Préparation physique : quand les joueurs français ont revu leur niveau d’exigence

  • Sébastien Tillous-Borde, François Trinh-Duc ou Pierre Bernard en pleine préparation physique - juillet 2016
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  • Julien Deloire, préparateur physique du XV de France - Juin 2016
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  • L'international français Rabah Slimani en pleine préparation physique - août 2016
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  • Vincent Clerc, le nouvel ailier de Toulon - juillet 2016
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TOP 14 - Alors que la reprise du championnat est imminente, les clubs du Top 14 ont un peu plus repoussé les limites de la préparation physique. Un exercice que les joueurs français ont appris à assimiler. Eclairage avec Julien Deloire, préparateur physique du XV de France.

Julien, depuis dix ans, l’approche des joueurs français en matière de préparation physique a-t-elle profondément changé ?

Julien DELOIRE : La plus grande évolution est au niveau des mentalités. Les joueurs ont assimilé que leur statut n’est plus simplement d’être joueur de rugby mais des athlètes de rugby. La préparation physique doit dépasser le petit temps consacré à l’intersaison. C’est un travail au quotidien. Mais cela ne signifie pas que les charges de travail doivent être lourdes mais régulières avec une place prédominante accordée à la sphère de la récupération. Les mecs sont alertés et, pour une majorité, très curieux pour améliorer leurs performances.

L’arrivée massive de joueurs anglo-saxons, dont on connaît la culture autour de la préparation physique, a-t-elle participé à cette prise de conscience des rugbymen français ?

J.D : C’est indéniablement un facteur parmi d’autres. Quand tu as la chance d’avoir dans ton effectif des Wilkinson et Giteau, c’est un enrichissement culturel supplémentaire. On ne peut pas imaginer voir un Anglais débarquer en séance de musculation sans ses chaussures d’haltérophile. Ce sont ces petits détails qui ont sensibilisé les joueurs français pour aller vers un niveau d’exigence optimal. C’est franchement une aide.

Julien Deloire, préparateur physique du XV de France - Juin 2016
Julien Deloire, préparateur physique du XV de France - Juin 2016
On ne peut pas imaginer voir un Anglais débarquer en séance de musculation sans ses chaussures d’haltérophile. Ce sont ces petits détails qui ont sensibilisé les joueurs français

Vous l’avez dit, les joueurs ne peuvent pas se construire "une caisse" en seulement six semaines. Mais comment peuvent-ils y parvenir au cours des saisons qui sont déjà surchargées ?

J.D : En l’espace de dix ans, les staffs de préparation physique se sont grandement étoffés. On a aujourd’hui jusqu’à quatre préparateurs par club. Mais au-delà de ces compétences à disposition, les joueurs sont désormais plus autonomes dans leur travail. Beaucoup enfin se tournent vers des approches privées qui sont des bénéfices autant physiques que psychologiques. Les joueurs ont le sentiment de faire une démarche supplémentaire pour leur apporter un plus.

La préparation physique est-elle mieux adaptée, mieux ciblée ?

J.D : Oui et heureusement quand on voit l’enchaînement des charges de travail d’une saison à une autre. Cet enchaînement est vraiment énorme. S’il n’y avait pas eu un accroissement des compétences pour quantifier les charges de travail, le rugby pourrait faire encore plus dégât. D’un point de vue médical, cela pourrait être raide et le nombre de blessés vraiment inquiétant.

On a le sentiment que l’on repousse toujours plus loin les limites du corps humain… La marge est-elle encore importante ?

J.D : Je pense sincèrement que oui. Même la préparation physique lors de la Coupe du monde ne se fait que sur quatre, cinq semaines. C’est dérisoire quand on compare avec des athlètes olympiques qui peuvent se préparer sur plusieurs mois et même plusieurs années. A cette échelle là, notre planification est minime. Avec une période un peu plus prolongée, les joueurs seraient plus souples, travailleraient plus en détail sans tout superposer.

L'international français Rabah Slimani en pleine préparation physique - août 2016
L'international français Rabah Slimani en pleine préparation physique - août 2016
Au temps où il était international, Vincent Clerc était le joueur complet par excellence

La nouvelle convention signée entre la LNR et la FFR va-t-elle justement permettre d’améliorer la condition physique des Internationaux ?

J.D : Cette convention dégage de vraies plages internationales et amène de la clarté dans la préparation des joueurs entre leur passage en club et en équipe de France. Je pense notamment au Tournoi des Six Nations où l’on évite ces aller-retour. Pour nous, préparateur physique du XV de France, nous allons mener une réflexion sur la gestion d’un bloc de sept semaines. Au lieu d’avoir beaucoup de choses à réviser en six jours, on abordera des points avec une plus grande précision.

A l’issue de la dernière Coupe du monde, Philippe Saint-André avait pointé les lacunes des internationaux français en terme de vitesse pure. Comment est-il possible d’y remédier ?

J.D : On ne touche quasiment pas au potentiel de vitesse d’un joueur. C’est difficile de gagner en développement. En revanche, on peut arriver à ce que les joueurs ne soient pas "en sommeil" sur certaines intensités de course qui peuvent être décisives. Ce sont des actions qui sont exacerbées au niveau international. Ça expose les fessiers, les ischio-jambiers à énormément de tension musculaire et donc ça se prépare. Si un joueur ne fait pas ce travail de façon régulière, il aura un manque. Dans la semaine, c’est notamment essentiel d’amener les trois mecs du fond du terrain à une certaine intensité de course pour qu’ils puissent l’encaisser le week-end.

Quel est le joueur qui se rapproche de l’athlète parfait ?

J.D : Au temps où il était international, Vincent Clerc cristallisait toutes les qualités du sportif de haut niveau. C’était un sprinteur avec une grosse caisse tout en restant fort au contact. C’était gainé. Il était rigoureux avant les autres et pas seulement à l’entraînement mais aussi sur tout ce qui est nutrition, sommeil, soins. Il n’a pas eu besoin, comme beaucoup, d’attendre une grosse blessure pour être sensibilisé à l’importance de la préparation physique. C’était le joueur complet par excellence.

Vincent Clerc, le nouvel ailier de Toulon - juillet 2016
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