Laporte : "Je sais d’où viennent ces attaques"

Par Rugbyrama
  • Bernard Laporte
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  • Bernard Laporte va entreprendre une série de réformes
    Bernard Laporte va entreprendre une série de réformes
  • Bernard Laporte et Mohed Altrad
    Bernard Laporte et Mohed Altrad
Publié le Mis à jour
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AFFAIRE LAPORTE - Bernard Laporte, le président de la FFR, s'est exprimé concernant les attaques dont il fait l'objet. Il annonce qu'il ne démissionnera pas et continuera à oeuvrer dans la ligne qu'il s'est fixée : remettre sur le bon chemin le XV de France et le monde amateur.

Vous êtes sous le feu des critiques depuis quinze jours, accusé d’avoir interféré dans le verdict d’une commission fédérale en faveur du club de Montpellier présidé par Mohed Altrad, avec qui vous étiez jusqu’à hier lié contractuellement. Pourquoi êtes resté silencieux si longtemps?

Bernard LAPORTE : Je suis rentré à Paris samedi à 14 heures, en provenance d’Amérique du Sud et du Nord. Je n’étais pas en villégiature. Je défendais le dossier France 2023 à Medellin, Buenos-Aires et Miami... Je gardais un œil, aussi, sur les excellentes performances de notre équipe de France Féminines au Mondial irlandais et, si elles étaient parvenues en finale, j’aurais pu raccourcir mon voyage aux Etats-Unis pour aller les supporter à Belfast. Après la parution d’un premier article (paru dans le Journal du Dimanche), je ne voulais pas que mes éventuels propos interfèrent avec cette actualité. J’ai donc choisi de m’exprimer une fois revenu en France et le Mondial féminin terminé. J’ai ensuite pris 24 heures de réflexion, tenu compte de tous les mensonges publiés et il est temps pour moi d’y répondre.

Contestez-vous les faits qui vous sont reprochés ?

B.L : J’avais un engagement avec le groupe Altrad, oui ! Mais ledit contrat était parfaitement légal. Durant ma campagne, je n’ai pas arrêté d’annoncer que je serai un président de fédération bénévole et qu’à 52 ans, il me faudrait poursuivre ma carrière professionnelle. Au départ, je comptais même poursuivre ma collaboration avec RMC, où je prenais énormément de plaisir. Mais j’ai appris que SFR, qui appartient au même groupe que la radio, comptait dans un futur proche postuler sur des droits télévisuels du rugby français. Il y aurait pu avoir à juste titre conflit d’intérêts si moi, patron du rugby français, j’avais été toujours présent à l’antenne et donc salarié de ce groupe. J’ai donc mis un terme à ma mission. En revanche, j’ai poursuivi mes autres activités et notamment les conférences sur le management. Mohed Altrad m’a demandé d’intervenir pour motiver ses managers, j’ai dit oui. Et j’ai signé un contrat avec lui.

Les insinuations qui existent depuis quelques jours sont malsaines. Je mets fin à ma future collaboration avec le groupe Altrad. J’y perds de l’argent mais ce n’est pas grave

Pourquoi avoir renoncé à cet engagement ?

B.L : Je le répète, c’était parfaitement légal et prévu par les statuts de la FFR. Mais des personnes malveillantes s’en servant pour polluer ma politique fédérale et l’intérêt général du rugby dans une période décisive pour la candidature de la France en vue de l’organisation du Mondial 2023, j’ai décidé de tout arrêter. Les insinuations qui existent depuis quelques jours sont malsaines. Je mets fin à ma future collaboration avec le groupe Altrad. J’y perds de l’argent mais ce n’est pas grave. Je ne me suis pas engagé à la FFR pour m’enrichir. Pour cela, il me suffisait de rester dans le Top 14. Je pouvais prolonger à Toulon pour cinq ans de plus ou opter pour Montpellier pour trois fois plus d’argent ! J’avais aussi d’autres propositions en France et à l’étranger. J’ai pourtant choisi de m’engager dans le giron fédéral, au grand dam de certains qui doutaient de la sincérité de mon engagement.

Ne regrettez-vous pas d'avoir laissé la situation s'envenimer ?

B.L : Vu les chantiers qui attendent le rugby français, je cherche surtout à apaiser les tensions et interrogations.

Bernard Laporte va entreprendre une série de réformes
Bernard Laporte va entreprendre une série de réformes

Venons-en aux faits : avez-vous fait pression sur la Commission d’appel de la FFR pour qu’elle atténue les sanctions prises envers le MHR ?

B.L : Cette commission m’a sanctionné de 16 semaines de suspension il y a près de trois saisons et c’est donc la seule commission régalienne que je n’ai pas voulu changer lors de ma prise de fonctions. Ses membres sont en place depuis plusieurs années, nommés sous la présidence de Pierre Camou. Ils m’avaient lourdement sanctionné et je ne voulais pas qu’on dise "Laporte prend sa revanche en les destituant" ! Sur le fameux coup de pression qu’ils auraient reçu de ma part, je m’inscris en faux. Je n’ai fait qu’appeler le président (Jean-Daniel Simonet) au mois de juin pour lui indiquer que la situation était à l’apaisement avec la Ligue nationale de rugby. En ce sens, je lui ai dit : "Prenez vos décisions en hommes indépendants". J’ai rappelé que le climat était véritablement à la détente entre les deux institutions, qu’il pouvait sanctionner Montpellier ou le Racing 92 mais qu’il ne fallait pas s’acharner. C’est tout. Quand on analyse le travail de cette commission depuis trois ans, on note que sur les 29 dossiers de clubs professionnels parvenus en appel, 20 procédures ont vu les sanctions abaissées !

