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Barlot, un volcan s’éveille

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    Barlot, un volcan s’éveille Photo Midi Olympique - Patrick Derewiany
Publié le Mis à jour
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Le jeune Auvergnat du CO fait partie de la liste des Bleus appelés pour la tournée en Australie. À 24 ans, sa carrière est en pleine explosion.

La sonnerie du téléphone a retenti alors qu’il était perdu au milieu de ses cartons, en train de préparer son déménagement vers sa nouvelle maison, à Castres. Au bout du fil, la voix de William Servat qui annonce à Gaëtan Barlot la bonne nouvelle : il montera dans l’avion avec les Bleus, direction l’Australie, pour vivre une tournée de juin aux antipodes. Entre la vaisselle et le canapé, la joie est immense : "J’étais très fier et heureux de recevoir cet appel, détaille l’intéressé. J’ai vécu une saison fantastique et ce coup de fil vient valider tout le travail que nous avons accompli avec mes coéquipiers du Castres olympique."

Au vrai, voir Gaëtan Barlot parvenir à s’immiscer au sein du groupe France appartient à une forme de logique. Le garçon, débarqué au Castres olympique à l’été 2020, a livré une saison exceptionnelle, apparaissant aux yeux de tous les observateurs comme l’un des meilleurs talonneurs de l’exercice, au sein d’un championnat et d’une génération pourtant très bien fournie à ce poste, avec les Chat, Mauvaka, Bourgarit, Marchand et consorts. À Castres, on loue son caractère travailleur et obstiné. Arrivé sur la pointe des pieds, presque timidement, en provenance de Colomiers en Pro D2, le gamin natif de Beaumont, dans la proche banlieue de Clermont, n’a pas tardé à révéler son tempérament fougueux et son rugby à la fois précis et dynamique. Dans le Tarn, contrairement aux volcans de sa chère région natale qui restent endormis pour le bien de tous, Gaëtan a explosé. Il a dynamité toutes les défenses qui ont eu l’outrecuidance de se dresser face à lui, inscrivant quatre essais en 23 matchs joués, dont 21 en tant que titulaire. Efficace sur les fondamentaux du poste, c’est sur son dynamisme dans le jeu courant et son impact physique que le gamin formé à Clermont impressionne.

Reggiardo : "Il a "la frappe""

C’est Pierre-Henry Broncan qui a eu le nez pour flairer son potentiel lorsqu’il évoluait à Colomiers. Et le technicien castrais n’a pas tardé à faire de lui une des pièces maîtresses de son effectif. Aujourd’hui, "PHB" n’est pas étonné que son talonneur fasse partie du voyage des Bleus en Australie : "Gaëtan mérite entièrement tout ce qui lui arrive. C’est un garçon qui est arrivé avec beaucoup d’humilité à Castres. Il avait une certaine forme d’appréhension quant à l’écart de niveau entre Pro D2 et Top 14. Antoine Tichit et certains cadres du groupe l’ont pris sous leur aile et il a très vite passé le cap. Rapidement, il s’est ouvert, il a explosé et a gagné la confiance de ses piliers. Gaëtan arrivait derrière Jody Jenneker, un grand talonneur, qu’il a su remplacer avec brio." Loïc Jacquet, deuxième ligne et "papa" du groupe au CO, acquiesce : "Gaëtan n’a pas volé sa situation actuelle. Il a été très régulier tout au long de la saison. Je me souviens qu’au début, il avait peur de la marche à passer entre le Pro D2 et le Top 14. Il n’avait pas confiance en lui. Bon… Quand il a pris confiance, nous avons tous compris que c’était un talonneur de très haut niveau. Il court vite, il est puissant, il marque, il perce, il défend comme un troisième ligne… Il est sur une ascension fulgurante et cette tournée pourrait lui permettre de voir jusqu’où il peut aller."

Mauricio Reggiardo, qui entraînait la pépite Barlot en début d’exercice corrobore aussi : "Pierre-Henry a soumis son nom à la cellule de recrutement que nous formions avec Matthias (Rolland, N.D.L.R.) et Pierre-Yves (Revol). On a tous tout de suite vu qu’il avait un énorme potentiel. Ce qui m’a vraiment surpris chez lui, c’est le peu de temps qu’il a mis pour devenir un joueur de Top 14. Certains mecs ne passent jamais vraiment le cap. D’autres mettent huit ou dix mois. Lui, en quatre semaines à peine, il était parfaitement au niveau du championnat le plus relevé du monde. Très franchement, je ne serais pas étonné qu’il passe aussi facilement la marche du niveau international. Il déborde d’activité sur le terrain, mais en plus, il a "la frappe". Il règne sur les collisions, il est dur au mal et tape fort."

Un parcours atypique

Et pourtant, si aujourd’hui sa trajectoire pointe vers le ciel, rien ne fut facile pour le numéro 2 castrais, qui a un temps envisagé de ne pas devenir professionnel. Non conservé par Clermont où il était barré par Benjamin Kayser ou John Ulugia, Gaëtan est recruté par Yann Kergoulay, qui le fait venir à Colomiers. En espoirs, le doute assaille le jeune joueur, qui ne voit pas forcément le bout du tunnel. Au point de pousser à leur terme des études de technicien de laboratoire. "J’ai beaucoup douté de mon avenir dans le rugby au tournant de la vingtaine, confie Barlot. J’étais en espoir à Colomiers, mais sans trop de certitudes sur la suite. Je n’avais pas de convention avec le club et je ne savais pas trop de quoi les lendemains seraient faits. Je suis allé travailler en parallèle du rugby. J’ai fait ça pendant un an et par chance, après tout ça, ma carrière rugbystique s’est emballée." Quelques blessures en équipe première, l’opportunité de monter avec les pros sous la houlette de Fabien Berneau et Julien Sarraute suffiront à révéler le diamant brut aux yeux du monde du rugby. Alain Carré, président de Colomiers, ne tarit pas d’éloges sur son ex-joueur : "Quand la saison a été arrêtée à cause de la pandémie, nous étions premiers. Et Gaëtan n’y était pas étranger. Il avait d’autres clubs mais il a fait preuve de maturité en choisissant le CO. C’est le club parfait pour son développement. Il ne s’est pas trompé. À Colomiers, on a été triste de le voir partir. Mais des gamins comme ça, on porte leur sac là où ils vont. C’est une fierté pour nous de le voir aujourd’hui appelé dans le squad des Bleus."

Pierre-Henry Broncan termine l’analyse du parcours de son talonneur : "Gaëtan est un gamin qui s’est construit tout seul. Entendez par là qu’il n’a pas suivi la filière classique du rugbyman de haut niveau et qu’il n’est pas passé par Marcoussis et par les équipes de France jeunes. Il était passé à travers les mailles du giron fédéral et cela ne l’a pourtant pas empêché de rattraper le train du rugby professionnel. Son parcours peut servir d’exemple à beaucoup de jeunes joueurs à maturité plus tardive. Avec du travail et de la volonté, tout est toujours possible dans ce sport." "PHB" sait que son joueur et le XV de France sont face à un immense défi sur cette tournée australienne un peu "casse-gueule" : "Il y a longtemps que l’on ne s’est pas confronté au rugby du sud, prévient le technicien. C’est une tournée qui s’annonce très difficile car nos adversaires n’ont pas perdu leur temps pendant la pandémie qu’ils ont traversé beaucoup plus sereinement que nous. Gaëtan ne doit pas avoir de pression. Cette tournée n’est qu’une étape. Quoi qu’il arrive, on sera contents de le retrouver à Castres." En attendant, on espère une éruption violente du volcan Barlot !

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