Cudmore, la dernière en son royaume

Dimanche face au Stade français, Jamie Cudmore jouera peut-être son dernier match en Jaune et Bleu. Ce sera en tout cas, après onze saisons, son ultime tour d'honneur sur la pelouse du stade Marcel-Michelin. Cela fait un petit moment que je suis là, et ce dernier match à domicile va être plein d'émotion confie le Canadien.

A 37 ans, Cudmore quitte l'Auvergne sur une saison gâchée par les blessures, dont il n'a disputé que six matches. De retour à Pau la semaine dernière après quatre mois d'absence, Cudmore veut soigner ses adieux à un public qui l'adule. Prendre autant de plaisir sur le terrain et en dehors avec les supporters, le groupe et tous ceux qui sont passés ici, ça a été une période magnifique de ma vie. Ça va être triste que ça se termine dimanche.

Une tournée avec les Canucks avant Oyonnax

Avant de rejoindre Oyonnax, Cudmore ne disputera pas de dernières phases finales avec Clermont. Appelé par le Canada pour disputer trois tests (Japon, Russie et Italie) en juin, il a dit oui à sa sélection nationale et quittera le club après le déplacement à Toulouse, le weekend prochain. La saison est tellement longue en France qu'on ne peut pas tout faire. Je privilégie mon pays, depuis toujours, c'est grâce à eux que je suis là. J'ai été prévenu la semaine dernière, j'ai discuté avec le coach et j'ai pris une décision. Ça a été très compliqué parce que j'étais tiraillé entre les deux. Mais au fond de moi, je suis Canadien avant tout. Je souhaite le meilleur au club, je pense qu'on a moyen d'être champion de France et je souhaite que ça arrive.

Après une saison quasi blanche, Cudmore n'aurait de toute façon probablement pas été titulaire en deuxième ligne lors des phases finales. L'entraîneur Franck Azéma, qui dispose de nombreuses solutions à son poste, a accepté le choix de son joueur avec philosophie. Mais tenait à lui offrir une sortie à la hauteur de ce que "le bûcheron de Squamish" a apporté au club depuis son arrivée en 2005 : C'est un monument ici. C'était important pour moi de le remettre dans le groupe ce weekend avant qu'il parte, pour qu'il foule une dernière fois la pelouse du Michelin et salue le public. C'est du bon sens pour moi. Jamie est reconnu partout. Je peux en témoigner en étant avant à Perpignan, on savait que Cudmore c'était difficile à jouer...

Craint par les adversaires, précieux pour ses partenaires

Le deuxième ligne Sébastien Vahaamahina, à ses côtés depuis bientôt deux saisons, explique avoir progressé à son contact. Après l'avoir redouté comme adversaire : Il m'a donné beaucoup de conseils, sur le travail dans les rucks par exemple, et ça m'a beaucoup aidé. Avant, je le voyais comme un méchant. Sur le terrain tu ne voulais pas le rencontrer. Mon premier match titulaire en Top14, c'était à Clermont. A la dixième minute, il y a eu une bagarre, et je l'ai évité...

Le demi de mêlée Morgan Parra évoque lui en souriant les nombreuses fois où le colosse canadien l'a sorti de mauvais pas. Et insiste sur l'impact exceptionnel de son coéquipier : Au delà du joueur rude qu'il est, il a l'intelligence du jeu, il se déplace plus vite que les autres deuxième ligne. Sur le terrain, quand tu as Jamie avec toi, tu peux aller à la guerre. J'ai eu la chance qu'il me prenne sous son aile quand je suis arrivé. Pouvoir commander ce genre de mec qui fait les tâches les plus dures et les plus ingrates pour me mettre dans les meilleures dispositions, ça a été important pour moi.

Un nouveau tweet avant la finale ?

Cet impact physique et cette agressivité ont manqué à Clermont il y a près d'un an, face aux champions de France parisiens que Cudmore retrouvera dimanche. Victime de plusieurs KO les semaines précédant la finale du Top14, il avait vécu la défaite de ses coéquipiers face au Stade français depuis les tribunes, et garde de l'amertume de cette défaite : On était largement la meilleure équipe mais ce sont eux qui ont gagné... On a toujours ça en travers.

Agacé par l'arbitrage, il l'avait fait savoir, en interpellant Pascal Gaüzère depuis les tribunes. Franc, entier, comme toujours. En onze ans, j'ai toujours essayé de tout faire à 100%, jouer à fond pour le groupe et faire avancer le club. Je suis quelqu'un d'entier, ça, on ne peut pas me l'enlever. Depuis ses premiers matches pros avec Grenoble en 2003, le colosse a appris à canaliser son énergie mais parfois, la soupape lâche. Pour une explication virile avec Paul O'Connell, un tacle à l'organisation de la Coupe du monde 2015 ou un tweet rageur après l'élimination en Coupe d'Europe cet hiver.

Au soir de la défaite face à Bordeaux en Champions Cup, alors qu'il est blessé, Cudmore publie un message réclamant du ménage au club et le retour de Vern Cotter. Son coach Franck Azéma a pardonné : On en a parlé tous les deux. A l'époque, je trouvais que ce qu'il avait dit était inadmissible, il aurait pu le dire en interne. Mais je ne voyais pas pour un tweet effacer douze ans de carrière. Ce serait prétentieux de dire que je peux mettre au frigo un mec comme ça. Ce qui est important, c'est ce qu'il va donner dimanche et la façon dont il va quitter le club.

Enverra-t-il un nouveau tweet pour ses potes s'ils sont en finale le 24 juin prochain ? J'espère ! Ça ne pourra que leur faire du bien. Comme mon dernier tweet, qui n'a fait que du bien. Je n'ai aucun regret de tout ce que j'ai fait et je veux poursuivre ma vie comme ça.