Baky écrit : Carnet de notes, un exercice de subjectivité

Par Bakary Meité
  • Notre chroniqueur Bakary Meité revient cette semaine sur l'exercice de notation des joueurs, dans l'après-match. Et de comment le contexte dans lequel évolue l'observateur peut influencer son jugement.
    Notre chroniqueur Bakary Meité revient cette semaine sur l'exercice de notation des joueurs, dans l'après-match. Et de comment le contexte dans lequel évolue l'observateur peut influencer son jugement.
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BAKY ÉCRIT - Le début du Tournoi a inspiré notre chroniqueur Bakary Meïté. Et plus particulièrement le jeu de notation des joueurs, qui arrive rapidement après le coup de sifflet final sur les sites internets. D'accord, pas d'accord? On peut être les deux à la fois, figurez-vous. Tout dépend du contexte. Baky vous explique tout ça.

Loin de moi l’idée de vouloir clasher Arnaud Beurdeley, de jeter le gant ou de le convoquer pour un octogone sans règle. Mais je dois dire que la lecture des notes attribuées aux joueurs français dans la foulée du match qui opposait l’Irlande à la France m’a dans un premier temps laissé perplexe. Et comme je tiens à ce qu’il y ait une saison 3 de Baky écrit, je vais tenter de me faire comprendre sans créer d’incise.

Petit Flashback : on est samedi, je suis posé dans le canapé de Lucas, un ami fidèle, plaid remonté jusque sous les yeux. Lucas a décidé de protester contre le salaire faramineux de Patrick Pouyanné et des bénéfices records de TotalEnergies en n’allumant pas son chauffage alors que la température extérieure n’excède pas 10 degrés et que son appartement est aussi bien isolé que moi chevelu. J’abandonne de lui expliquer à quel point sa protestation est veine.

Nous venons tous les deux d’assister à la défaite des Bleus face à un implacable XV du Trèfle. Implacable, le mot est choisi à dessein. Les Français s’en sont donné à cœur joie. Marchand, Flament, Dupont et surtout Jelonch. Lucas et moi sommes subjugués par la performance XXL du troisième ligne du Stade Toulousain. Bien aidé par les commentaires de Matthieu Lartot et Dimitri Yachvili, on a la sensation d’avoir assisté à une performance majuscule du flanker.

Performance avant tout défensive, à l’instar du XV de France, magnifié par ce relais offensif exceptionnel, tout en lucidité, sur le bijou d’essai de Damian Penaud.

Je me disais même que, avant que l’espoir d’une victoire française sur le gong soit définitivement douché, il était en lice pour le trophée d’homme du match. Même si j’étais raccord avec le choix de Doris. Un joueur élégant et diablement efficace comme on n’en avait plus vu au poste depuis la retraite de Jamie Heaslip.

Je plonge avec délectation dans l’appli Rugbyrama, je clique sur l’onglet qui abrite les notes décernées par Arnaud Beurdeley et son acolyte Nicolas Zanardi. Comme pour corroborer mon impression. Et là, patatras !

Jelonch est affublé d’un 5,5 sur 10. Passée la surprise, je lis le libellé qui accompagne la note. Et plus je lis, plus je me rends compte que cette note semble justifiée.

J’avais été aveuglé par l’efficacité défensive de Jelonch. Passant sous silence un ballon égaré en début de match et un en-avant proche de l’en-but français. Entre autres.

Je veux décrire là toute la subjectivité de ce genre de jugement. Ma persistance rétinienne, les discussions pendant le match avec Lucas, les commentateurs, tout ceci est venu percuter une autre analyse, réalisée dans d’autres conditions que la mienne. Et surtout qui fait autorité ! C’est d’ailleurs ce qui m’a amené à me précipiter sur mon "tél".

Mais en fait : est-ce bien grave ? La réponse est évidemment non. Bien que ce ne soit pas ici le cas, le supporterisme et le chauvinisme viennent souvent altérer la perception. Et le supporter des Bleus que je suis doit-il se comporter en examinateur ? Ou en simple appréciateur ?

Quant aux joueurs, comment perçoivent-ils qu’on apprécie ainsi leurs matchs ? Ils vous jureront tous, la main sur le cœur, qu’ils ne lisent pas la presse et que ce genre de billevesées ne les intéresse guère. Spoiler Alert : c’est faux !

Pour ne parler que de mon occurrence et de celles de certains coéquipiers croisés, on s’y intéresse bien évidemment. On veut savoir ce que l’autorité pense de nous. Certains n’hésitant pas à faire savoir au journaliste-noteur qu’ils ne goûtent pas vraiment leur sévérité. Jusqu’à parfois y accorder une importance beaucoup trop grande. Nos agents s’y adossent quand elles nous sont favorables, pour négocier ou renégocier de juteux contrats. Et les supporters s’y réfèrent quand ils n’ont pas la possibilité de voir le match.

La "favorabilité" justement. J’ai une pensée pour un bénévole d’un club amateur pour lequel je jouais. Il avait la charge de transmettre le nom des meilleurs joueurs au journal. Quelques pichets de bière à la buvette pour ce brave vous propulsaient dans la liste des meilleurs et ce malgré une performance quelconque sur le terrain.

J’ai, pour ma part, décidé de ne pas me poser en alcade sévère. Je vais simplement continuer à savourer les matchs en attendant patiemment la coupe du monde.

La divergence de point de vue ne doit pas nous faire perdre de vue qu’une note n’est après tout qu’une vue de l’esprit. Tout ce qu’on souhaite, c’est que l’équipe de France continue à nous en mettre plein la vue.

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