Déjà si fortes, les défenses sont-elles favorisées par les arbitres ?

  • Rokocoko et Lauret (Racing) face à North (Northampton)
    Rokocoko et Lauret (Racing) face à North (Northampton)
  • Maestri (Toulouse) face à Van der Merwe (Ulster)
    Maestri (Toulouse) face à Van der Merwe (Ulster)
  • Spedding (Clermont) plaque Waldrom (Exeter)
    Spedding (Clermont) plaque Waldrom (Exeter)
  • La défense des Saracens sur Taufa (Oyonnax)
    La défense des Saracens sur Taufa (Oyonnax)
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La Coupe du monde avait pourtant donné le ton: l'ère qui s'ouvrait après la parenthèse anglaise devait être celle de l'attaque, du jeu et des intentions. Finalement, presque deux mois de compétition au Royaume-Uni n'ont rien changé au rugby hexagonal. Les matchs, toujours intenses, sont aussi parfois d'une rare médiocrité offensive.

Et si le problème, c'était simplement que les défenses étaient trop fortes?

  • La stratégie défensive, au coeur du projet de jeu

L'attaque fait gagner des matchs, la défense fait gagner des titres. L'adage est caricatural, certes, mais résume souvent l'objectif des entraineurs. Assurer la cohésion défensive avant tout. Une solidité voulue, désirée et travaillée. Un secteur qui polarise l'énergie d'un à trois entraineurs par équipe au travers de ce que l'on appelle le "système défensif". Un mécanisme clé, qui depuis 15 ans est au centre des attentions et souvent… des intentions.

La qualité des défenses est logique au regard du temps et de l’énergie consacrée à ce secteur. Exemple avec le Montpellier version Galthié qui épatait par sa défense inversée, avec le Toulon européen, qui n'a jamais encaissé plus de 28 points en 3 ans, ou encore le VI Nations, où la meilleure défense gagne toujours depuis 2009. Reste à comprendre pourquoi la défense prend le pas sur l'attaque.

Maestri (Toulouse) face à Van der Merwe (Ulster)
Maestri (Toulouse) face à Van der Merwe (Ulster)
  • Freiner l'attaque adverse, une approche très rentable

L'approche européenne, et a fortiori française est relativement simple: pour gagner, il faut encaisser moins de points que l'adversaire. Une logique qui tranche avec la culture offensive de l'hémisphère sud. La défense est non seulement une arme mais parfois aussi l'unique moyen d'exister dans un match.

A ce stade, distinguons la volonté et les moyens employés. D'abord, l'intention commune de toutes les défenses: ne pas se consommer inutilement dans les rucks pour ne pas créer de déséquilibre et ralentir au maximum les sorties de balle. Une manière d'annihiler purement et simplement l'attaque adverse, qui doit alors multiplier les temps de jeu pour trouver une solution. Illustration avec la dernière journée de Coupe d'Europe: sur les dix matchs disputés, c'est l'équipe qui a la plus défendu qui s'est imposé sept fois (Saracens, Bath, Glasgow, Ospreys, Stade français, Leicester et Ulster).

Spedding (Clermont) plaque Waldrom (Exeter)
Spedding (Clermont) plaque Waldrom (Exeter)
  • L'arbitrage est-il trop permissif ?

L'une des explications, simpliste, tient à la manière dont l'arbitrage va avoir tendance à avantager les défenses. D'abord, dans l'application de la règle: gratteur protégé et rapidement récompensé, soutien offensif scruté et régulièrement sanctionné… Et que penser du fameux "choke tackle", un plaquage où la seule volonté des défenseurs est de maintenir le porteur de la balle debout. Dès lors, peu importe si l'équipe qui attaque avance ou si le joueur, au bout d'un long et rude combat arrive à passer au sol.

La balle est rendue à l'équipe qui défend, récompensant l'intention peu louable des défenseurs de pourrir le ballon. Conséquence? Les joueurs vont avoir tendance à préférer percuter le plus bas possible, interdisant les passes après contact. L'arbitrage efface une possibilité offensive: celle du maul spontanée.

Enfin, reste l'explication de l'irrégularité. Le système défensif connait une constante: aucune équipe ou presque n'a aujourd'hui un système défensif "classique". La rush-défense est devenu la norme, la défense inversée une option tout à fait viable. La banalisation des défenses agressives banalise aussi le hors-jeu. La règle imposant à la défense de se trouver derrière le pied du dernier joueur participant au ruck jusqu'au moment où le relayeur de l'équipe attaquante soulève le ballon devient secondaire. Aucun mal, alors pour la défense de prendre le pas sur l'attaque, les défenseurs comptants parfois jusqu'à plus d'un mètre d'avance sur l'équipe porteuse de la balle…

La défense des Saracens sur Taufa (Oyonnax)
La défense des Saracens sur Taufa (Oyonnax)
  • Bilan: Une philosophie de destruction

Les défenses progressent y compris dans les équipes les plus modestes ou dans les Nations mineures. Les spécialistes défensifs sont de plus en plus courtisés à l'image de Wayne Smith (Nouvelle-Zélande) ou de Paul Gustard (Saracens). Les systèmes sont par conséquent plus aboutis et plus efficaces. Mais plus intéressant: certains joueurs et certains entraineurs français paraissent assimiler l'idée que la défense ne fait pas partie d'un plan de jeu mais devient "le" plan de jeu. A l'image du XV de France lors de la dernière Coupe du monde.

Une évolution culturelle étonnante dans le pays du "french-flair" mais qui est aussi facilitée par l'usage et l'arbitrage, confortée par les statistiques et les exemples et qui est renforcée par l'idée que le moyen de rivaliser face à des équipes plus joueuses passe par le fait de les empêcher de produire quoi que ce soit. Une philosophie de destruction qui portait jusqu’à là ses fruits à l’échelon européen. Mais qui semble désormais insuffisante à l’échelle internationale.

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