Jannie et Bismarck du Plessis, une "féroce fraternité"

  • Bismarck du Plessis lors du Mondial, son frère Jannie en fond
    Bismarck du Plessis lors du Mondial, son frère Jannie en fond
  • Les frères du Plessis et leurs épouses lors de la présentation du Mondial
    Les frères du Plessis et leurs épouses lors de la présentation du Mondial
  • Les frères du Plessis avec les Sharks en 2011
    Les frères du Plessis avec les Sharks en 2011
Publié le Mis à jour
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TOP 14 - Arrivés dans l'Hérault il y a un mois, les deux stars Springboks étaient très attendus par le public du MHR. Bismarck le pince sans rire et Jannie, plus débonnaire, se confient sur leur enfance, leur parcours et leurs rêves d'hommes.

Quand avez-vous joué votre premier match de rugby ensemble?

Jannie: En tant que joueurs de haut niveau, notre premier match côte à côte remonte au 7 juillet 2007 avec l'équipe d'Afrique du Sud. Mais nos premiers matchs ensemble remontent à l'époque où nous avions quatre ans et que nous jouions derrière notre maison, d'ailleurs nous marquions l'essai de la victoire pour l'Afrique du sud à peu près tous les jours. Ca doit donc faire trente ans qu'on joue ensemble!

Bismarck: Nous avons joué quelques matchs ensemble en club, mais en ce qui concerne le haut niveau, notre premier match ensemble était effectivement avec les Springboks.

Avez-vous compté ces matchs?

Bismarck: A peu de choses près, on se souvient de tous les matchs que nous avons joués ensemble. Sans avoir vraiment compté, on a une bonne idée du nombre que cela représente. Probablement quelque chose aux alentours des 150 matchs.

Comment décririez-vous votre relation?

Bismarck: Féroce.

Jannie: (Rires) Il y a une rivalité, mais dans le bon sens. Je dirais que notre relation est aussi inconditionnelle. Je n'ai jamais douté du soutien de Bismarck. Nous sommes à la fois dans un rapport de compétition et de respect mutuel.

Parfois, en nous voyant à l'entrainement, on peut douter de notre lien, car nous sommes durs l'un envers l'autre

Si vous deviez décrire votre frère en quelques mots...

Jannie: Bismarck est probablement la personne la plus déterminée que j'ai jamais rencontrée. Si il veut perdre du poids ou courir trois kilomètres sous un certain temps, il arrête de manger, il ne s'entraine que pour ça. Quand il a une idée en tête, il fait tout pour y arriver. C'est aussi quelqu'un qui se sublime quand il est sous pression. J'ai côtoyé beaucoup de joueurs et quand certain sont étouffés par la pression, elle met presque Bismarck en transe. Il a un grand cœur et pense toujours à ceux qu'il aime et pour finir, il aime les promenades à cheval quand il est seul à la ferme.

Bismarck: Jannie est un vrai grand frère et mon petit frère et moi avons passé notre enfance à le faire tourner en bourrique. Mais c'est un vrai pilier, aussi bien au rugby que dans ses relations humaines. Quel que soit l'endroit où je suis, si je me sens perdu, je sais que je peux me tourner vers lui, qu'il m'écoutera et me donnera des conseils. C'est une vraie bénédiction pour moi, car je sais que je pourrai m'épanouir tant que je serai à son contact. Comme il l'a dit, nous ne doutons jamais l'un de l'autre. Parfois, en nous voyant à l'entrainement, on peut douter de notre lien, car nous sommes durs l'un envers l'autre. Mais c'est parce que nous voulons tirer le meilleur l'un de l'autre, nous savons quand il faut mettre la pression. Enfin, le vrai Jannie est un moteur pour un groupe et il fera n'importe quoi pour l'équipe. Je l'ai vu jouer une finale de Currie Cup la main cassée, finale que nous avions gagnée contre toutes attentes. Il sait repousser son seuil de tolérance à la douleur pour le bien de l'équipe.

Combien de titres avez-vous gagnés ensemble?

Bismarck: Pas assez.

Jannie: Pas assez, non... Sur six finales de championnat national jouées, nous en avons gagné trois. Six aurait été mieux.

Les frères du Plessis et leurs épouses lors de la présentation du Mondial
Les frères du Plessis et leurs épouses lors de la présentation du Mondial

Quelle est la raison principale derrière votre venue à Montpellier?

Bismarck: La façon dont M. Altrad nous a approchés, sa vision pour le club et pour nous.

Jannie: M. Altrad nous a vraiment fait forte impression avec son comportement, sa personnalité. Nous cherchions un nouveau défi et nous voulions jouer pour une équipe qui écrit sa propre histoire, qui se fait un nom. C'est le cas de Montpellier, car si nous sommes performants ici, nous pouvons écrire l'histoire du club.

Jannie, pouvez-vous nous parler de votre projet de construction en Afrique du sud, auquel M. Altrad pourrait participer?

