Miquel : "Est-ce que je serai capable de répondre physiquement ?"

Par Rugbyrama
  • Le troisième ligne d'Agen, Antoine Miquel, sonne la charge contre Paris - 28 mai 2016
    Le troisième ligne d'Agen, Antoine Miquel, sonne la charge contre Paris - 28 mai 2016
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TOP 14 - Révélation la saison dernière en Pro D2, le troisième ligne de 23 ans débute la saison de Top 14 avec le statut de titulaire au SUA. Une métamorphose pour un joueur qui a douté de ses capacités et de sa motivation lors de ses premiers entraînements avec l'équipe première.

Vous étiez capitaine à Montpellier pour l'ouverture de la saison. Comment expliquer qu'à votre arrivée au sein du groupe professionnel en 2015, vous n'étiez pas certain de vouloir vous confronter au plus haut niveau ?

Antoine Miquel : Je me posais la question parce que j'avais des perspectives : à cette époque, j'étais en stage en entreprise dans le cadre de ma licence et je savais que si le rugby ne marchait pas, j'avais l'entreprise qui était prête à me proposer quelque chose. Et puis quand je suis arrivé chez les pros, je ne m'attendais pas à ça : au travail demandé, à l'exigence requise comme faire attention à son poids. Chez les jeunes quand on parle rugby , on pense d'abord à s'amuser. On fait les cons, on joue pour le plaisir . En arrivant chez les professionnels, je n'avais pas cette sensation de plaisir. C'était dû notamment au fait de ne faire que les entraînements avec le groupe professionnel mais de ne pas être appelé pour faire des matches et d'être invité à redescendre avec les espoirs. Il me manquait cette part de plaisir sur le terrain. C'est ça aussi qui m'amenait à douter. Et puis arriver dans un groupe où les jeunes étaient minoritaires, ce n'était pas facile. J'ai ressenti une distance avec les anciens. En espoirs, je ne ressentais pas ça, même s'il pouvait y avoir quatre ans d'écart entre certains joueurs. Il y avait davantage de cohésion entre jeunes et anciens qu'il ne pouvait y en avoir en équipe première à cette époque.

C'était une façon de vous tester ?

A. M. : Je pense que j'étais timide. On a pu me le reprocher. A deux reprises j'ai effectué la préparation physique avec le groupe professionnel mais je suis redescendu avec les espoirs après un mois et demi, deux mois, dès que les matches ont commencé…. Les entraîneurs trouvaient que je ne m'imposait pas à assez. Je pensais que c'était ainsi que j'allais m'intégrer. En réalité, ce que les entraîneurs attendaient c'est que nous fassions plus qu'être présent, qu'on soit capable tout à la fois d'écouter les conseils mais aussi d'exprimer notre point de vue aux joueurs les plus vieux. Ils voulaient que se mette en place un dialogue et non pas que ça aille dans un seul sens.

De n'avoir jamais connu de sélection en équipe de France jeunes expliquait-il cette timidité ?

A. M. : J'ai longtemps entendu que pour espérer signer un contrat professionnel, il fallait passer par les équipes de France jeunes. Finalement ce n'est pas vrai. Mais quand je suis arrivé, je me suis posé des questions. Tous les jeunes qui évoluaient avec les pros étaient passés par les équipes de France. Forcément je me suis interrogé : je n'ai jamais été appelé, est-ce que j'ai vraiment le niveau ?

Aviez-vous peur des contacts, des impacts ?

A. M. : Non ce n'était pas de la peur. Mais parfois j'allais aux entraînements en sachant que je tiendrai les boucliers et je me demandais comment je ferai pour tenir physiquement. A l'époque, je n'étais pas prêt comme maintenant mais si je ne suis pas un golgoth. Disons que je redoutais ces moments mais sans en avoir peur. C'est peut être une forme d'humilité. Est ce que je serai capable de répondre physiquement, je me la pose encore cette question. Pour le Pro D2, même si c'est costaud, je le sais. Mais pour le Top 14, j'ai vu après ces deux premiers matches que c'était très exigeant. Je ne peux pas continuer à jouer en Top 14 en étant comme je suis physiquement (1,90m ; 105kg). Il faut que je m'étoffe encore. Quand je me vois à côté des monstres, je sais qu'il y a une grosse différence entre nous. Au moins j'ai des objectifs...

Ca va plus vite en Top 14. Mais le match à Montpellier m'a fait changer d'avis sur l'âpreté du championnat : j'ai trouvé qu'il y avait davantage de petits coups. Ca m'a fait bizarre. Je pensais que le pro D2 abritait un peu le rugby de l'ancien temps, avec des coups. En réalité, ça l'est de moins en moins même si ça reste un jeu rugueux. Et je pensais qu'en Top 14 tout serait basé sur la vitesse. Oui ça va plus vite mais il y a quand même des petits coups sous les rucks, sous les mêlées qui ne se voient pas forcément. Et je ne m'attendais pas à ça. Après comme il y a la vidéo, c'est plutôt mesquin mais sans suite. En Pro D2, il y avait vraiment les coups après.

Avez vous le sentiment qu'il vous faudra devenir plus méchant ?

A. M. : C'est déjà un peu dans mon style et dans mon caractère. On me l'a souvent dit, j'ai presque une double personnalité. A la ville, je suis réservé, plutôt discret. Sur le terrain, je l'ouvre, comme si je devais compenser mon physique. Ça, je n'aurai pas besoin de le travailler. Sur le terrain, on me dit souvent que je suis un peu con.

Après la défaite à Montpellier, vous avez dit que vous aviez déjà joué des matches plus difficiles avec les espoirs...

A. M. : J'espère que ça n'a pas mal été interprété. J'ai exprimé ce sentiment par rapport à la pression ressentie, au contexte. Sur le terrain, je n'avais jamais affronté une équipe aussi solide. Mon impression est née du fait que je savais très bien que ça allait être dur et donc mentalement je me suis préparé en conséquence. A la fin, on relativise : ce n'était pas si dur que ça, on arrive à plaquer, à avancer avec le ballon. Après je ne pense pas que c'est plus facile en espoirs qu'en Top 14. ..

Quel a été le déclic, ce qui vous a fait passer des doutes aux certitudes ?

A. M. : C'est à partir du moment où on m'a fait confiance. Je me posais des questions parce que je ne jouais pas. Je restais avec les espoirs. On me disait "t'es pas loin" mais je restais avec mes questions.A partir du moment où j'ai commencé à jouer en Challenge européen (2015), j'ai pris confiance et j'ai été prêt à tout donner pour réussir.

Il y a des discours qui ont compté ?

A. M. : Ce qui a compté c'est d'avoir été bien encadré. Il y a eu Marc Giraud, Rémi Vaquin, Marc Baget, même Antoine Erbani. Au lieu d'avoir peur de la concurrence et d'essayer de me mettre de côté, lui comme les autres m'ont pris avec eux. J'ai apprécié cette aide. C'étaient des conseils sur mon jeu. Si je ratais une passe, on ne m'enfonçait pas, on me disait à la fin de l'entraînement, viens on va faire des passes tous les deux, des coups de pied. Ca apporte beaucoup.

La préparation et les deux premiers matches ont achevé de vous convaincre : ce que vous visez c'est le Top 14 ?

A. M. : Carrément. Et permetttre au club de rester dans l'élite. C'est sa place.

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