Coups de folie à Rajon ! 12 ans après, retour sur une "générale" mémorable

  • Bourgoin - Agen en octobre 2005, bagarre générale
    Bourgoin - Agen en octobre 2005, bagarre générale
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Le 8 octobre 2005, le stade Pierre-Rajon était le théâtre d'une des bagarres les plus iconiques du Top 14 entre Bourgoin et Agen, avec la participation de quelques spectateurs. Retour sur le ring.

C'était il y a douze ans, mais magie de l'internet, les images restent toujours dans l'actualité. Tapez deux mots clés "bagarre" et "rugby" sur YouTube et vous reviendrez en un éclair le 8 octobre 2005 au stade Pierre-Rajon. A l'affiche ce soir là, dans le cadre de la 8e journée de Top 14 : le CS Bourgoin-Jallieu face au SU Agen. Un match entre cadors de l'époque mais un match resté dans les mémoires pour autre chose que le rugby proposé. La victoire de Bourgoin 33-6 ? Eclipsée par une bagarre comme l'époque n'en fait plus. La définition même d'une "générale". Le plus beau, c'est qu'elle a été déclenchée au moment même où l'arbitre Frank Maciello venait de siffler la mi-temps…

Je me tourne vers l'arbitre de touche pour lui dire ce qu'il s'était passé (...) Je n'ai rien oublié de sa réponse : 'Dégagez, je ne veux rien savoir.' Pour moi c'était clair, on était à Bourgoin...

L'histoire c'est l'ex-centre agenais, Luc Lafforgue, qui la raconte avec en point de départ une fourchette dont s'est plaint le deuxième ligne agenais Jean-Michel Parent. "Jean-Mi (Parent) est venu me dire qu'il avait été victime d'un coup. Il avait un œil qui saignait après une fourchette du numéro 9 (Michael Forest). Je me tourne vers l'arbitre de touche pour lui dire ce qu'il s'était passé. Douze ans après je ne me souviens pas de tout mais je n'ai rien oublié de sa réponse : 'Dégagez, je ne veux rien savoir.' Pour moi c'était clair, on était à Bourgoin, il ne fallait pas s'attendre à autre chose. Mais Forest était tout près. Je suis allé lui parler et le prévenir qu'on avait vu son geste et qu'on allait le soigner en deuxième mi-temps. Il m'a repoussé en esquissant un coup de tête. Et là, j'ai eu une réaction un peu exagérée..." Deux uppercuts partent, Forest tombe. "Je ne lui ai pas fait grand mal, je ne suis pas un boxeur", se persuade Lafforgue.

Mais Julien Bonnaire ne cherche pas à comprendre et se jette sur Lafforgue. "J'ai vu Mika (Mickaël Forest) se faire agresser, expliquera t-il. J'y suis allé pour le défendre." La bagarre devient générale où on voit Benjamin Boyet arriver lancé et passer par dessus Yannick Larguet, Cabello frapper façon kung-fu, Jérome Miquel servir des crochets et Olivier Milloud faire reculer trois avants agenais. Surtout, des spectateurs le long de la main courante mettent quelques petits coups en douce. Au milieu de tout ça, Guillaume Bousses fait figure d'anomalie. Le centre pris à partie par Sorin Socol garde ses nerfs. "Je ne suis pas un bagarreur dans l'âme. Ce qui peut expliquer pourquoi je n'ai jamais eu cette étiquette de 'gros plaqueur', de destructeur. Je n'aime pas cogner ni ce qui va être représentatif d'une force. Sur les images, on voit que je ne me bats pas. J'essaie d'écarter et je sens quelqu'un dans mon dos (Socol). J'évite. Il fait le tour mais j'avance vers lui sans lever les bras. Je n'ai pas gagné la bagarre mais je suis allé chercher le respect.. Ces images je m'en suis servi quand j'étais entraîneur au Servette de Geneve avant un derby. Je voulais monter à mes joueurs qu'il n'était pas nécessaire de se battre. Et qu'on pouvait gagner en restant droit."

Le calme finit par revenir. Retour aux vestiaires mais détour par celui de Frank Maciello pour les capitaines Lafforgue et Bonnaire qui recevront à huis-clos un carton rouge. A 14 contre 14, Bourgoin s'envolera.

Cela nous a rappelé que le rugby était un sport de combat

La commission de discipline fera payer cher : suspension du stade Pierre-Rajon pour un match, 20 000 euros d'amende au CS Bourgoin-Jallieu, 10 000 euros au SUA, 50 jours de suspension pour Bonnaire et 70 pour Lafforgue. "C'était une échauffourée comme il peut y en avoir dans le rugby. Mais dans cette même période, il y avait eu plusieurs matches avec des bagarre et il avait été fait un exemple, relativise Lafforgue. J'avais accepté des TIG (travaux d'intérêt généraux) et j'étais donc allé entraîner dans des clubs à droite, à gauche. Je n'avais jamais pris de rouge. C'est une vieille histoire, on peut en rigoler maintenant. Je ne l'ai pas mal vécu." Surtout qu'Agen, après cette bagarre s'est réveillé en Top 14 après un début de saison décevant. Pépito Elhorga veut croire au lien de cause à effet. "Au delà de la bagarre, c'est le fait d'avoir revu les images qui nous a fait réagir. Et je peux vous dire qu'on ne les a pas revues qu'une seule fois. Christian Lanta et Christophe Deylaud pointaient les joueurs et leur comportement ce jour là avec un laser rouge. Ce jour là, on avait été mis sur le reculoir par les Berjalliens. On a eu une prise de conscience. Et on a commencé à attaquer les matches différemment. Cela nous a rappelé que le rugby était un sport de combat."

Luc Lafforgue sourit : "Christian (Lanta) avait parlé à ses avants en leur mettant un coup de râpe. Il avait fait remarquer que c'était les trois-quarts qui s'étaient battus. Ce match nous a permis de nous resserrer. Ce fut un mal pour un bien" valide t-il.

Agen finira 5e et Bourgoin 6e mais à l'époque il n'y avait pas les barrages… Et la célébrité sur youtube qu'aura gagnée Luc Lafforgue est bien insuffisante pour le consoler. Il note en souriant l'injustice qui en découle : "De ma carrière on ne me parle presque que de ça. Même mes élèves m'en parlent. Personne en revanche pour me parler de la finale de 2002 (perdu avec Agen face à Biarritz, ndlr) ou des essais que j'ai pu marquer."

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