Jannie: Je n'en ai jamais discuté avec lui, à vrai dire. Mais oui, je souhaite construire un hôpital en Afrique du Sud. En France, vous n'avez peut-être pas idée de la chance que vous avez de disposer d'un tel système de sécurité sociale. C'est tout simplement le meilleur au monde à mon sens. En Afrique du Sud, il y a beaucoup de besoins dans ce secteur, et évidemment ceux qui ont besoin de soins sont toujours ceux qui ne peuvent pas les payer. Si vous avez les moyens d'avoir une assurance maladie privée, vous restez en bonne santé, sinon, vous restez malade. Dans la région où nous avons grandi, les soins ne sont pas les plus chers, mais ce projet pourrait changer des vies.

Bismarck: Nous avons une opportunité extraordinaire d'être ici. Mais quand nous ne serons plus là, j'espère qu'on pourra dire que nous avons fait une petite différence, notamment dans la communauté dont nous sommes issus. Nous venons d'un milieu très humble, une toute petite ville assez pauvre avec des gens dans le besoin, qui ne gagnent même pas un euro par jour. Et ces gens donnent tout pour aider leur proches quand ils tombent malade. Si nous en avons la chance, nous voudrions travailler dur pour améliorer les vies de ces personnes.

Notre premier investissement, c'était des vaches

Est-il vrai que vous avez appris à parler Zulu en grandissant?

Jannie: Le Sotho (il coupe). Le Zulu est parlé de la frontière du Mozambique, le long de la côte, jusqu'au Cap. Mais quand vous vous déplacez vers l'ouest et les montagnes du Drakensberg, nos Alpes même si elles ne sont pas aussi hautes, on parle le Sotho ou le Tswana (deux dialectes très proches, ndlr). Et nous avons en effet grandi en parlant Sotho, avant même d'apprendre l'Afrikaans, car tous nos amis étaient noirs!

Bismarck: Comment pouvait-il en être autrement? Nous avons grandi dans une ferme et il fallait bien que nous communiquions! C'est amusant car quand les amis de nos parents venaient avec des enfants parlant Afrikaans, nous ne pouvions pas jouer avec eux car nous ne parlions pas la même langue. C'est seulement à l'internat que nous avons appris à parler Afrikaans.

La légende dit aussi que vous avez acheté un tracteur pour la ferme de vos parents avec votre premier salaire...

Bismarck: En fait, c'étaient des vaches... Ca a été notre premier investissement. Puis Jannie et moi avons économisé pendant une année avant d'acheter notre première voiture ensemble.

Jannie, est-il vrai que vous avez failli abandonner vos études de médecine?

Jannie: C'est vrai oui (rires). Lors de ma troisième année, j'avais été sélectionné avec l'équipe d'Afrique du Sud des moins de 21 ans, ce qui était ma première sélection internationale. J'ai alors reçu une offre des Pumas, une équipe de deuxième division. Les temps étaient durs pour notre famille à ce moment-là et je me suis dit que je pouvais continuer à payer pour étudier ou être payé pour jouer au rugby. J'ai donc annoncé un samedi soir à mes parents que j'allais arrêter mes études pour les aider. Le dimanche, au retour de l'église, ma mère m'a fait venir dans la cuisine. Elle m'a dit qu'elle avait réfléchi à ma décision et qu'elle l'accepterait si je pouvais lui rembourser ce qu'elle avait investi dans mes études. Elle m'a alors fait passer un morceau de papier avec le montant qu'elle avait payé pour mon éducation... Puis j'ai fini mes études! Et à ce jour, je suis vraiment reconnaissant, c'était un conseil merveilleux, donné avec la manière forte.

Les frères du Plessis avec les Sharks en 2011
Les frères du Plessis avec les Sharks en 2011

Est-il encore monnaie courante pour les joueurs sud-africains de poursuivre leurs études?

Bismarck: J'ai aussi fini les miennes, j'ai étudié l'économie agricole et je possède désormais une compagnie d'assurances en Afrique du sud. Si vous aviez une mère comme la nôtre, vous finissiez vos études!

Jannie: Ma génération est probablement l'une des dernières qui se faisait repérer par les clubs en jouant à l'université. Le système a changé maintenant, avec les centres de formation des provinces. Mais je pense qu'il y a encore quelques joueurs qui poursuivent leurs études, comme Pat Lambie qui a obtenu son diplôme.

Comment appréhendez-vous le match face à Agen?

Bismarck: Je n'ai pas l'habitude de jouer le dimanche... Ce n'est pas un problème mais je trouve ça plus difficile.

Jannie: Ca change l'organisation de toute la semaine oui.

Bismarck: Agen joue un jeu expansif, tourné vers l'attaque. Ils ont subi une lourde défaite contre Toulon mais ils étaient dans le match jusqu'à l'heure de jeu. Je me méfie donc de cette équipe qui à un très bon quinze de départ.

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