Je me rends bien compte que les réformes que je souhaite pour le milieu amateur ne sont pas comprises par tous au sein du milieu professionnel. On voit bien aussi qu’il y a une scission au sein de la LNR

Comment expliquer les démissions des membres de cette commission ?

B.L : Tout d’abord, permettez moi de dire que je suis gêné de voir monsieur Olivier de Chazeaux s’exprimer dans les médias : nous l’avons nommé lors du congrès de Bourges (en juin) et il n’a pas encore siégé une seule fois à ladite commission ! Concernant la démission de monsieur Philippe Peyramaure (secrétaire général de la commission d’appel), je me demande pourquoi elle intervient maintenant. Et pourquoi ne s’est-il pas opposé au moment du jugement ? Pourquoi n’a-t-il pas alors indiqué qu’il avait subi des pressions, si elles existaient ? Pourquoi a-t-il attendu que je sois attaqué dans la presse pour démissionner ? Poser la question revient à y répondre…

Désormais, comment arrêter la suspicion ?

B.L : Je vais rappeler que je n’interviendrai pas : les membres sont et resteront indépendants. Je n’aurai de relation qu’avec son président, monsieur Simonet, comme le stipule les statuts.

Bernard Laporte et Mohed Altrad
Bernard Laporte et Mohed Altrad

Revenons aux démissions…

B.L : Je ne suis pas là pour attaquer untel ou untel, mais je ne suis pas stupide non plus. Je me rends bien compte que les réformes que je souhaite pour le milieu amateur ne sont pas comprises par tous au sein du milieu professionnel. On voit bien aussi qu’il y a une scission au sein de la LNR, avec des clubs comme Montpellier ou Toulon qui sont proches de nos positions. Des avis qui doivent être partagés car le président Boudjellal vient d’être très confortablement élu au Comité directeur de la Ligue. D’autres clubs ont une position plus neutre et enfin d’autres sont ouvertement opposés. Et certains souhaitent donc qu’une union se fasse contre ma personne. Quitte à me dénigrer et, à travers moi, la FFR. Ils ne se rendent pas compte des enjeux ! Si on ne remporte pas l’organisation du Mondial 2023 à cause de ces allégations, c’est entre 50 et 80 millions d’euros en moins pour le monde amateur. C’est pour cela, je le répète, que dans un souci d’apaisement j’ai mis fin à mon contrat avec le groupe Altrad. Mais qui m’attaque ? Des gens qui avaient du pouvoir et qui l’ont perdu. Ils devaient penser que je ne me défendrais pas ! Ce sont les mêmes qui pensaient que je n’irais pas au bout de ma candidature à la FFR ! Ils se sont trompés, et se trompent encore.

C’est sûr que c’est moi, Bernard Laporte, qui a convaincu Mohed Altrad de mettre son argent chez les amateurs plutôt qu’ailleurs. Cela ne plaît pas à tout le monde…

Est-ce une bataille contre la LNR qui s’ouvre ?

B.L : Je ne suis pas contre la Ligue mais pour la Fédération. La FFR n’avait plus de pouvoir, mon rôle est de lui rendre. Moins de licenciés, un XV de France qui ne gagne plus, des sponsors qui s’en vont, un monde amateur qui se meurt… C’est la réalité du rugby français ! Et moi je veux tout le contraire : redonner une dynamique au monde amateur et donc à tout notre rugby. Mais de cela, ils ne veulent pas ! Quand quelqu’un issu du monde professionnel fait un pas vers le monde amateur, on lui tire dessus parce qu’il sort des rangs. Que veut faire Altrad ? Il nous a aidés pour la candidature 2023, il a fait une proposition écrite pour devenir sponsor maillot du XV de France qui nous assure, entre le fixe et les différents bonus, 60 millions d’euros sur 6 ans ! Sans compter qu’à titre personnel, il veut contribuer à un fonds de dotation de la FFR à hauteur de 4 millions d’euros pendant dix ans. Je le remercie mille fois pour être prêt à donner près de 100 millions d’euros en direction du monde amateur. C’est sûr que c’est moi, Bernard Laporte, qui l’a convaincu de mettre son argent chez les amateurs plutôt qu’ailleurs. Cela ne plaît pas à tout le monde…

Comment analysez-vous la volte-face d'Emmanuel Macron, qui ne vous accompagnera pas à Londres le 25 septembre pour défendre France 2023 ?

B.L : Là aussi, on cherche à utiliser les faits et à les détourner. Après nous avoir donné son accord et assuré de sa présence, le président de la République nous a fait savoir qu’il devait assister à une réunion à New-York, la veille (dimanche 24 septembre). Cela fait près d’un mois qu’il nous a prévenus de ne pas le compter dans la délégation, mais il nous a aussi dit qu’il ferait tout pour être présent.

Avez-vous pensé à démissionner ?

B.L : (Il s’emporte) Pas une seule seconde ! Je suis déçu par certains, oui ! On peut être en désaccord ou même en conflit, mais on se doit de discuter et de s’expliquer. On cherche à nous empêcher de mener les réformes promises pour de mauvaises raisons. Mais je dois passer outre et continuer à avancer. Je dois chercher à remettre sur le bon chemin le XV de France et le monde amateur, voilà la mission pour laquelle j’ai été élu. Je sais d’où viennent ces attaques, mais je reste combatif ! Je veux continuer à défendre les bénévoles qui font vivre notre rugby. Aux quatre coins de la France, à Carqueiranne, Dieppe, Gaillac, Sainte-Foy-la-Grande ou Metz.

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