L'édito : Quel jeu pour les Bleus ?

Par Léo FAURE
  • Anthony Jelonch a été à l'initiative du magnifique essai du XV de France, conclu par Damian Penaud en Irlande.
    Anthony Jelonch a été à l'initiative du magnifique essai du XV de France, conclu par Damian Penaud en Irlande. Sportsfile / Icon Sport - Seb Daly
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L'édito de ce vendredi 17 février par Léo Faure.

Difficile d’y voir clair. Parce que les discours ne sont pas toujours suivis d’effets, et que les faits sont vite interrompus par des discours. Avant le Tournoi, nous avions donc ouvert un nouveau chapitre sémantique du sélectionneur français, que la presse anglophone convoquait récemment au rang de "sexy french man" : après la "dépossession", faites place à la "repossession". Bienvenue à elle.

Alors, voilà : que fallait-il entendre par "repossession" ? C’est déjà une part du mystère. Entre les lignes, l’idée semblait être de maintenir la jauge du jeu au pied élevée, comme ce fut le cas depuis le début du mandat. Mais avec l’objectif de récupérer plus rapidement le ballon, sans avoir à subir de lourdes séquences défensives en attendant la faute de l’adversaire, sous pression, pour le punir d’une fulgurance.

Dans les faits, cette "repossession" reste encore très théorique. Si on cerne à peu près l’objectif, on voit aussi que le chemin pour y parvenir est encore devant nous. Et qu’il crispe quelques éléments, en interne, perdus dans leur volonté d’initiatives et qui avaient cru lire dans cette évolution stratégique annoncée la place plus grande faite au jeu offensif, à la création, à la lecture, à l’improvisation.

En Irlande, notre lumière ponctuelle vint d’ailleurs de là : d’une munition qu’il n’aurait certainement pas fallu relancer ; d’une action longtemps jouée en reculant, faite de deux jeux au pied aléatoires et sous pression, de plusieurs fautes de mains et de ballons tombés ; d’une claquette de Thomas Ramos, au rebond, vers son copain Damian Penaud qui embrasait la suite : un crochet, deux défenseurs battus, une accélération, un relais de Jelonch, une remise, un sprint et un essai sublime. Par Penaud encore.

La voie à suivre, toute tracée ? Raté. À Dublin, après une première période orgiaque, faite de relances et de prises de risques, consignes furent données à la pause d’en revenir à plus de pragmatisme. Plus de jeu au pied et d’occupation du terrain irlandais ; plus de pression sur l’adversaire, moins de jeu sur un fil.

Le choix fut perdant, mais rien ne dit qu’il n’en aurait pas été de même avec une autre option stratégique. Forte, trop forte, l’Irlande a largement mérité sa victoire. Elle est justement armée d’un plan de jeu taillé au millimètre pour ses qualités, en lequel elle croit dur comme fer. Elle ne s’en est jamais éloignée d’un centimètre, pendant 80 minutes. Cette dévotion quasi religieuse a eu raison du grand cœur bleu.

Voilà ce après quoi court désormais le XV de France. Et son sélectionneur. Galthié, s’il ne fait peut-être jamais l’unanimité, garde pour lui ce totem d’immunité glané au mérite : quand il s’agit de stratégie et de rugby, dans son approche collective et intellectuelle, le Lotois en connaît un rayon. Même deux rayons. Il l’a maintes fois prouvé. Et l’idée qu’il ait déjà deux coups d’avance, façon échecs, en anticipant très bien la période actuelle pour arriver là où il souhaite le jour J, n’est évidemment pas à exclure.

Si Dublin a donc délivré de nombreuses leçons, surtout pas toutes négatives, sur la profondeur de l’effectif, l’importance de quelques éléments cadres et un état physique inquiétant, il a aussi préservé quelques mystères. Que l’avenir devra dévoiler.

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