Poirot : "Les Japonais auraient raison de cocher ce match contre nous"

Rugbyrama : Quels enseignements avez-vous tiré à froid de la défaite contre l’Afrique du Sud (17-18) ?

Jefferson Poirot : C’est souvent le même constat, à savoir qu’on a des situations mais on n’arrive pas à enchaîner, la faute à des erreurs techniques, de la fébrilité et des manques de concentration. En termes de temps de jeu effectif, c’était le match le plus intensif de ces huit dernières années pour le XV de France. Cela prouve bien qu’on n’a pas triché. Si nous avions été au niveau techniquement, ne serait-ce que 5% de plus pour chaque joueur, nous aurions gagné ce match.

Avez-vous été affectés de voir ce stade de France pas plein (55 000 spectateurs) et qui s’est vidé en un éclair au coup de sifflet final ?

J.P. : C’est vexant mais c’est compréhensible car on enchaîne les défaites. On y met du cœur mais cela ne suffit pas, il faut aussi des résultats. On comprend que les supporters, qui viennent nous voir à chaque fois, en aient un peu marre de venir et de repartir avec le même constat.

Nous faisons des fautes techniques indignes de notre statut d’international

Et les joueurs ?

J.P. : Chez nous aussi, il y a de la colère. On est tous des compétiteurs et cela ne nous fait pas rire du tout de ne pas gagner un match depuis cet été. On se crée des situations comme les autres nations mais notre déchet technique pollue clairement nos ambitions. Nous faisons des fautes techniques indignes de notre statut d’international. Malgré tout, on doit aussi chercher à positiver car s’apitoyer sur notre sort ne nous servira pas à relever la tête. C’est une chance que le groupe vive bien car sinon les problèmes seraient tout autres et on n’aurait peut-être pas perdu que d’un point samedi.

Le fait de pointer du doigt régulièrement le déchet technique risque-t-il d’inhiber certains joueurs ?

J.P. : Oui et non. On est des professionnels et on est payé pour bien faire notre métier. Si on doit être inhibé parce que notre "patron" nous demande de nous appliquer, c’est que nous n’avons rien à faire ici. La pression mentale est supérieure au niveau internationale, c’est vrai, mais ce n’est jamais sur l’initiative qu’on nous tombe dessus. Seulement sur le basique que nous, professionnels, devons savoir maîtriser. Et il y a des choses qu’on n’a pas le droit de faire.

Le Japon mérite d’être pris très au sérieux

Il s’agit désormais de bien finir cette tournée chaotique…

J.P. : On espère mais le Japon est vraiment une nation à respecter. En 2015, ils ont battu l’Afrique du Sud, contrairement à nous. Et même s’ils ont perdu récemment contre l’Australie et l’Irlande, ils ont aussi marqué beaucoup de points, chose que nous n’avons pas sur faire non plus. C’est une équipe joueuse, rapide et qui sera favorisé par le terrain synthétique et l’enceinte couverte. Elle mérite donc d’être prise très au sérieux.

Que dire de la mêlée japonaise, qui avait impressionné au Mondial en 2015 ?

J.P. : Elle est très bonne et très bien organisée. Le ballon sort très vite en attaque et ils restent très unis en défense. Ils arrivent à compenser le manque de gabarit par l’organisation. C’est la même chose sur les ballons portés où ils ont réussi à mettre un essai là-dessus aux Australiens.

À deux ans de leur Coupe du monde, battre la France serait un signal fort pour les Japonais…

J.P. : Ils auraient raison d’avoir coché ce match… Je me mets à leur place, ils ont déjà coupé la tête des Springboks il y a deux ans, ils ont leur Coupe du monde à préparer, ils montent en puissance… et ils se retrouvent face à une équipe de France qui a perdu six matchs d’affilée. S’ils n’ont pas coché ce match sur leur calendrier, c’est qu’il y a un problème. C’est pour cela que nous devrons vraiment répondre présent.