Un dernier défi parisien à relever pour "l'altruiste" Dubois

On ne peut finalement jamais vraiment couper le cordon ombilical avec un milieu dans lequel on a baigné pendant plus de trente ans. C'est pourtant ce que s'apprêtait à faire en 2010 Jean-Frédéric Dubois à l'issue d'une dernière expérience comme ouvreur au Racing quand il est sollicité par Massy, alors en Fédérale 1.

François Guionnet, actuel président du club de l'Essonne, à l'époque vice-président, raconte: En seconde partie de saison, il jouait moins (avec le Racing, ndlr) et il venait nous rendre visite car il avait quelques relations à Massy. A partir d'avril, on lui a proposé de venir pour quelques entraînements, consultations... Et puis ça s'est tellement bien passé, on a tellement accroché qu'on lui a dit "reste chez nous, passe ton diplôme d'entraîneur (...), ajoute le dirigeant. Mais Dubois décline d'abord la proposition car, poursuit Guionnet, il venait de faire construire sa maison à Tyrosse (Landes) et avait une offre dans une boîte de gestion d'entreprise.

Jauzion: "Il avait toutes les qualités d'un numéro 10"

Il l'acceptera finalement. Pourquoi? Impossible de lui demander puisqu'il a décliné toute demande d'entretien avant la finale du Top 14 samedi contre Clermont, son dernier rendez-vous avec le Stade français avant de prendre en charge les arrières du XV de France après la Coupe du monde.

Dubois est sans doute revenu sur sa décision parce que le rugby est partie intégrante de sa vie. Dès la naissance plus précisément, rappelle Pierre Novion, l'un de ses éducateurs à Peyrehorade (Landes): Comme il a baigné dans un milieu où la balle ovale était reine, avec un père (Gaston) président et pierre angulaire du Peyrehorade Sport version moderne, une mère branchée rugby, deux frères aînés Philippe et Pierre qui jouaient aussi, il avait des prédispositions. Il les mettra d'abord au service de Peyrehorade, champion de France de Fédérale 2 en 1994 dont il est à 21 ans le leader de jeu, capable de faire la différence tout seul, explique Novion.

Mais le club landais devient trop petit pour lui. Direction ensuite Dax (1996-2000) puis Béziers (2000-2003), Colomiers (2003-2004) et Toulouse (2004-2007) avant, donc, le Racing-Métro. Un parcours de bon joueur de l'élite, excellent défenseur avec des qualités physiques hors du commun mais pas très rapide d'après Novion, ce qui sans doute ne lui a jamais permis d'être appelé chez les Bleus. Ce n'était pas un 10 explosif mais il avait toutes les qualités du numéro 10: savoir faire jouer les autres, alterner le jeu au pied et à la main, abonde Yannick Jauzion, son ancien coéquipier à Toulouse.

Novion: "Un altruiste"

Façonnée à Peyrehorade - c'était un altruiste, il s'intéressait déjà au jeu, il était très demandeur avec une capacité d'analyse judicieuse ,explique Novion - cette philosophie de jeu a donc ensuite été appliquée en tant qu'entraîneur en chef à Massy. Les deux premiers mois de préparation avec l'équipe 1, il a interdit aux joueurs de taper au pied. Il leur a demandé de jouer tous les ballons. En fait, il leur a réappris à jouer. Les joueurs étaient un peu surpris mais comme on a commencé à gagner..., explique ainsi Guionnet, le président de Massy.

Comme aujourd'hui au Stade français, cela a effectivement payé dans l'Essonne, avec notamment la première montée en Pro D2 du club au printemps 2012. Sans doute parce que Dubois possède par atavisme familial une ADN de formateur, dixit Guionnet. Il a une telle façon de faire passer le message que ça marche tout de suite. Son autorité naturelle est basée sur sa compétence et sa sérénité, développe le dirigeant. C'est quelqu'un de sincère, qui dit les choses comme il les pense, ajoute Jauzion. Affable, souriant et disponible, Dubois tentera de transposer avec la même réussite ses préceptes auprès du XV de France. Il lui reste d'abord un dernier défi à relever avec le Stade français.