Et si c'était finalement le Grand Chelem de Lancaster ?

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6 NATIONS - En quatre mois, Eddie Jones aura su faire ce que Lancaster n’a pas réussi en quatre ans: remporter un Tournoi. L’Australien et son équipe ont arraché un Grand Chelem qui les fuyait depuis treize ans. Mais Jones est-il entièrement responsable de ce succès? Pas vraiment... Explications.

La situation est étrange et probablement inédite chez nos voisins anglais. En moins de 120 jours, le XV d’Angleterre est passé de la honte mondiale au triomphe continental. La première équipe à ne pas passer les phases de poules de "sa" Coupe du monde n’aura pas mis longtemps à relever la tête. Une victoire logique et le fruit d’un travail de longue haleine.

  • La Coupe du monde, un accident de parcours

Pour bien comprendre cet impressionnant rebond, il faut avoir en tête que si Lancaster et son équipe n’ont jamais gagné le Tournoi, ils ont caressé du doigt la victoire quatre fois en quatre ans (2e en 2012, 2e en 2013 - battus par le pays de Galles au goal average, 2e en 2014 et 2e 2015 - battus au goal average cette fois par l’Irlande -). Jamais loin, mais jamais vainqueur.

La vraie surprise n’est ainsi pas de voir l’Angleterre remporter le Tournoi mais bien le fait qu’elle fut incapable de battre l’Australie ou le pays de Galles à domicile il y a quelques mois. L’Angleterre devenue la triste victime de la poule de la mort. Un résultat qui scellait le sort de Stuart Lancaster en dépit de son bilan: 62% de victoires. Sur la même période, seules l’Afrique du Sud (68,75%) et la Nouvelle-Zélande (92%) avaient fait mieux.

Déception de l'Angleterre - Angleterre-Pays de Galles - 26 septembre 2015
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Un accident de parcours a posteriori inévitable vu la jeunesse de l’équipe, la pression qui pesait sur ses épaules et les mauvais choix de la RFU (le cas Burgess étant symbolique) qui ont déréglé un système qui avait fait ses preuves entre 2012 et 2014. Le bilan du XV de la Rose version Lancaster? Une victoire contre la Nouvelle-Zélande, une énorme tournée chez les All Blacks - deux défaites contre le court du jeu -, une démonstration de force face à l’Argentine en Argentine et une double victoire face à l’Australie...

  • L'énorme héritage de Lancaster

Un passé récent qui conditionne le présent. Lancaster voulait donner un vrai coup de jeune à cette équipe. Il l’a fait. En imposant de nombreux joueurs de moins de 25 ans dès l’entame de son mandat, les résultats sont aujourd'hui évidents: sur les 34 joueurs utilisés par Jones pour disputer le Tournoi des 6 Nations 2016, 30 ont été lancés par son prédécesseur. Seuls Hill, Daly, Itoje et Clifford ont été nouvellement capés sous Jones.

Les Anglais, vainqueurs du Grand Chelem 2016
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Encore plus symptomatique, sur les 15 titulaires réguliers du Tournoi, 14 avaient joué sous les ordres de Lancaster… Une situation implicitement reconnue par George Ford: On est repartis avec la majorité des garçons qui ont vécu cette Coupe du monde. On a bossé dur pendant ces huit semaines où on s'est retrouvés tous ensemble.

  • Un système de jeu conservé

Cette filiation est tout aussi évidente sur le plan du système de jeu. Lancaster avait très vite compris que l’arme majeure de ce XV d’Angleterre serait sa capacité à mettre du volume dans un match. Une intention louable et que le précédent sélectionneur avait pu mettre en place sur trois ans. Lancaster assume vite son style et le revendique même. En conférence de presse, il lâche en 2013: On veut pratiquer un jeu qui fasse lever les foules. Un jeu basé sur notre talent et nos qualités. On des bons buteurs, de superbes attaquants, des joueurs puissants.

Seulement, la triple défaite en Nouvelle-Zélande va avoir des conséquences via à vis de cette approche presque romantique du jeu. Terminé les associations joueuses et les intentions offensives. Twelvetrees et Eastmond sont écartés, Farrell ne rejouera presque plus au centre après cette tournée. Place à la puissance Barritt-Burrell-Burgess… Une option qui ne sera pas bien comprise, ni par la presse anglaise, ni en interne. Un choix étrange qui conduira au désastre face au pays de Galles et à l’Australie.

Sam Burgess - Centre de l'Angleterre - septembre 2015
Sam Burgess - Centre de l'Angleterre - septembre 2015

Eddie Jones a donc renoué avec un système proche de la volonté de base de Lancaster: de la vitesse, du volume et un retour à un centre du terrain plus joueur que destructeur. Ajoutez à cela un pack à nouveau conquérant et une défense efficace. Jones n’a rien inventé, mais il a su sublimer l’idée de départ de Lancaster en y ajoutant une touche redoutable et une mêlée plus solide. Dernier facteur: la chance. Aucun joueur majeur du XV d'Angleterre n'a connu la blessure cette année. Une première depuis presque cinq ans.

  • Des cadres confortés, des revenants déterminés

Les "patrons" installés par Stuart Lancaster se nommaient Ford, Marler, Haskell, Vunipola, Robshaw, Watson, Brown ou Joseph. Des joueurs qui ont logiquement été conservés par le nouveau sélectionneur anglais. Mais les choix qui différent sont plus intéressants que les choix identiques. Si Maro Itoje, la nouvelle sensation anglaise, aurait probablement été sélectionné par Lancaster et si l’association entre Ford et Farrell en 10 et 12 a déjà été tentée, le vrai pari d’Eddie Jones et d’avoir su redonner sa chance à des joueurs mis au placard par son prédécesseur. Chris Ashton (appelé mais suspendu), Danny Care et surtout Dylan Hartley.

Le capitaine anglais Dylan Hartley (droite) discute avec Maro Itoje sous le regard d'Owen Farrell et Billy Vunipola
Le capitaine anglais Dylan Hartley (droite) discute avec Maro Itoje sous le regard d'Owen Farrell et Billy Vunipola

Un capitaine parfait selon Jones: C'est un petit voyou mais un petit voyou sympathique qui n'hésite pas à dire aux gens ce qu'ils doivent faire et à leur dire quand ils ne le font pas bien. Jones a donc préféré le caractère et le talent à la gentillesse et la vie de groupe supposée. Un des rares choix qui distinguent les deux hommes.

  • Bilan

Si Eddie Jones est un formidable entraîneur, il n’est pas un surdoué du rugby. Son travail est nécessairement de qualité mais il a vu sa tache facilitée par des nombreux facteurs. D’abord, le travail de Stuart Lancaster, qui a su dépoussiérer le système anglais sur et en dehors du terrain, lancer tous les cadres de cette formation aujourd’hui couronnée mais qui a connu le pire résultat en Coupe du monde pour un pays organisateur.

Stuart Lancaster va rencontrer Mourad Boudjellal
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Puis une situation confortable sans précédent: l'Australien a du construire une équipe sur les vestiges fumants d’une formation en échec, mais de grand talent. Et en ayant la garantie, au moins temporaire, de n’avoir aucun compte à rendre à une Fédération au moins aussi responsable de l’échec de 2015 que son ancien entraîneur.

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