation de préparer un événement. Tout cet aspect-là est davantage présent dans la préparation du match que sur l’instant où tu le vis”, se souvient Marmouyet. “Il y a beaucoup plus de concentration, tout le monde a envie de prendre part à la fête”, complète Huget. Et le jour du match, alors ? “C’est surtout l’arrivée en bus qui m’avait marqué, raconte Aretz Iguiniz. Les gens nous attendaient à l’entrée du vestiaire. C’est un peu comme quand on avait joué la finale d’accession en Pro D2 à Ernest Wallon, à Toulouse. Le temps de faire tout le tour du stade en bus, tu vois tout le monde.”

Même son de cloche pour le flanker Jean-Jo Marmouyet : “Quand tu es sur le terrain, tu es dans ta bulle, tu es pris par le jeu, ce que tu as à faire. La descente du bus, tu es plus contemplatif en tant que joueur. Tu es en train de réfléchir à ton match, mais tu es saisi par ce truc, le bruit, les gens qui sont très proches de toi.” Yoann Huget, qui a participé à deux matchs à “San-sé”, parle même de “folie”. “Tous les supporters t’attendent autour du stade, se remémore l’ancien ailier. Nous, c’était pendant le carnaval. Les gens étaient déguisés. Il n’y avait pas que des Bayonnais ou des Toulousains, des mecs étaient venus de partout. Je me souviens de gens qui m’avaient dit avoir fait 600 ou 700 kilomètres pour venir voir la rencontre, car ils voulaient participer à la fête.”

Marmouyet : “Tu es au cœur d’un truc assez immense”

Jouer au stade Anoeta, c’est aussi l’assurance de participer à une rencontre devant 30 000 personnes. Il y a neuf ans, avant les travaux de réaménagement qui furent lancés à l’été 2017, l’enceinte de la Real Sociedad comptait 32 000 places. Elle en a désormais 39 000, et
samedi, le duel entre Bayonne et Pau se jouera à guichets fermés. “Tu te dis que Bayonne joue devant 40 000 personnes. C’est immense sociologiquement, culturellement, c’est immense à bien des égards. Et ce n’est même pas une demi-finale, c’est un match de
poule”
, souligne Marmouyet.

Tous les joueurs que nous avons appelés se souviennent d’une ambiance à part sur ces rencontres délocalisées. “Face à Toulouse, en 2011, c’était fabuleux, dit Abdellatif Boutaty. Quand j’étais rentré sur le terrain, voir tout ce public en bleu et blanc, c’était vraiment énorme. Il y avait plus de bruit, de monde.” Le fait d’avoir deux à trois fois plus de personnes derrière soi a-t-il une influence sur le déroulé du match ? “Quand tu rentres sur le terrain au moment de la Peña Baiona ou après le match, tu es réceptif au public, analyse Marmouyet. Après, quand tu joues, tu joues. Tu n’es pas là pour te dire : « Oh, c’est sympa, il y a du monde en tribune », normalement, tu n’as pas le temps pour ça. Même si tu ressens les montées des tribunes, le brouhaha, quand ça gueule. Après, lorsque le match s’arrête, tu réalises l’édifice dans lequel tu es. Il y a un côté monumental. Tu es dans quelque chose de plus grand que d’habitude. Tu as cette pression d’être au cœur d’un truc assez immense, au sens propre comme figuré de ce que ça représente.”

Les maillots de la Real Sociedad, l’interception d’Huget…

Neuf ans après la dernière délocalisation de l’Aviron à Anoeta, il reste plusieurs souvenirs marquants de ces matchs à part. À commencer par les maillots qui avaient été spécialement conçus pour l'événement. “Il y avait, à l’époque, Christian Gajan comme entraîneur. Il nous avait demandé si on se sentait de jouer avec les maillots de la Real Sociedad. Il fallait faire honneur”, explique Abdellatif Boutaty. Cette tunique à rayures ? Elle avait nourri quelques discussions avec le voisin biarrot. “On en parle encore avec Imanol Harinordoquy, confie Yoann Huget. En mettant ce maillot de la Real Sociedad, ça avait énervé les Biarrots, on avait dit que c’était notre domicile alors qu’ils y avaient joué un peu plus de fois que nous.”
Douze ans plus tard, l’interception de l’ailier international face au Stade toulousain (2011) fait aussi partie des moments qui sont restés dans la mémoire collective. À ce moment du match, les Bayonnais menaient 9-3, mais le Stade était sur un temps fort. “Sur cette action, Toulouse balaye le terrain. Au large, il y a un quatre contre deux. Si Jauzion ne saute pas la passe, les Toulousains vont à l’essai en marchant. Après ça, il y a eu le feu au stade, c’était énorme”, se remémore Abdel Boutaty. 

“Elle ressort chaque année quand Bayonne joue contre Toulouse, apprécie Huget. Sur le moment, on ne réalise pas trop. Ce n’est pas “inesperado”, mais c’est un essai qui vaut 14 points. J’étais en difficulté défensivement. Je regarde si Max Médard n’est pas derrière moi. Je savais qu’il n’allait rien lâcher sur 80 mètres, mais j’ai la chance qu’il se fasse plaquer un peu avant l’action, donc personne n’a suivi. J’ai eu le temps de savourer pendant 60 mètres, car je n’avais personne derrière. C’est un moment de partage, tu sais que tu rends fier et heureux le public. Les supporters étaient en folie. Quand je revois les images, j’ai ce sentiment où je suis tout seul sur le terrain, c’est assez plaisant.”

Aujourd’hui, le public est plus proche du terrain

Samedi après-midi, ce sera à Camille Lopez et sa bande d’écrire leur histoire à Anoeta. Dans l’effectif ciel et blanc, seuls Guillaume Rouet et Jean Monribot ont déjà connu cette atmosphère particulière. Et l’ambiance, ce week-end, devrait être encore plus chaude qu’elle ne l’était dans le passé, puisque désormais la piste d’athlétisme autour du terrain a été supprimée et le public est au plus près de la pelouse. “S’il n’y a plus de piste, ça va être encore plus exceptionnel pour les joueurs, annonce Yoann Huget. À Bayonne, tu peux mettre un stade de 60 000 places et il y aura du monde. Ils ont la chance d’avoir ce public derrière eux et une fête comme ça vient récompenser les supporters.” 

Toutes proportions gardées, on peut faire le parallèle avec le stade Jean Dauger où, depuis sa rénovation, les tribunes sont aussi plus proches de la pelouse. “C’est comme à Bayonne, estime Jean-Jo Marmouyet, qui a raccroché les crampons en 2018. Pour avoir assisté à des matchs à Dauger, ça fait rêver, et même regretter de te dire : « J’aurais bien aimé qu’ils fassent ça 3 ou 4 ans avant ». Mais bon, on ne peut pas tout avoir…”

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