Revenir plus forts ou être "rayés des listes", le dilemme des entraîneurs français

  • Philippe Benetton et François Gelez à Vannes dimanche dernier
    Philippe Benetton et François Gelez à Vannes dimanche dernier
  • Jean-Jacques Crenca ne sera pas conservé par Agen à la fin de la saison
    Jean-Jacques Crenca ne sera pas conservé par Agen à la fin de la saison
  • Gelez et Benetton, c'est fini à Perpignan
    Gelez et Benetton, c'est fini à Perpignan
  • Illustration rugby
    Illustration rugby
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TOP 14 - De l’aveu du syndicat des entraineurs et éducateurs, Tech XV, ils sont de plus en plus d’entraineurs français à rechercher un club. À l’instar de Jean-Jacques Crenca ou de François Gelez, ces techniciens sont à l’écoute de nouveaux défis qui sont souvent confiés à des entraineurs venus d’autres horizons. À défaut de l’accepter, comment y remédier ?

Ils ont en commun un passé agenais et la récente collaboration avec la sélection algérienne, mais Jean-Jacques Crenca et François Gelez ne pensaient pas l’être un jour comme étant "disponibles" sur le sélectif marché des entraineurs. La concurrence est déjà forte entre coaches tricolores, mais celle-ci s’est renforcée depuis l’arrivée - massive - de compétences étrangères dans le Top 14, attirées par la puissance économique de nos clubs. S’en plaindre serait une erreur. Il faut s’en enrichir. Se scléroser et s’enfermer en disant qu’il ne faut que des entraineurs français n’est pas la solution. C’est l’occasion de se remettre en question, dit de suite François Gelez.

Seulement, le piège est facilement devinable si l’on ne prend pas des précautions. On est un peu trop dans la recherche du résultat sans trop regarder la manière. Cela m’étonne car il faut de plus en plus de spectacle pour la télé, constate quant à lui Jean-Jacques Crenca.

Jean-Jacques Crenca ne sera pas conservé par Agen à la fin de la saison
Jean-Jacques Crenca ne sera pas conservé par Agen à la fin de la saison
Peut-être qu’il faudrait que je change de nom et que j’en trouve un à consonance argentine, anglaise ou néo-zélandais (Crenca)

Si le phénomène est récent, et lié à la mondialisation du Top 14 qui attire, on se demande quand même pourquoi les dirigeants français aiment tant aller voir à l’extérieur ? J’ose espérer que ce n’est qu’un cycle. Dans le rugby, on se copie beaucoup et certains ont eu des résultats. Alors, tout le monde s’est engouffré. C’est très dur à vivre, confesse Jean-Jacques Crenca.

Une mode ? Peut-être qu’il faudrait que je change de nom et que j’en trouve un à consonance argentine, anglaise ou néo-zélandaise pour que cela marche mieux avec les mêmes qualités, sourit-t-il. Qu’à moitié. On s’aperçoit qu’il y a beaucoup d’entraineurs étrangers, mais ce n’est pas pour ça que le rugby évolue en bien, poursuit ce spécialiste des avants. À trop vouloir uniformiser et internationaliser, on perd un peu ce rugby qui faisait notre force. Un raisonnement qui s’applique aussi bien aux entraineurs qu’aux joueurs.

Gelez et Benetton, c'est fini à Perpignan
Gelez et Benetton, c'est fini à Perpignan

14% : C’est le pourcentage de staffs 100% français dans le Top 14 lors de la saison 2016-2017

L’école française a fait ses preuves, à l’instar de celle de Robert Bru qui a fait référence dans le monde pendant des années, assure François Gelez. Ce dernier remarque que l’on est souvent dans le court terme parce que l’on a un championnat à fort enjeu qui ne permet pas de réfléchir sur le long terme.

L’hémisphère Sud le permet davantage. Il expérimente. On est toujours dans le match suivant avec des saisons très longues. Il faut retrouver ce qui faisait la spécificité du rugby français il y a quelques années, enchaine ce spécialiste des lignes arrières. C’est à dire un rugby un peu particulier, basé sur le déplacement et la recherche de duels, de l’aveu de Jean-Jacques Crenca qui voit plus loin encore : Si l’on veut une équipe nationale forte, cela partira des clubs. Et tous les deux semblent du même avis quand il s’agit d’affirmer que la corporation a pris conscience de ce phénomène.

Illustration rugby
Illustration rugby

Se former ou passer à autre chose

Pour avancer, il faut reconnaître les points positifs de cette "anglo-saxonnisation" avec un premier constat évident : disposer d’un technicien anglophone est l’assurance de pouvoir mieuxfaire passer un message à des effectifs toujours plus cosmopolites. De plus, il faut reconnaître que le rugby du Sud a pris de l’avance en terme de professionnalisation, et ces entraineurs étrangers ont amené de nouvelles habitudes de travail, constate François Gelez. Cela se traduit par la technologie mise au service du rugby comme les logiciels d’entrainements, d’analyse vidéo ou les GPS et il faut savoir maitriser ces instruments. Surtout, savoir les interpréter pour les mettre en corrélation avec un vrai projet de jeu, poursuit-il. C’est là que les Néo-Zélandais font notamment la différence. Le Top 14 semble être au sommet d’une vague, mais attention à ne pas trop se morfondre dans le creux.

Pour rebondir, l’ancien ouvreur international est revenu à Tyrosse s’occuper des jeunes, après son départ de l'Usap en 2016, et a eu quelques touches à l’intersaison qui n’ont pas abouties. Cela permet de faire le point et le bilan, de continuer à se former pour arriver plus fort la prochaine fois qu’un challenge se présente, explique-t-il. Pour l’ex-pilier des Bleus, non reconduit la même année au SUA, au profit justement de l’Argentin Mauricio Reggiardo, la situation est plus ou moins similaire. Je m’aperçois que si je ne trouve pas sur cette deuxième année, ce sera fini et il faudra s’orienter sur autre chose. Je reprendrai un boulot. On est vite rayé des listes. Le giron amateur ne lui fait pas peur car c’est la passion qui l’anime, l’envie de faire progresser des garçons à travers des aventures sportives et humaines. Des aspects parfois oubliés au profit du simple ratio investissement/résultat.

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