Qu'es-tu devenu Gérald Merceron ?

  • Gérald Merceron avec les Bleus en 2001
    Gérald Merceron avec les Bleus en 2001
  • Gérald Merceron avec Clermont en 2004
    Gérald Merceron avec Clermont en 2004
  • Gérald Merceron avec La Rochelle en 2007
    Gérald Merceron avec La Rochelle en 2007
  • Gérald Merceron avec les Bleus en 2003
    Gérald Merceron avec les Bleus en 2003
Publié le Mis à jour
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Gérald Merceron a vu le rugby devenir professionnel. Il a passé dix ans à Clermont, avant de terminer sa carrière à La Rochelle en 2008. Aujourd'hui, il a laissé le ballon ovale de côté pour se consacrer uniquement à sa chocolaterie.

Il a connu 32 sélections avec le XV de France en 4 ans, participé à 4 Tournoi des 6 Nations, remporté un Grand Chelem en 2002... Cette année-là, l'"ouvreur chirurgical" devient l'un des meilleurs réalisateurs de l'histoire de cette compétition avec 80 points inscrits : Wilkinson a fait mieux en 2001 (89 points), et O'Gara en 2007 (82 points).

Pourtant, Gérald Merceron le perfectionniste parle avant tout de ce qu'il manque à son palmarès : Quelques sélections de plus, et surtout un Brennus !. Ce bouclier, il en a rêvé mais il lui a échappé à deux reprises, à chaque fois face au Stade toulousain, en 1999 puis en 2001. Quand Clermont l'a enfin gagné, en 2010, j'en ai pleuré, admet l'ancien Jaunard.

A 32 ans, Gérald Merceron n'était plus si désiré à l'ASM. Le club lui propose un contrat d'un an, mais le Cognaçais comprend qu'il ne jouera pas beaucoup. Il cherche alors un club près de ses attaches familiales et sollicite La Rochelle. L'aventure maritime dure trois ans. A l'ASR, je voulais encore me faire plaisir. J'ai commencé à buter alors que ce n'était pas prévu, je suis vite retombé dans les travers de mon jeu au pied... Puis j'ai eu 35 ans, et Rémi Talès est arrivé. Quand on voit le joueur qu'il est devenu... Les jeunes doivent prendre la place, c'est normal. Je n'ai pas fini en apothéose ! Gérald Merceron reste un compétiteur : il aurait aimé jouer un an de plus.

J'étais au fond du seau

Quand il arrête le rugby professionnel, il est en partie soulagé : En période hivernale, ça devenait une souffrance d'aller aux entraînements, de se rentrer dedans... J'ai connu 17 ans sans blessure, mais je crois que physiquement et mentalement, je l'ai payé en fin de carrière. Sitôt en retraite sportive, il travaille à temps plein chez un fournisseur de boissons. Mais quelques mois plus tard, son frère décède, et Gérald Merceron sombre. Il ne supporte plus les plaintes des clients, déprime, et lâche son travail.

Gérald Merceron avec Clermont en 2004
Gérald Merceron avec Clermont en 2004

J'étais au fond du seau. J'ai connu une bonne période de chômage, et j'ai eu du mal à m'en sortir, confie l'ancien international. Il se rend compte qu'il ne sait rien faire d'autre que jouer au rugby. Et il retombe dedans, en Fédérale 2, à Rochefort, à quelques kilomètres de La Rochelle. Ça m'occupait les soirs..., admet-il. Il y découvre le poste d'entraîneur aussi. C'est plus compliqué que de jouer : le joueur, il prend sa serviette, ses chaussures, et il met en œuvre ce qu'on lui demande. Là, il fallait gérer un groupe, préparer les séances, les analyser..., décrit Gérald Merceron. Le club rochefortais manque de peu la Fédérale 1... avant d'être relégué en Fédérale 3.

Dans la vie de Gérald Merceron, il est beaucoup question d'opportunités : celles qu'il a saisies, celles qu'il a ratées, celles qu'il n'a pas eues. Le Stade rochelais lui a proposé de prendre la tête des Espoirs, en 2012. Mais ce n'est pas le bon moment : l'ouvreur vient d'ouvrir sa boutique. Une belle opportunité qu'il laisse filer.

En 2014, il se fixe un nouvel objectif sportif : deux années pour entraîner une équipe de haut-niveau. Il signe à Saint-Jean d'Angély, alors en Fédérale 2, et espère avoir des propositions d'ici 2016. Le RACA monte en Fédérale 1 cette année, mais l'ancien ouvreur quitte le navire. L'opportunité en Pro D2 ou Top 14 ne s'est pas présentée, j'aurais bien aimé. J'aurais pu rester à Saint-Jean mais ça me faisait beaucoup d'heures, un entraînement en plus par semaine... Et c'est du semi-pro ! concède Merceron.

"Bleu-blanc-rouge", comme lui

Et l'ancien ouvreur a une chocolaterie à faire tourner près de La Rochelle, depuis 2012. Avant d'en arriver là, il a tâtonné : dans le rugby des années 2000, la reconversion n'était pas une question centrale. Les partenaires nous aidaient déjà mais aujourd'hui, on est rentré dans l'ère professionnelle. Si les joueurs ne sont pas trop idiots, ils ont les moyens d'assurer l'après, analyse Gérald Merceron.

Lui a cherché sa voie. Quitte à ne pas me sentir bien en entreprise, autant être à mon compte, pensait alors le futur commerçant. Il a repéré un local dans un centre commercial. Il pensait y installer une boutique de prêt-à-porter pour enfants. Jusqu'à ce que sa femme, Laëtitia, lui rappelle une réflexion qu'ils s'étaient faite quelques années auparavant : il manquait une chocolaterie dans ce centre !

Gérald Merceron avec La Rochelle en 2007
Gérald Merceron avec La Rochelle en 2007

Mon épouse a eu plus d'intuition que moi sur ce coup-là, ce qui est souvent le cas, sourit-il. Laëtitia contacte alors Yves Thuriès, meilleur ouvrier de France, parce qu' il était bleu-blanc-rouge, comme son international de mari. Les rendez-vous s'enchaînent et Gérald Merceron ouvre son magasin franchisé à Pâques 2012. Sur deux étagères, un ballon ovale trône. Certaines personnes viennent ici pour voir Gérald Merceron et pour échanger sur le sport qui l'a fait vivre pendant 17 ans.

Comme au rugby, le commerce lui offre du contact, mais moins violent que sur le terrain. Et l'ouvreur aux quelques 75 kilos préfère. Aujourd'hui, il aime aller au devant des clients. Comme lorsqu'il butait, il est précis, voire précautionneux. Ces chocolats, il faut les tenir bien à plat. Sinon, prenez un ballotin lait/noir, c'est plus simple à transporter, conseille-t-il à une cliente. Ça ressemble aux calissons, mais à la noisette, enchaîne-t-il. Gérald Merceron a goûté chaque produit, sauf les liqueurs. Je suis trop franc, trop honnête pour vendre un produit auquel je ne crois pas. Le chocolat est un produit noble, très technique, prolonge l'ancien rugbyman. Encore des adjectifs qui collent à son sport de prédilection.

Un monde à part

Il découvre aussi les contreparties du commerce, comme les amplitudes horaires et le stress : Je suis moins à l'aise qu'avec la pression du rugby. En tant que sportif de haut-niveau, on maîtrise alors que là, on est tributaire des autres, des clients qui viennent ou pas. Il faut remplir la caisse, répondre aux attentes de la franchise.

Grâce à cette nouvelle vie, Gérald Merceron a pris conscience des avantages de sa vie passée : Des gens bossent toute leur vie pour gagner ce qu'on gagne en tant que rugbymen de haut-niveau. A l'époque, avec ma femme, on se souciait moins du prix des vacances... Le rugby m'a permis de planifier ma vie actuelle. Certes, il y a des sacrifices, mais il faut se rendre compte de cette chance !

Gérald Merceron avec les Bleus en 2003
Gérald Merceron avec les Bleus en 2003

Actuellement, l'international n'a pas de projet dans le rugby. Il veut profiter de sa famille, de Camille et Aubin, ses enfants. Il continue de regarder les matches, observe les mutations de son sport. C'est un monde à part. Je ne crois pas qu'un 10 comme moi serait invité dans le rugby moderne, ça n'existe plus. Je suis trop gringalet !, s'amuse l'ancien ouvreur du XV de France. Il y sans doute un peu plus de muscu qu'à mon époque. Plus de protéines aussi, poursuit-il. Parfois, il a du mal à comprendre le manque de spectacle : A quoi cela sert que les mecs s'entraînent autant s'ils ne sont pas capables d'enchaîner trois passes dans un match ?!

Malgré cela, il laisse paraître une pointe d'admiration quand il parle d'une recrue de La Rochelle. Un autre ouvreur jaunard venu terminer sa carrière sur les bords de l'Atlantique : Brock James. Pour Gérald Merceron, la comparaison s'arrête là : Lui, c'est la classe quand il joue ! Il est toujours au top, pas comme moi quand je suis arrivé. Techniquement, au pied comme à la main, il est énorme : une passe des deux côtés, une passe vissée sublime... Derrière son comptoir, l'international ne semble pas encore tout à fait prêt à abandonner la balle ovale.

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